Tainted Love - A bodyguard story (Is it Love? Jake)

Cry me a river

Je sais que Ryan Carter est riche, très riche. Mais là je suis estomaquée.

J'ai eu un temps d'arrêt en voyant devant quel immeuble Jake avait arrêté la limousine, j'ai cru avoir changé de monde en entrant dans le hall, j'ai failli défaillir en voyant la taille de l'ascenseur (privatif bien sûr) et là je suis en train d'éviter de me décrocher la mâchoire en voyant l'immense penthouse de mon chef. Il est au dernier étage et bénéficie d'une magnifique vue sur toute la grosse pomme.

- Mademoiselle Valentine! m'accueille Carter avec un immense sourire éblouissant. Je ne vous remercierais jamais assez d'avoir accepté de venir ce soir. Il faut absolument que nous parlions d'un dossier des plus important.

Je n'ose pas vraiment entrer dans son appartement, cela fait partie des lignes que j'évite de franchir avec mes supérieurs en temps normal. J'ai l'impression de bafouer son intimité. J'hésite encore quand je sens en main ferme se poser dans le bas de mon dos pour m'inviter doucement à avancer. Je me crispe d'un coup. Je ne suis pas quelqu'un de très tactile de manière générale et cette soudaine proximité me met immédiatement mal à l'aise. Jake doit le sentir car il retire vite sa main. Je sens que mon sourire est figé et que ça se voit, mais bon gré mal gré, je n'ai pas le choix : quand faut y aller, faut y aller.

- J'ai cru comprendre que c'était urgent, je réponds d'une voix que je sais être ni naturelle ni détendue.

Je me retiens d'ajouter que j'espère que c'est plus qu'urgent car cette histoire me prive de ma fin de week-end mais je me retiens. D'un geste courtois, Carter m'invite à entrer et m'ôte ma veste des épaules pour la poser sur son canapé. Il m'entraîne ensuite vers sa cuisine et là, c'est le coup final : la cuisine de mes rêves est là, devant moi, hyper design, hyper équipée, immense! Sur l'îlot central un ordinateur portable dernier cri côtoie une pile de dossier. Je sors mon ordinateur professionnel de mon sac et m'installe, toujours légèrement intimidée (et surtout extrêmement mal à l'aise), à côté de Carter. Cette ambiance me met sur des charbons ardents et je ne sais pas du tout quelle attitude adopter.

- Je pense que cela va nous occuper une bonne partie de la soirée, j'ai pris la liberté de nous commander de quoi dîner, j'espère que cela vous convient.

Je suis sensée être en week-end, je le rappelle au cas où quelqu'un aurait oublié ce léger détail.

- C'est parfait, monsieur.

- Je vous en prie, ici vous pouvez m'appeler Ryan.

Je retiens un soupir, son ton est sans appel, il ne me laisse pas vraiment le choix. Du coin de l'œil, je vois Jake s'installer dans le canapé (immense aussi). C'est étrange que Carter laisse son chauffeur rester avec nous si le dossier dont il veut parler est si sensible... Je note ce petit détail dans un coin de ma tête.

- Bien, tout d'abord je voulais vous remercier pour votre travail et votre investissement depuis le début de votre contrat. C'est plus qu'agréable d'avoir des collaborateurs aussi engagés et performants.

Je me sens plus que fière devant autant de compliments, en général Carter est assez avare en ce qui concerne le fait de valoriser ses collaborateurs. Je suis satisfaite de voir que mes efforts ne sont pas passés inaperçus. J'aime Carter Corp depuis que j'ai commencé à y travailler, c'est la première fois que je me sens aussi bien dans un travail. Mon premier poste avec Matt, un graphiste talentueux, et très dissipé, me plaisait. J'ai tissé de vraies amitiés avec certains de mes collègues, mais ma nouvelle place est beaucoup plus stimulante et épanouissante. J'ai de nouvelles responsabilités et c'est grisant de d'être en position de force sur certains sujets.

- Merci monsieur, dis-je avec un sourire cette fois-ci francs sur les lèvres.

Je ne le lui dirai jamais mais Carter est quelqu'un de très intimidant, j'ai des réunions quotidiennes avec lui et je n'ai toujours pas réussi à m'y faire. Son look est toujours impeccable, ses costumes parfaitement coupés. Même ici, chez lui, où il a troqué l'éternelle cravate pour un polo relax il est impressionnant. Lisa n'arrête d'ailleurs pas de me taquiner avec ça à chaque fois que je parle de lui. Il est séduisant, pas de doute, mais j'ai vu suffisamment de demoiselles passer dans son bureau... J'ai d'ailleurs plus d'une fois dû leur expliquer ce qu'elles pouvaient risquer à parler à la presse de leur "expérience" avec mon patron. Je ne le juge pas, il fait ce qu'il veut et vu son physique et sa position, il aurait tort de se priver. Pourtant, il a une attitude vis à vis de ces femmes que je trouve dérangeante, j'ai l'impression qu'il les "consomme" comme un enfant le ferait d'un paquet de bonbons sans fond. En tant que patron je le respecte, en tant qu'homme c'est déjà plus compliqué.

- Donc, si je vous ai fait venir c'est parce que j'ai l'intention de vous faire participer de manière plus active dans les dossiers plus...sensibles. Ces derniers mois m'ont montré que je pouvais avoir confiance en vous. J'espère faire le bon choix.

En même temps qu'il parle, je sens son regard sévère se planter dans le mien. J'ai dû mal à le regarder dans les yeux et j'ai bien senti la légère menace derrière ses paroles : il m'accorde sa confiance et je n'ai pas intérêt à le trahir ou à le décevoir. Message reçu cinq sur cinq. Au moins, ça a le mérite d'être clair. J'ai déjà remarqué l'importance que Carter accorde à la loyauté et c'est un homme puissant qu'il ne faut pas prendre à la légère.

- Vous savez que vous pouvez compter sur moi, monsieur, je réponds d'un ton ferme sans lâcher son regard.

Le visage de Carter se détend d'un coup et son regard s'adoucit.

- Bien! Maintenant que tout est clair nous allons pouvoir commencer. Ah! Oui, j'ai oublié de préciser, M Stewart est mon garde du corps, ne vous étonnez donc pas de sa présence.

En entendant ces mots je me tourne vers Jake qui me fait un petit sourire. A mon grand désarroi la musique de Body Gard commence dans ma tête.

Je deviens vraiment comme Lisa...