№21 : Voler des fraises à Monsieur Jacques

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~ Mackenzie ~

M. Jacques était probablement le pire voisin que l'on puisse avoir. A cette époque où Ernie et Mackenzie étaient encore deux enfants qui jouaient dans la rue, il les chassait déjà à coup de balais. Il ne disait jamais bonjour mais passait presque tout son temps devant sa maison, uniquement pour vous regarder de haut lorsque vous passiez dans la rue. Il n'y avait pas homme plus désagréable et acariâtre que M. Jacques. C'était un vieux bonhomme aigri, râleur et irrespectueux. Autant dire que si on pouvait l'éviter, on le faisait avec grand plaisir.

Aujourd'hui particulièrement, il ne fallait pas que Serena et Mackenzie se fassent prendre.

— Mais qu'est-ce qu'ils foutent ? s'écria presque Serena.

Mackenzie la fit taire en la tirant vers elle. Cachées derrière la clôture qui séparait son jardin de celui de M. Jacques, elles attendaient qu'Ernie et Nathan s'occupent de la diversion pour pouvoir se glisser discrètement dans le jardin du voisin.

Ça faisait des années que Mackenzie gardait cette idée dans un petit coin de la tête. Enfant déjà, elle rêvait de pouvoir goûter aux fruits rouges qui poussaient dans le jardin d'à côté. Ces fraises étaient la fierté de M. Jacques. Il en prenait soin comme de sa propre vie et veillait toujours à ce que rien, jamais, ne puisse atteindre ses fruits sacrés. Réussir à lui en dérober ne serait-ce qu'une tiendrait du miracle. Et pourtant, voilà qu'ils s'apprêtaient à le voler.

Le cœur de Mackenzie tambourinait dans sa poitrine. C'était mal mais c'était mérité. M. Jacques avait cafté plusieurs fois à leurs parents ce qu'ils faisaient dehors, sans compter toutes les fois où il l'avait terrifiée lorsqu'elle était enfant. Et bien sûr, ça l'avait toujours beaucoup amusé de les effrayer. Aujourd'hui Mackenzie tenait sa petite vengeance, celle dont elle avait rêvé une bonne partie de sa vie. Aujourd'hui, la grande fille qu'elle était devenue rendrait la Mackenzie du passé bien fière et c'était une pensée très réconfortante.

— La ferme Serena, si tu cries comme ça on va se faire griller en deux secondes !

Cette dernière leva les yeux au ciel mais elle se baissa, restant dissimulée à côté de Mackenzie. Elle lui sourit, même si la jolie rousse gardait une expression agacée. Elle détestait par-dessus tout qu'on lui donne des ordres et Mackenzie le savait, mais dans ce genre de situations, il n'y avait pas que les sentiments de Serena qui entraient en jeu.

Ils étaient tous dans un état un peu particulier ce jour-là. La joie débordait d'eux en cascades et ils ne tenaient plus en place. C'est sûrement ce qui les avait décidés à agir aujourd'hui. Ce vœu-là de la liste avait toujours été catalogué au second rang. Et c'était un peu normal, en même temps. C'était un vieux rêve de gosse que Mackenzie avait juste noté parce qu'elle voulait faire quelque chose qui pourrait lui permettre de se sentir mieux à nouveau. Voler les fraises de M. Jacques aurait été sa façon de retrouver la joie de vivre qu'elle avait à ce moment-là de sa vie, quand tout était plus simple et que son seul soucis était le méchant voisin.

Sauf qu'aujourd'hui, ça représentait totalement autre chose. Elle était entrée dans l'âge adulte quelques mois auparavant, même si elle ne s'estimait toujours pas faire partie des grands, et elle était plus heureuse que jamais. Malgré les hauts et les bas, elle n'avait jamais été aussi bien. Tout était presque parfait. Surtout aujourd'hui.

Serena soupira, ramenant Mackenzie à la réalité.

— Et dire qu'il y a une heure on était encore au lycée.

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