Prologue

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Je gare la voiture au bout de l'allée et en sors.
Il fait beau et doux. Une journée idéale. Par un temps pareil, ils devraient être dans le jardin à pique-niquer. Mais le jardin est vide de cris, de rires, d'exclamations enjouées.
Je presse le pas, arrive sous le porche de la maison. Je ne prends pas la peine de toquer; la porte est ouverte. J'entre. Je sors mes griffes, par précaution. J'écoute attentivement, m'arrête un instant; un seul battement de coeur.

« Louise? j'appelle. Laura ? Tom? »

Pas de réponse. Je continue d'avancer silencieusement, sur mes gardes.

« Nathaniel? Clint? » je tente presque désespérément.

Toujours rien. Je monte à l'étage; personne. Les enfants ne sont pas dans leurs chambres. La chambre parentale est également vide. Personne dans la salle de bain. Je retourne au rez-de-chaussée. Mon pied bute contre quelque chose. Les constructions Lego de Nathaniel. Je souris, puis perds ce sourire aussitôt. Ils ne seraient jamais partis en laissant les jouets du plus jeune de la fratrie par terre.
Je perçois un sifflement familier, presque imperceptible, derrière moi, à ma gauche. C'est celui d'un couteau que l'on sort de son fourreau. Je fais volte-face, bouscule mon adversaire, les crocs dehors. Je suis prêt à lui trancher la gorge, quand je reconnais mon agresseur.

« Alexandre! s'exclame mon pseudo ennemi.

_Clint! je m'écrie en rétractant mes crocs. C'est comme ça qu'on accueille ses amis ?

_C'est comme ça qu'on entre chez les gens ? » réplique l'archer.

Je me relève, l'aide également à se remettre sur ses deux appuis. Il range son couteau, toujours aux aguets.
Quelque chose à savoir sur Clint Barton: il ne porte jamais d'armes chez lui. Il n'en a pas besoin pour battre quelqu'un. Alors le voir sur la défensive ne me rassure pas. Je ne laisse néanmoins rien paraître.

« Où sont les enfants ? je le questionne avec empressement. Et Laura ? Où sont-ils tous ? Dis-moi que ce qui s'est passé à New York s'est seulement passé à New York. Dis-moi qu'ils ne sont pas tous partis en poussière. »

Je sais qu'il me dira la vérité. Je sais également que je me voile la face. Ça ne s'est pas passé qu'à New York. Le visage de l'archer se ferme, confirmant mes craintes.

« Il est arrivé sur Terre, et il a réussi, » dit-il simplement.

Je ressens toutes ses émotions; colère, tristesse et haine immenses.
Il me regarde enfin. Ses yeux gris auparavant si sûrs d'eux sont désormais troublés par les larmes.

« Il a réussi Alex, murmure presque Clint, il nous a battu. Et je n'étais même pas là pour les aider. »

J'aimerais à ce moment là faire quelque chose. Je crois qu'on appelle ça réconforter quelqu'un. Mais je ne sais pas quoi faire. Je n'y arrive pas. Je ne ressens pas les choses comme il les ressent. Comme ils les ressentent tous.

« Explique toi ! Où sont-ils? je me répète, agacé. C'est impossible ! On ne peut pas disparaître comme ça ! Où est ma soeur? Et cet abruti de Maximoff ? Et Peter?

_Ils sont morts ! finit par crier Clint. Tu comprends ça ? Ce connard de Thanos a réussi à réunir les pierres, il a claqué les doigts, et maintenant, ils sont tous morts ! »

Un silence plane. Normalement, Louise aurait crié son fameux "un euro dans la boîte à gros mots", même si ce n'est plus de son âge de faire ça. Je sens que l'archer y pense aussi.
Il se laisse glisser le long du mur, secoué de sanglots. Il vient de perdre sa famille entière, et plusieurs de ses amis je suppose. Je suis incapable de ressentir, d'avoir de la peine pour lui, et pour moi même, et ça me blesse profondément. Je viens de perdre ma soeur, mon meilleur ami, ou du moins ce qui me servait de meilleur ami, mon quasi beau frère, ma tutrice, une bonne partie de mes proches, en somme. Et je ne ressens rien. À part une chose: de la haine. Envers cette chose. Ce Thanos. Je ne sais ressentir que ça, de la haine, et la joie de tuer. C'est ainsi. Je suis La Bête.

Je m'assois à côté de Clint. Assez proche pour qu'il sente mon soutien, pas assez pour le toucher. Je suis parfaitement immobile, insensible, contrairement à lui.

« Qu'est ce qu'on fait maintenant ? je demande en fixant le mur d'en face.

_J'en sais rien Alexandre, me répond Clint entre deux hoquets, j'en sais rien."

Nous fixons tout deux le mur, comme si c'était ça notre avenir. Un mur contre lequel on ne peut avancer. Dans un geste délibéré et complètement fou, je pose ma main sur son genou. Ses émotions me heurtent de plein fouet. Je laisse ses émotions me submerger. Je me sens mal, je tremble, des larmes m'échappent, je ressens. Tristesse, colère, peur, et haine, haine, haine...
Je retire ma main, essuie d'un geste brutal mes joues humides. C'est donc ça qu'ils ressentent ?
Habituellement, je ressens ce qu'ils ont sans que ça me touche. Mais là, c'est différent. Ça m'affecte. Peut être à cause de Clint, peut être à cause du contact physique, même minime.
Ce qui est sûr, ce que je suis encore plus en colère. Et que rien ne pourra m'arrêter.
Je dois venger Jim. Et les autres.
Tous les autres.

« Je sais ce qu'on va faire, je déclare, captant l'attention de l'archer. On va buter ce connard de Thanos, et on va les venger. Laura, Louise, Nathaniel, Tom, Jim, Peter, Pietro, May. On va le buter pour eux. »

Il me regarde attentivement. Il n'y a plus aucune once de larmes dans ses yeux. Ils brillent d'une nouvelle lueur, que je connais parfaitement: la lueur de la vengeance. Je le sais, car les miens sont identiques.
Il me tend la main, je la serre, concluant le pacte silencieux.

Thanos, prépare toi, La Bête est de retour.

Thanos, prépare toi, La Bête est de retour

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Revenge {Alex Jones Chaikovski}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant