CHAPITRE 2

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« it's like the walls are caving in »

« c'est comme si les murs s'effondraient »

Cette chanson est déjà magnifique quand on ne comprend rien aux paroles, mais une fois comprises, elles prennent un sens logique, on s'identifie, ou plutôt on identifie notre histoire à ces paroles. Les murs de ma prison se sont effondrés comme dans cette chanson. Je peux maintenant voir plus loin, toujours plus loin. En m'enfuyant de cet endroit où j'ai grandis je me suis aussi débarrassée de tout barrage psychologique. Je veux dire par là que je n'ai plus à me soucier de toutes les conséquences que mes actes ou mes mots pourraient avoir sur mes géniteurs. En bref : je suis libre.

Cela fait maintenant 14 heures que je marche sans m'arrêter. J'ai cru voir tout à l'heure que j'arrivais à Saint-Quentin.

J'ai faim et je commence à vraiment être épuisée. Faire du stop serait la solution la plus adapté. Je prévois bien sur de ne monter qu'avec une femme qui ne paraitrait pas trop louche. Et avec un peu de chance elle m'accompagnera jusqu'à Reims.

C'est ainsi que je me mets à marcher le pouce en l'air.

J'ai conscience que pas mal de filles ont déjà mal fini dans ce genre de situation mais on y va au petit bonheur la chance. Au pire des cas, je n'ai plus rien à perde.

Après une bonne demi-heure de crampe au bras gauche, je vois enfin une voiture ralentir et s'arrêter quelques mètres plus loin. Je m'approche méfiante et j'arrive à distinguer 3 carrures. Ce sont des hommes. Ils sont 3. Je suis une fille. Je suis seule. Je commence à paniquer. J'ai chaud et mon cœur s'accélère malgré moi. Je me fige et mes mains tremblent, mon cerveau pourrait cracher de la fumée si j'étais dans un cartoon.

Je ne veux pas prendre de risque mais je ne sais pas comment faire pour me sortir de là et j'ai beau chercher, aucune solution ne s'offre à moi. Mes mains son moites, je regarde partout autour de moi. Ma seule option serait de passer la barrière et de courir en espérant qu'ils ne prendront pas la peine de me poursuivre.

Il ne me reste que quelque mètre pour prendre une décision.

Je peux maintenant les reconnaitre nettement : je dirai qu'ils ont tous à peu près 23 ans. Ils rigolent... et me regardent clairement comme leur prochain repas.

Il ne m'en faut pas plus pour prendre mes jambes à mon coup. Je saute la barrière et court comme si ma vie en dépendait. Et elle en dépend. L'adrénaline monte en flèche. Il y a au moins deux champs à traverser avant d'atteindre ce qui ressemble le plus à une route. J'ai envie de regarder si ils me suivent mais ca me ralentirai et je n'ai pas besoin de ca, surtout si c'est le cas.

J'arrive à une clôture. Croisons les doigts pour qu'il n'y est pas de courant. Tant pis, j'ai connus pire. Je passe entre les fils sans encombre, et sans décharge. Je reprends ma course à vive allure. Après 5 minutes de sprint j'arrive sur un chemin, je m'arrête. Ils ne m'ont pas suivie.

La pression redescend, je crois que je n'ai jamais eu aussi peur. Avec mes parents je n'avais plus besoin d'appréhender, c'était prévisible. Là, je ne savais pas quel sort ils me réservaient. Et j'ai stressé.

J'ai fait tout ca pour rien. Et maintenant je dois vraiment manger ou je ne tiendrai pas debout une heure de plus. Autour de moi : champs et vaches. Je lève la tête et aperçois un clocher. Je dirai qu'il se trouve à 2 voir 3 kilomètres maximum. Je me remets donc en route.

Il m'a fallut 35 minutes pour rejoindre le bourg de cette communes. Comme je l'avais aperçue plus tôt, un énorme clocher ce trouve au centre de petits commerces. Je n'ai jamais aimé les églises, pour moi elles sont synonymes de mort ou de naissance. Dans les deux cas, c'est un sentiment négatif qui me parvient. La mort parce qu'elle me rappelle celle de mes grands-parents, seuls êtres gentils et affectifs que j'ai pu rencontrer. Je ressent tout à coup le manque des ses formidables personnes. Et les naissances parce que je regrette la mienne.

Un coup de klaxonne me fait sortir de mes pensées. Je me décale sur le trottoir et laisse passer. Je me dirige ensuite vers la superette du coin et me prend un sandwich et des bouteilles d'eau, étant donné que j'ai vidé la mienne tout à l'heure. Heureusement que j'avais réussi à pas mal économiser ces dernières années et que je ne suis pas trop dépensière. A la caisse, l'employé me regarde d'un drôle d'air, ils ne doivent pas avoir l'habitude des étrangers ici.

Il connait peut-être quelqu'un susceptible de m'épargner un bout de chemin à pied, je lui demande :

-« excusez- moi ? Vous ne connaitriez pas un moyen d'atteindre Reims rapidement à partir d'ici ?

- le week-end il y a des cars, sinon il y a une feuille de covoiturage au tabac. il me fait un signe de tête pour m'indiquer l'enseigne de l'autre côté de la rue.

- d'accord, merci. »

Pas très aimable en tout cas celui la.

Peu importe, ce covoiturage est ma seule chance, je ne peux pas me permettre de rester ici toute la semaine, on est mardi, je dois absolument trouver un compagnon de route.

Je me rue alors vers le bar tabac d'en face. De paires d'yeux pas vraiment discrètes me regarde avec curiosité. bien que mal à l'aise je les ignore et cherche cette fameuse feuille du regard. Une fois trouvé je cherche une personne qui pourrait me rapprocher un minimum de mon but. Et par je ne sais quel miracle, quelqu'un part en direction de Laon, dans 45 minutes. J'inscris mon nom et vais directement sur le lieu de rendez-vous, qui n'est autre que le parking de l'église. Il est 15h30 et si je ne me trompe pas, on devrait atteindre Laon en 45 minutes, J'y arriverai donc à 17 heure.

16h30 : c'est-à-dire seulement 15 minutes que mes oreilles souffrent de l'horrible radio de cette dame légèrement décalée bien que très gentille. Et malgré sa musique complètement dépassée, je la remercie intérieurement de ne pas poser de question ou de ne pas vouloir faire la conversation.

On me réveille 30 minutes plus tard en tapant légèrement sur mon épaule. J'ouvre les yeux et émerge lentement, puis je me redresse.

Je suis arrivé à Laon.

Path of the revivalWhere stories live. Discover now