4. Charleston

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Will avait été tiré du lit par le capitaine Vane, qui désirait encore l'entraîner. Grognant contre Charles, le jeune homme se leva avec peine et suivit le capitaine après avoir mis ses bottes et repris ses effets. Ils s'installèrent au niveau de la plage, dans un coin apparemment aménagé par les hommes du Kingston pour s'entraîner au combat. Les affrontements en intimité étaient finis, la chose devenait publique et Will devait s'imposer par la force. Vane avait gardé sa chemise, sa ceinture protégeant son abdomen, et Will remarqua pour la première fois la boucle d'oreille en anneau qui pendait à l'oreille gauche du capitaine ainsi que le collier autour de son cou, en cuir noir d'où dépassaient des petites pièces en métal. Celle au centre, orientée différemment des autres, attira son attention et il ne percuta que trop tard l'action du capitaine. Charles venait de le charger et il esquiva péniblement, assurant sa protection de la pointe de son arme. Il devait se concentrer. La suite se déroula mieux, malgré les courbatures du jeune homme. Max rejoignit les quelques pirates qui observaient ce combat. Quand Will tomba devant lui en se redressant rapidement, désarmé, le capitaine Lamera se permit un conseil :

— La gorge est sensible.

Will jeta un regard autour de lui et attrapa un morceau de tissu qu'il tendit ; le piège fonctionna et Charles, qui n'avait compris qu'une seconde trop tard l'intention du gabier, fut étranglé et projeté en arrière. En récupérant son souffle, il lança un regard assassin au blond, qui lui lança un grand sourire.

— Il est intelligent le petit. J'aimerais que tu ne me l'abîme pas trop.

Charles grogna, se releva et jeta un regard à Will, qui profitait de cette pause pour reprendre son souffle. Ils continuèrent encore plusieurs heures pendant lesquels Will prit des coups supplémentaires et Charles subit des blessures de plus en plus importantes. Ce petit, bien que mince, était rapide et savait en tirer profit. Si on remarquait d'abord des traits communs avec Jack Rackham, Charles était formel : ses mouvements n'avaient rien à voir. Will était fluide, agile et bon escrimeur.

— Bon, ça suffit. Tu as énormément progressé. Prend un peu de repos avant votre départ demain.

Il lui donna un coup amical sur l'épaule. Will rassembla ses effets et partit pour la taverne, sous le regard amusé de Max qui s'approcha de son ami.

— Il se débrouille bien. Il est rusé et il a ça dans le sang.

Charles hocha la tête, une lueur pensive dans l'océan de ses yeux. En trois jours, il s'était déjà attaché à ce petit mais ses hypothèses lui faisaient voir plus qu'il ne devait voir ; Will n'était ni Jack, ni Anne, même s'il était leur fils. On dit que les traits physionomiques sont héréditaires. Ainsi Charles ressemblait à sa mère et à son père, il en allait de même pour tous les enfants. Will n'échappait pas à cette règle mais le fait qu'il ait grandi loin de ses possibles géniteurs en avait fait une personne qui n'avait pas les tics de ses parents. Il était lui et Charles devait s'en tenir là. Max le tira de ses pensées.

— Tu devrais pas l'inciter dans son projet de reprendre Nassau.

Charles lui jeta un regard en biais avant de poser ses mains sur ses hanches. Il avait parlé de l'idée de Will et de ses arguments mais Max, voix de la sagesse, trouvait ce projet insensé.

— Tu vois bien que c'est de la folie. Les temps ont changé. On se ferait immédiatement canonnés et cette fois je ne serais pas là pour surveiller tes arrières quand tu leur échapperas.
— Tu seras à nos côtés.  Max...
— Je ne veux pas pousser le gamin là-dedans ! Mais j'écouterais ce qu'il a à proposer si le sujet vient sur le tapis.

Le regard dur du capitaine Lamera fit taire Charles, qui se contenta de lâcher un soupir en levant les mains en signe de reddition. Max n'insista plus et regagna son camp tandis que Vane retournait à ses affaires, peu fier d'avoir été vaincu par son camarade. Will avait, pour sa part, traîné la patte derrière les tentes et avait capté des bribes de discussions. Pensif, il gagna la taverne, hanté par les mots d'Ambre Black ; il ne réalisa même pas que Rose s'était approchée de lui.

— Tu t'es encore battu ! Charles s'est surpassé il faut croire... Allez viens.

Sans qu'il n'ait pu faire opposition, Will fut entraîné dans la même chambre que la dernière fois. La demoiselle s'était approchée avec de l'eau et, perdu dans son regard émeraude, le jeune homme la laissa enlever sa chemise. Mais à peine l'eut-elle effleurée que le brun bondit sur ses pieds, plaquant ses lèvres sur celles de la jeune femme. La surprise passée, Rose ferma les yeux et se laissa aller dans les bras du gabier dont les lèvres descendaient sur sa clavicule.  Will lui retira son corset avant de la plaquer sur le lit, exposant sa poitrine. Les choses s'accélérèrent alors et les deux jeunes gens se livrèrent à l'autre corps et âme. Ils ne purent gagner du répit qu'après plusieurs minutes de plaisir, leurs corps nus infiniment proches.

Rose rabattit le drap du lit sur eux en se glissant dans les bras de son amant. Will faisait pensivement glisser ses doigts sur l'épaule de la jeune fille, reprenant son souffle. Il se sentait bien, il n'avait pas l'impression de devoir quelque chose à Rose, seulement du bien-être apparemment partagé. La rouquine posa sa tête dans le creux de son épaule et dessinait les traces que les entraînements du capitaine avaient gravé dans la peau de Will. Elle leva la tête vers lui ; Rose savait par Max qu'il embarquait sur le Revenant en direction de Charleston, mais la raison l'intriguait. Quand elle lui posa la question, il baissa son regard :

— Mon père vit là-bas... enfin, mon père adoptif. Le capitaine Vane pense qu'il pourra confirmer mon lien de parenté avec Jack Rackham. Je ne suis pas sûr de vouloir la vérité.
— Bien sûr que oui tu veux la vérité. Sans elle, tu vivras toujours dans l'ombre d'un autre Rackham.

Elle avait raison. Il voulait être connu pour ses actes, comme Vane, Teach ou Lamera. Il n'était pas Jack Rackham et ne le serait sans doute jamais, mais cette histoire de parenté le perturbait plus qu'il ne voulait l'admettre. Il plaqua un baiser sur le front de la demoiselle qui finit néanmoins par se lever pour retourner travailler ; elle lui fit promettre de venir après le service, engagement auquel il ne manqua pas.

***

Quand il se réveilla le lendemain matin dans les bras de la jeune fille qui dormait sur lui, Will émit un grognement. Il n'avait pas envie de bouger mais était bien obligé de rejoindre son campement pour partir. Il se dégagea en tachant de ne pas réveiller Rose, qui lâcha quand même une légère plainte. Le gabier s'habilla et attrapa ses effets sur la table quand Rose l'appela.

— Tu reviens quand de ton expédition ?
— J'en sais rien, mais je passerai te voir, fit-il dans un sourire tendre.

Il déposa un baiser sur ses lèvres et quitta la pièce. Il traversa le bar à grandes enjambées et arriva sur le camp qui se réveillait tout juste. Il étouffa un soupir de soulagement, il n'aurait sans doute pas à affronter son capitaine. Il aida les gars à embarquer les vivres et monta à bord de l'immense frégate ; le Revenant était un grand navire en bois clair, usé par la mer. Ses voiles blanches s'accordaient à la noblesse du bâtiment. Max sortit de sa cabine une fois tout le monde à bord.

— On lève l'ancre, hissez les voiles. Cap ouest, nord-ouest ! Je veux qu'on contourne les Bahamas.

Les ordres se transmirent avec l'écho des hommes les répétants. La frégate se mit en branle une fois l'ancre relevée et, par les codes maritimes, les ordres furent transmis au brigantin de la flotte, qui les escortait sur ce voyage.  Will s'approcha du bastingage, observant la mer des Caraïbes s'offrant à lui et il huma à plein poumons l'air marin. Max s'approcha derrière lui :

— Je comprends ce que Charles te trouve. Pourquoi devenir pirate, Will ? demanda-t-il en s'appuyant au bastingage, dos à la mer et face à son invité.
— J'avoue que ça relève de la survie. C'était rejoindre Telmer ou être coupé en rondelles.

Max éclata de rire devant l'air presque gêné du gabier. Il lui posa une main sur l'épaule dans un signe amical.

— T'es un bon gars Will, ne te laisse pas influencer par tous ceux qui pensent te connaître mieux que tu ne te connais.

Le capitaine s'éloigna, laissant le brun à sa contemplation. Max était un homme sage, apparemment capable de maîtriser Charles Vane, et très conscient de son époque. Will l'admirait tout comme il admirait son mentor. Il leva les yeux vers les voiles gonflées ; les ordres étaient lancés entre les hommes, et le brigantin avec eux ouvrait la marche. De tout le voyage, le vent ne faiblit pas et la frégate avança la plupart du temps à une vitesse presque régulière de dix nœuds ; le soir du cinquième jour de voyage, Max fit ralentir le Revenant quand la terre se dessina à l'horizon. Ils devaient se faire discrets. L'équipage du capitaine Lamera était discipliné et Will avait pris grand plaisir à voyager auprès d'eux, participant aux tâches des gabiers. Charleston fut rapidement en vue et le navire vogua tranquillement de nuit.
Au petit matin, la capitale de Caroline se dessinait devant eux. Max s'approcha de Will et lui répéta les consignes : il irait seul à terre, les hommes du capitaine resteront sur le qui-vive. Il trouve son père adoptif et regagne la frégate avec les informations qui l'intéresse. L'équipage ira ensuite à terre pour négocier des marchandises. Le gabier hocha la tête avant de monter dans la chaloupe qui fut descendue ; il regarda le bateau s'éloigner à chaque coup de rame et profita de cette transition pour remettre de l'ordre dans sa tenue. Il lissa sa chemise, la rentra dans sa ceinture de cuir qu'il reboutonna correctement par précaution puis il ajusta le bandeau que Max lui avait donné pour masquer son visage.
A terre, il attacha sa chaloupe au quai en veillant à ne pas se faire remarquer. En jetant un coup d'œil par-dessus son épaule, il remarqua que le Revenant avait hissé le drapeau français. Max jouait sur ses origines, notamment en terre anglaise où il ne risquait pas grand-chose en se faisant passer pour un marchand français. Le gabier quitta rapidement le port, ses effets à la main, et commença à activement chercher sa route. Il savait où il allait, sa maison n'était pas loin, il profitait de sa visite à terre pour une chose : les pendaisons publiques. Si beaucoup de pays sous la tutelle anglaise proposaient des amnisties, la Caroline faisait exception, au même titre que Port Royal ; pendre des pirates sur la place publique de Charleston était devenu un rituel, pour peu qu'on ait des pirates sous la main. En longeant les ruelles, Will repéra deux fourgons de prison à l'arrêt, apparemment pleins. Mais avant qu'il ne pu s'en approcher, un garde lui barra la route :

— Qui êtes-vous jeune homme ?
— Je suis le fils du gouverneur Cormac, répondit Will, à l'aise avec cette réponse trop familière, en retirant le tissu qui masquait son visage. J'étais en voyage avec des marchands, ce qui explique ma tenue ainsi que mes armes – les eaux ne sont pas sûres. Qui sont ces hommes ?

Le garde se retourna vers les fourgons et répondit calmement en faisant de nouveau face au brun :

— Des pirates. Ils seront tous pendus aujourd'hui à midi. On en a pas eut beaucoup, alors forcément, avec tout un équipage pris, on fait les choses en grand !

Will hocha la tête et le remercia avant de partir rapidement vers la plantation du gouverneur Cormac. L'homme possédait une large plantation qui avait fait de lui un des hommes les plus importants du nouveau monde. Bien qu'il y ait de nombreuses années, il avait tout perdu à cause d'un incendie criminel, il avait su se refaire une fortune et ainsi élever son fils dans les meilleures conditions qui soient. Grâce à lui, Will était un homme lettré, qui avait des bases solides en équitation, escrime et navigation, en plus d'être un excellent négociateur. Il franchit le portail du domaine sans crainte et parcourut d'un pas rapide les mètres le séparant de la possible vérité.
Il attendit calmement après avoir frappé à la porte, quand celle-ci s'ouvrit sur un homme plus tout jeune, aux cheveux grisonnant mais à l'air très noble, très assuré. Le gouverneur Cormac détailla cet individu avant que son visage ne soit éclairé d'un large sourire.

— Mon fils ! s'exclama-t-il en prenant Will dans ses bras. Ton capitaine m'a dit qu'il t'avait perdu à Tortuga, j'ai eu si peur !
— J'ai eu quelques ennuis... Je peux ?

Le gouverneur s'effaça pour le laisser entrer. Ils gagnèrent le salon et Will fit en sorte d'avoir constamment l'horloge dans son champ de vision.

— Je ne reste pas longtemps, j'ai... j'ai besoin que tu me parles de mes parents.

Le visage de l'homme s'assombrit et il se redressa dans son siège, mal à l'aise. Brusquement, il soupira et planta son regard dans celui du jeune homme.

— Je n'ai pas grand-chose à te dire... Ta mère, Anne, ma fille... elle t'a laissé à moi pour que son mari ne découvre pas ton existence... Je suppose que tu es issu d'une nuit sans suite. J'ai toujours eu des problèmes avec elle ! Elle a mal tourné, malgré tout ce que j'ai fait pour elle. Mais je ne peux pas lui reprocher d'avoir eu un enfant hors mariage... c'est ce qu'elle est après tout.
— Alors... Tu es mon grand-père, comprit le gabier. Comment s'appelait son mari ? Et son amant ?
— J'ignore qui est ton père si c'est la question. Elle a épousé un certain James Bonny, mais de toutes évidences il n'était là que pas intérêt et devait ignorer la rancune d'Anne à mon égard. Tu es tout ce qui me reste d'elle.

Will resta pensif. Les soupçons de Vane se confirmaient en partie, il était bien le fils d'Anne Bonny. Mais Jack n'était pas forcément son père, il fallait retrouver la pirate pour le savoir, elle seule avait la vérité. Mais pourquoi avait-il hérité du nom de Rackham ? Il aurait pu avoir celui de sa mère, elle avait préféré lui laisser un nom différent. Une chose était clair pour le jeune gabier : il devait retrouver sa mère.
Il jeta un coup d'œil vers l'horloge et une décharge sembla le parcourir : il devait aller sur le lieu de l'exécution, il n'avait qu'une heure avant de voir ses semblables être assassinés. Il reporta son regard sur le gouverneur :

— Merci de ton accueil... Malheureusement je dois repartir.
— Reviendras-tu ? demanda l'homme avec une lueur d'espoir dans les yeux.

Will acquiesça et lui prit les mains pour le remercier encore. Il quitta rapidement la maison, remettant en place ses effets à sa ceinture, et masqua de nouveau son visage. Une foule se formait autour de la potence où pendait lamentablement quatre cordes en attente. Une des deux fourgons avait été amené et les gardes faisaient descendre les pirates. Will s'éclipsa de la place et regagna l'endroit où l'autre prison devant attendre. Attachée à deux chevaux, cette dernière n'avait pas bougé mais se trouvait bien gardée. Will jaugea la situation et s'engagea dans une large rue qui donnait sur plusieurs petites ruelles. Une poule passait par là et donna une idée au jeune homme pour faire diversion. Il arma son premier pistolet, le second, et tira sur l'animal avant de rapidement recharger. Il s'éclipsa dans une ruelle avec le corps en entendant des pas venir vers lui. Les gardes s'arrêtèrent sur les traces de sang, sans prendre en compte la présence du jeune homme, qui sortit de l'autre côté de la ruelle en abandonnant le cadavre. Il regagna le fourgon, a présent gardé par un homme dos à lui. Will, rasant le mur, sortit son sabre avant de l'enfoncer dans le garde qui ne pu faire grand-chose, la main du pirate sur sa bouche l'ayant empêché de hurler. Will s'empressa de monter à la place du conducteur, tandis que des murmures s'échappaient de la prison. Il fit avancer les chevaux et les lança dans la rue jusqu'à être suffisamment éloignés.
Les rues étaient désertes, en raison du spectacle qui devait s'offrir aux citoyens. Will freina la voiture et alla libérer les hommes, brisant le cadenas avec la crosse de son pistolet. La porte ouverte, il tomba sur une dizaine d'hommes qui le regardaient tous bizarrement, ne croyant plus à un sauvetage. Il prit la parole :

— Je suis ici pour vous faire quitter cette ville et vous offrir votre liberté. Mais promettez-moi de me suivre mes frères et je vous donne ma parole que nous naviguerons bientôt.

Tous se concertèrent et le plus grand d'entre eux s'avança. Will le détailla : il était presque aussi massif que Vane, avait des cheveux châtains et des yeux bruns dans lesquels Will cru lire une loyauté sans faille.

— Sors nous d'ici, et on t'suivra.

Il serra la main du jeune homme qui les fit tous descendre. Enchaînés aux poignets et aux mains, ses hommes ne seraient pas en bonnes positions de combat. Le soleil était bientôt au zénith, ils devaient se hâter. Le jeune homme les conduisit vers la forge de la ville. Il entra, sabre à la main et fut presque désemparé de ne tomber que sur un esclave. Au dehors, la cloche commença à retentir. Will attrapa son pistolet et le pointa vers le nègre :

— Soit tu coopères et je te rends ta liberté, soit je te tue maintenant.

L'homme, une fois la surprise passée, ne sembla pas effrayé et leur fit signe de venir. Il fit chauffer une tige de métal et attrapa un marteau. En un rien de temps, les hommes furent libérés et ils pillèrent l'artillerie du forgeron pour s'équiper. Will serra la main de l'homme esclave :

— Merci mon ami. Comment t'appelles-tu ?
— Alistair. J'aimerais venir avec vous.
— On ne dit pas non, bienvenu à toi.

Équipés, ils repartirent vers le lieu de l'exécution. Ils étaient une dizaine de pirates, armés et prêts à défendre leur droit le plus précieux : vivre. Will leur indiqua son idée : une équipe ferait distraction pendant que les autres libéreraient les prisonniers. Tous acquiescèrent l'idée, la trouvant risquée mais pas impossible à réaliser. Arrivés près du premier fourgon, Will détacha les chevaux et en donna un au leader de ces hommes.

— Au fait, c'est quoi ton nom ?
— Nathaniel, Nathaniel Harbour.
— Parfait. Je suis Will. Suis-moi, on tachera de faire diversion et de bloquer les soldats.

Nathaniel acquiesça et ils se mirent en selle. La cloche d'alerte retentissait toujours, ils avaient eu de la chance de ne croiser personne. Le premier groupe en place élimina les soldats présents restés à la potence. Alistair guida ceux restés en arrière pour ouvrir le fourgon et grimper sur la potence libérer les hommes déjà sur l'échafaud. D'autres soldats arrivèrent et Will, à cheval, tira de ses deux pistolets et réussit à faire mouche. En ayant réussi à bloquer la plupart de ses coups à cheval, il fut désarçonné et heurta douloureusement le sol. Alistair, qui avait réussi à couper toutes les cordes pour libérer les prisonniers, vint protéger le brun d'un rapide coup d'épée. Will se redressa et cria à ses hommes de fuir vers la plage. Il espérait que Max puisse les couvrir. L'ancien esclave l'aida à se relever et ils quittèrent la place publique maintenant encombrée de civils paniqués.
La plage fut rapidement en vue et les pirates se jetèrent à l'eau sans se faire prier. Will observa la baie de Charleston avant de repérer un sloop de guerre. Il guida ses hommes vers ce dernier quand le fort de la ville commença à faire feu. La riposte fut rapidement en place : ouvrant ses sabords, le Revenant fit feu de toute sa bordée de tribord. Le fort fut touché et contraint de diriger le tir vers la frégate qui se mit en mouvement. Les soldats sur la plage tirèrent au fusil tandis que les anciens prisonniers commencèrent à escalader le sloop. Nathaniel arriva avant Will et ne perdit pas une seconde :

— Levez l'ancre, hissez toutes les voiles ! Il faut qu'on s'tire d'ici !

L'ancre fut remontée et des cordages furent jetés par-dessus bord pour aider ceux en arrière. Will passa le bastingage et aida un homme à faire de même quand un boulet de canon passa près de la coque du sloop-of-war.

— Activez-vous ! On a pas de temps à perdre !
 
La frégate du capitaine Lamera était déjà hors de portée des canons du fort et le sloop avançait rapidement dans son axe afin de bénéficier du même vent. Rapidement, tous furent hors d'atteintes au large. Will respira, expirant longuement pour faire redescendre l'adrénaline en lui. Il prenait peu à peu conscience que pour la première fois de sa vie, il avait tué un homme. L'abordage avec Telmer paraissait lointain, mais le brun ne se souvenait pas d'une telle violence. L'entrainement du capitaine Vane avait été son meilleur atout. Il se débarrassa pour de bon du bandeau qui masquait son visage, qu'il n'avait retiré que pour se présenter à ces hommes. Nathaniel s'approcha de lui.

— On te doit tous la vie. Les hommes veulent voter pour élire leur capitaine.
— Maintenant ?

Il hocha la tête et entraîna Will à sa suite sur le pont principal. Le gabier s'adossa au bastingage en écoutant Alistair parler à tous, qui l'écoutaient sans un mot, du pont aux haubans.

— Ce gars a sauvé votre peau ! Il nous a rendu notre liberté. Camarades, je propose que sur ce navire maintenant notre et pris à la barbe de la Navy, notre capitaine soit celui à qui on doit tout ! Will !

Il brandit la main vers le jeune homme qui n'osa pas bouger tandis que tous clamaient leur joie et leur accord. Nathaniel leva les bras pour faire revenir le calme.

— Beaucoup d'entre vous me connaissent, nous avons navigué ensemble. En tant qu'ancien quartier-maître, j'ouvre le vote pour élire notre capitaine ! Qui pour que Will soit notre capitaine ?

Les voies furent unanimes, sans doute portées par cette liberté soudaine, eux qui se pensaient tous condamnés. Will sourit et il fut traîné au milieu des marins :

— Je suis... flatté que vous me vouliez comme capitaine. Je m'engage à vous protégez et à tout faire pour nous rendre riches et libres ! Moi, Will Rackham, accepte cette lourde tâche qui est celle du capitaine.

L'entente de son nom fit cette fois tiquer les hommes, qui échangèrent des murmures. Le brun se mordit la langue, honteux d'avoir ainsi donné son identité. Il avait choisi d'être transparent avec ces pirates mais cette information risquait de lui coûter la vie. Une voix s'éleva :

— T'as un lien avec Jack Rackham ?
— Je sais que ce nom n'est pas flatteur. Peu importe mon lien avec Jack Rackham, faites-moi confiance, je ne suis pas cet homme ! Laissez-moi vous montrer ce que je vaux, oubliez mon nom. Je tâcherais d'être à la hauteur !
— Moi ça me va, dit calmement Nathaniel en soutenant le regard du jeune capitaine.

Des murmures retentirent et finalement, Will fut élu capitaine. Nathaniel, que beaucoup connaissaient ici, fut élu quartier-maître. Les stocks furent établis et le nouveau quartier-maître établit les rôles de chacun à bord ; ils avaient à bord un pilote, ainsi qu'un cuisinier, deux rôles peu fréquents mais indispensables. Les hommes semblaient enclins à cette nouvelle vie qui s'offrait à eux. Rapidement, le sloop rattrapa la frégate et vogua à ses côtés. Le Revenant hissa ses voiles de communications, demandant au sloop de les suivre. Peu de temps après, un pigeon voyageur se posa sur le bastingage du gaillard arrière, où Will discutaient avec Nathaniel des provisions qu'il leur restait ainsi que des stocks. Will récupéra le message et l'oiseau s'envola vers la frégate. Le jeune capitaine haussa un sourcil, surpris de ce moyen de communication mais n'en fut pas étonné. Il déplia le message :
« Nous ferons halte sur une petite île de ma connaissance, je crois que tu as des choses à me raconter. Max.»

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⏰ Last updated: Oct 12, 2023 ⏰

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RackhamWhere stories live. Discover now