2. Laisse-moi t'emmener dans mon monde.

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Se réveillée seule était devenue une habitude à laquelle Nina ne se faisait pas. Quelques minutes suffirent à la remettre d'aplomb, moralement. Son corps endolori peinait à se frayer un chemin en dehors des draps.

Une douche rapide et un café plus tard, la sensation de réveil tardait à se faire sentir. Nina savait pourtant qu'une longue journée l'attendait et sa perspective l'a fatiguait d'avance. En attrapant son manteau et son sac oublié sur le fauteuil, elle aperçu le portefeuille d'Anthony sur la table basse. Le pochon rempli de pilule souriait faiblement à la lueur matinale. « Ça ne peut pas me faire de mal après tout... ».

Elle attrapa le sachet et en avala une avec une gorgée d'eau. Toujours de l'eau sur elle était devenue une véritable habitude : elle avait toujours une bouteille dans son sac à main. Pouvoir s'hydrater à n'importe quel moment était un secret de beauté qu'elle était fière de respecter à la lettre. En saisissant le trousseau de clé, elle songea à la nuit qu'elle venait de passer : une nuit dont les qualificatifs sont nombreux, à la fois volcanique et assourdissante. Elle sentait au plus profond d'elle-même qu'elle aimait cet homme. Elle l'aimait pour les sensations qu'il lui offraient, pour l'amour qu'il lui faisait. Nina ne se demandait pas si elle l'aimait pour les bonnes raisons, elle ne savait faire la différence entre celles-ci. Elle se savait éprise d'Anthony, de la force de ses mains à celui de son corps entier.

La rue s'éveillait péniblement. Nina aperçu un chat cloîtré sur le pare-choc de sa voiture, elle le terrorisa malgré elle en actionnant le déverrouillage automatique des portières. En insérant la clé sur le contact, Nina savait que cette nouvelle journée morose s'annonçait ce qui fit soupirer Nina. Elle savait que cette journée serait éprouvante.

Peut-être pas autant qu'elle le soupçonnait : les pilules magiques d'Anthony firent vrombir le moteur de la 306. Nina arriva en trombe au premier carrefour.

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Les petites annonces du journal n'annonçaient aucun renouveau pour aujourd'hui. Jordan avala une nouvelle gorgée de café amer, soupirant en observant les rues s'éveiller doucement à la lueur du soleil. La lumière diffuse lui fit plisser les yeux et le jeune homme replongea dans sa lecture.

Cordonnier, plombier, maintenance industrielle... Rien ne suscitait son intérêt outre mesure.

En payant l'addition, Jordan salua d'un revers de manche le patron du bar dans lequel il s'attablait chaque matin. Les mains dans les poches et une cigarette en bouche, il observait distraitement les passant qu'il croisait. Avocat, cadres et autres costards cravates se pressaient sur le trottoir, sillonnant entre les excréments. Lui ne se pressait pas. Il n'avait pas hâte de se retrouver dans cette agence dont il n'aimait ni le nom, ni les collègues, ni leurs principes, ni leurs bureaux, ni leurs cafés.

L'immense bâtisse grise apparut au détour d'une rue. Sa journée était sur le point de commencer. Il inspira une dernière bouffée d'oxygène pollué et s'engouffra entre les portes battantes. Assistance technique internet. Rien ne suscitant son intérêt outre mesure.

Lorsque le ciel se teinta de bleu à travers la grande baie vitrée de son bureau, Jordan prit le temps de fumer une cigarette. Interdit habituellement, mais le manque de nicotine n'attendait pas entre ces murs. L'autorité n'avait que peu d'impact sur le jeune homme, son employeur l'avait appris à ses dépens en critiquant sa tenue vestimentaire qui n'était pas réglementaire. T-shirt et jeans, chaque jour. Aucun costume. Puis, malgré un visage angélique, Jordan possède deux piercings à la bouche et un autre à l'arcade sourcilière. Cependant, le jeune homme était très discret et, son travail étant irréprochable, il n'avait rien de plus à lui dire.

Le Parapluie RougeTahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon