49. Tout ce que je n'ai pas pu te dire

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Toulouse, le 10 janvier 2020

Idriss.

Il y a quelques jours, j'ai eu une discussion avec Mathieu, fin PLK. Étonnant, je te l'accorde. Je pense que j'étais à bout, tant mentalement que physiquement. C'était après notre discussion, le 31, après que j'ai lamentablement échoué ma tentative d'explication. J'étais sûrement au bout de mes ressources. Je crois que j'étais même au bout de tout. Alors j'ai parlé avec lui. Tu vas sûrement te demander pourquoi lui. C'était juste plus simple de raconter ça à quelqu'un qui n'en souffrirait pas.

Au moment où je t'écris, je suis dans le train. Je suis allée voir mes parents, et je leur ai tout dit. Je pensais que ça serait plus simple de commencer par eux. Je pensais qu'ils ne fondraient pas en larme ou qu'ils ne se mettraient pas à tout casser. Ils n'ont pas tout cassé, mais je crois que même malgré notre manque de communication ça les a un peu touché.

Si tu savais le nombre de fois où j'ai essayé de tout te raconter. Mais c'est toujours resté coincé dans mes entrailles. Je te jure que j'ai essayé. J'ai aussi essayé de le dire à Louna. Même à Deen. Et ça a toujours été un échec lamentable.

Mathieu m'a dit de l'écrire. Sur le coup j'ai trouvé ça con à en mourir, mais me voilà, assise dans ce train à essayé de mettre des mots sur ce que je n'arrive pas à sortir depuis des mois.

Si tu me voyais. J'crois que j'ai jamais eu l'air aussi minable.

Putain, merde, voilà que je recommence à m'écarter du sujet. Ok. Je vais me lancer. Je ne sais pas quand tu liras cette lettre, je sais pas encore si je vais la déposer dans ta boîte au lettre, si je vais la laisser dépérir sur un coin de mon bureau ou si j'aurai le courage de te la donner en main propre. La deuxième option est la plus probable. Mais je crois que si je fais je vais encore plus me haïr. Et je me déteste déjà pas mal.

Je verrai.

Tout a commencé en février 2018. J'étais à l'école. Je me souviens très bien de cette journée, parce que j'avais prévu d'appeler mes parents. Je voulais renouer les liens, leur dire un truc à la con du genre qu'on était une famille quoi qu'il se passe. Je crois que j'avais juste envie d'avoir de vrai parents. J'avais passé la journée à me répéter un discours que je leur aurai balancé au téléphone. J'étais restée tellement concentrée sur ce que j'allais pouvoir leur dire que je m'étais mise en retard. A cette époque je bossais dans une petite supérette. Alors en sortant de l'école je m'étais tapé un sprint digne de ce nom, vraiment du gros sprint. Et là ça a été le drame.

Je me souviens plus vraiment de ce qui c'est passé, mais je me suis sentie mal, vraiment mal. J'avais l'impression qu'un truc était entrain de m'écraser la poitrine. Je pouvais plus respirer. J'avais la tête qui tournait. Et j'ai perdu connaissance. Je me suis salement explosé le crâne par terre. Bon ça je te le raconte mais je m'en souviens pas. C'est ma collègue qui me l'a raconté.

Quand je me suis réveillée j'étais à l'hôpital. J'ai passé pas mal de temps à attendre, j'ai vu défiler pas mal de médecins et d'infirmières. On m'a parlé de pas mal de truc, de syncope, de crise cardiaque, d'insuffisance cardiaque. Puis ils m'ont fait passé une électrocardiographie.

Je suis atteinte du syndrome de Wolff-Parkinson-White où tout simplement WPW. Parce que ouais ça écorche un peu la bouche à dire. Je suis pas docteur, et je crois que j'ai encore du mal à tout comprendre alors je vais faire au plus simple. Il s'agit d'un type de tachycardie particulière dite supra ventriculaire paroxystique, en gros, ça signifie que les crises de tachycardie peuvent être très fortes et atteindre plus de 200 battements cardiaques par minute. Ce syndrome est du à la présence d'une voie supplémentaire d'excitation cardiaque appelée faisceau de Kent. Cette voie est responsable de la pré-excitation cardiaque et de l'emballement de la fréquence cardiaque. Les docteurs ne savent pas vraiment pourquoi j'ai ce truc, c'est probablement du à certains gènes.

Dans l'œil du cyclone - FramalWhere stories live. Discover now