QUATORZE ; LE PHARE

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La barque glissait doucement sur l'eau. La nuit est calme, ç'en est presque dérangeant. Après le folie de ces derniers temps, un instant de repos est accueilli bizarrement. Comme si aucun de nous n'y croyait vraiment : un moment de répit, ça n'existe pas sur Terre.

Baignés dans la lumière de la lune, nous continuons de ramer. Mes bras me font mal, mais je garde le rythme. Nous ne pouvons nous permettre de ralentir, même si nous ne savons pas exactement jusqu'où avancer. Jaha fixe l'horizon, guettant un quelconque signe de vie. John pose une main sur mon épaule, je tressaille au contact de sa paume.

- Laisse, je vais prendre le relais.

Voyant que je ne desserre pas ma prise sur la rame, John effleure mes doigts doucement. Il est inutile de me fatiguer davantage, c'est vrai. Je lui laisse donc son tour et m'asseois aux côtés de Jaha. Je ne porte pas cet homme dans mon cœur, mais il semblerait que de nous cinq nous soyons les deux derniers à croire véritablement à un refuge. Je laisse mes doigts courir sur le bord du bateau et ainsi le temps passe jusqu'à ce que notre meneur s'écrit alors d'une voix rauque :

- Terre !

Nos compagnons sont aux anges. John hurle de bonheur et ouvre grand les bras, où je viens me réfugier avec un grand sourire.

- On mourra pas ici Koda, on mourra pas ici !

- Continuez de ramer ! Ordonne Jaha.

C'est ce que nous faisons : Craig, l'un des nôtres, s'empare de la première rame tandis que John reprend la deuxième.

Sauf que cet instant d'espoir ne dure pas plus d'une minute.

- Qu'est-ce que c'est que ça ?

Le bateau tangue, nous avons heurté quelque chose. Les yeux écarquillés, John et moi échangeons un regard bref, suivit d'un rapide signe de tête.

- Koda, assis-toi au milieu.

Je m'exécute, cependant prête à agir. Quelque chose revient à la charge, secouant notre embarcation une seconde fois. La troisième fois, ce fût trop rapide pour que je comprenne quoi que ce soit.

- Craig !

La rame de Craig vient me cogner la tête, puis tout n'est que du noir.


 ̄ ̄ ̄ ̄ ̄ ̄ ̄

C'est une nouvelle secousse qui me tire de mon inconscience. Je me relève d'un bon, un mal de tête insupportable.

- Qu'est-ce qui se passe ? Je m'écrie, alerte.

- Nous accostons, Koda. Tout va bien.

Je soupire de soulagement et hoche la tête, reprenant mes esprits. Il fait toujours nuit noire, je ne dois pas être restée inconsciente trop longtemps. Je porte mes doigts à mon front. Je grimace de douleur : mes doigts sont tachés de sang. Cette rame m'aura bien amochée, pour un bout de bois.

- Terre promise mon cul !

John est couché sur le sable, tenant fermement son bras droit ensanglanté.

- Bordel John, montre-moi ça !

Je me précipite à ses côtés malgré le violent vertige qui me prend à l'instant où je descend du bateau. Il me laisse voir la plaie : il perd beaucoup de sang, il faut faire vite. Je me tourne vers Jaha, qui est littéralement hypnotisé par le drône qui flotte toujours au-dessus de nos têtes.

- On doit lui trouver de l'aide ! J'insiste, tentant de le sortir de sa transe.

- C'est rien, allez-y. Suivez ce truc, j'me débrouillerais.

- On va revenir te chercher John, tient le coup.

Je l'embrasse une dernière fois et me lance sur les talons de Jaha, qui nous a déjà quittés.


 ̄ ̄ ̄ ̄ ̄ ̄


Le soleil était déjà levé lorsque nous avions trouvés le manoir blanc. Jaha y est entré sans hésitation, confiant. Moi, je suis restée un instant immobile. J'étais épuisée. Debout devant la grande maison, j'hésite à y entrer. Qui sait ce que je vais y trouver ? Ne serait-il pas plus sage que je retourne auprès de John tant que je le peux encore ?

Vous savez quoi ? Je suis entrée. Je crois bien que les choses ont encore plus dégénérées à partir de là. Là se tenait face à notre ex-chancelier une femme en robe rouge élégante, un air hautain et supérieur sur le visage. Je reste silencieuse et les observe encore un moment. Je ne sais pas si je suis terrifiée ou rassurée, je suis tellement fatiguée que lorsque Jaha passe une main en travers de la femme, cela ne me surprend même pas.

- Kodaline ? Vient donc nous rejoindre.

La voix de la jeune femme - ou peut importe ce qu'elle est - me tire de mes pensées. Je sursaute légèrement puis m'avance sans même me dire qu'il ne fallait pas que je m'approche.

- Nous aurons besoin de toi également. Poursuit-elle de la même voix douce.

- Pour... pourquoi faire ?

- Pour la Cité des Lumières, bien entendu. Tu seras notre arme secrète.

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Je sais, c'est court. Mais c'est la fin de la première partie de ce tome 2, la suite va sortir très bientôt.

(2) PARADISE | j. murphyDonde viven las historias. Descúbrelo ahora