XIII

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Lundi 31 décembre.

Je suis allongé sur mon lit, contemplant le plafond au-dessus de moi comme j'en ai régulièrement pris l'habitude ces derniers temps. Je ressasse dans ma tête les souvenirs de la veille. C'est bien plus qu'un simple respect mutuel qu'il y a maintenant entre nous, je ne peux plus en douter. Ces regards doux à mon égard, sa façon de dire mon nom, ses gestes affectueux envers moi... Je sais bien que nous sommes censés faire semblant, mais tout ça fait-il vraiment partie du jeu ? Est-il vraiment si bon acteur ? Je ne remets aucunement ses talents en doute, mais seulement, certains indices me portent à croire que tout ça n'est plus tout à fait un jeu.

Et comme toujours, je vais me prendre la réalité en pleine figure à l'instant où les vacances seront terminées et que nous reprendrons notre train quotidien. Bien joué Noah.

Mon téléphone vient me déranger dans ma contemplation et me sort de mon univers parallèle. Je me retourne, manque tomber de mon lit, et finis par attraper l'appareil posé, pour une raison que j'ignore, par terre. Je me replace sur mon lit et déverrouille mon téléphone. Message de Chris.

« J'ai hâte que tu arrives ! »

Timide sourire sur mon visage. J'ai beau me dire que tout ça ne mènera à rien, je n'arrive pas à me détacher de mes espoirs. Espoirs que Chris ne fait que renforcer un peu plus chaque jour. En fait, il les alimente telle une génératrice un soir de panne en les faisant briller de mille feux ; il me fait sentir vivant.

Je me lève, vais prendre une douche, me sèche, puis enfile une tenue convenable. J'avertis mes parents de ne pas m'attendre ce soir et ils me souhaitent une bonne soirée avec Chris et sa famille.

J'arrive chez Chris après quelques minutes. C'est avec difficulté que je réussis à trouver un endroit où me stationner, les bordures de rues étant déjà occupées par de nombreuses voitures, appartenant très certainement à des membres de la famille de Chris. À voir le nombre de véhicules, ils doivent être beaucoup là-dedans. Je reste quelques instants dans ma voiture, réalisant à peine ce qui est en train de se passer. Puis, je sors dans le froid hivernal, verrouille les portières de ma voiture et me dirige vers la maison. Je traverse la rue, grimpe les quelques marches de pierre menant à la porte et sonne. J'attends quelques secondes avant que la mère de Chris ne vienne m'ouvrir. Elle me salue gentiment. Je me demande soudain si Chris a parlé à ses parents de notre « relation » ou si ceux-ci croient toujours que je suis un ami. Dans tous les cas, la mère de Chris n'a pas l'air surprise de me voir. Au contraire, elle semblait même s'attendre à ma venue.

Elle me laisse entrer et m'aide à me débarrasser. Je remarque alors toutes les paires de souliers et de bottes sur le tapis de l'entrée. Chris a vraiment une grande famille.

La mère de Chris appelle celui-ci, que je vois apparaître finalement, sortant de la cuisine. Son sourire s'illumine alors qu'il s'approche de moi pour me serrer dans ses bras. Je le serre en retour alors que nous nous saluons. Je remarque au passage qu'il porte aux pieds les pantoufles que ma grand-mère lui a offertes lors du dîner de Noël. Cela me fait sourire. Il me traîne alors à la cuisine où il m'offre une flûte de champagne, que j'accepte volontiers. Après tout, c'est le jour de l'An ! Je repense toutefois à ma voiture qui attend dehors...

— Désolé, je ne peux pas, je conduis, indiquai-je à Chris en lui tendant la flûte qu'il vient de me donner.

Un sourire apparaît sur son visage et il me lance un regard alors qu'il en prépare d'autres pour les invités.

— Tu n'auras qu'à dormir ici, dit-il dans le plus grand des calmes, un sourire en coin.

Je le dévisage une seconde.

— Bah quoi ? Ce ne serait pas la première fois qu'on dort ensemble.

Il prend une gorgée de champagne alors qu'il termine sa phrase.

Je ne me résigne pas pour autant.

— Mais tu as un lit simple, alors que j'ai un lit double, argumentai-je, cherchant à découvrir le fond de sa pensée.

— Et ? demande-t-il avec un haussement d'épaules.

— Et on va être hyper collés, déclarai-je comme si c'était la plus grande des évidences.

Chris ne bronche pas.

— Et ? dit-il de nouveau.

Je n'ai plus d'argument. Je reste là, en face de lui, tentant de réprimer un sourire. Je ne peux pas le laisser gagner si facilement, si ? Si.

— C'est bon, tu as gagné, je reste à dormir, dis-je en levant les mains, signe que je me rends.

Un sourire naît sur ses lèvres, sourire qui vient se calquer sur les miennes.

Il passe un bras autour de mes épaules et m'entraîne vers le salon où la majorité des invités sont réunis.

— Viens, je vais te présenter, me glisse-t-il à l'oreille, me transmettant un léger frisson.

À ma grande surprise, et visiblement à celle des autres aussi, Chris me présente en tant que son petit-ami. Quelques-uns s'étouffent avec leur boisson, alors que d'autres écarquillent grand les yeux. Parfois les deux réactions à la fois. J'aurais voulu me faire tout petit aux côtés de Chris qui, malgré la situation ultra gênante, semblait parfaitement à l'aise de dévoiler à tout le monde son attirance supposée pour les mecs.

Des questions timides ou outrées fusent de partout. Si je croyais que ma famille était intense niveau questions, je n'avais encore rien vu. Même la fameuse question ignorante « alors qui est l'homme et qui est la femme dans votre couple ? » est posée. À celle-ci, j'écarquille les yeux, souris gentiment au cher oncle, et retourne à la cuisine, m'éloignant de Chris qui me rejoint quelques minutes plus tard.

Il se pose à côté de moi, le long du comptoir, et me regarde alors que je fixe le sol sans vraiment le voir.

— Ta famille... Wow, dis-je après quelques secondes de silence.

Chris lâche doucement un petit rire à côté de moi.

— Je sais, désolé.

— T'inquiète, j'aurais dû m'y attendre.

— Pourquoi ?

Je me tourne vers lui, un sourcil relevé. Il m'indique d'un regard d'expliquer. Je me redresse et croise les bras sur ma poitrine.

— Tu es au top de l'hétérosexualité. Il était certain que de ramener un mec chez toi en guise de petit-ami allait faire des vagues.

— Au top de l'hétérosexualité hein ? répète Chris.

Je confirme de la tête.

Chris lâche un petit rire avant de s'en aller, me laissant seul dans le coin de la cuisine. Mais quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ? 

Faux Copain [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant