Cœur d'homme, âme de soldat 4 : L'homme enragé.

Épilogue

Amélia.
Je ne suis pas nerveuse. Absolument pas.
D'ailleurs, ce n'est pas moi qui, à force de le tripoter, ai arraché les poils du cou de mon chien adoré, Putride. Il me colle depuis le début des préparatifs, grondant régulièrement contre la coiffeuse, la maquilleuse (ma sœur), la couturière (ma mère), mon reflet dans la glace, bref... je suis sûre que c'est lui qui est stressé de se marier. Heu non. De m'épouser. Flûte, mon cerveau a buggé alors que dans quelques minutes, c'est moi qui vais m'unir à son maître !

Dès que les filles sont arrivées pour me donner un coup de main, j'ai muselé Dents-de-sabre, mais au point où j'en suis, je crois que c'est moi qu'il faudrait menotter. Et m'attacher avec une laisse pour éviter que je ne prenne mes jambes à mon cou.
Pourtant, je suis sûre de mon coup cette fois. Celui-là je l'ai, je l'aime, je le garde. L'homme je veux dire ! Bon la bestiole aussi ceci dit. Yann c'est un peu la version zen de Darth Maul ; crâne rasé, tatoué, sexy, létal, mais contrairement au personnage de fiction, c'est un homme qui vous maintient par sa seule présence du bon côté de la Force. Je suis fière de devenir son épouse et d'être celle qu'il a choisie.

Notre union a été reportée de plusieurs mois à cause d'une désignation de dernière minute pour partir au Mali. Savoir qu'après ces six mois il veut toujours de moi est un soulagement sans nom. On ne peut jamais être sûr de rien en amour.
Mais aujourd'hui je refuse d'être un pantin manipulé par des craintes irrationnelles. De toute façon, et même si mon amoureux croit que je n'ai rien remarqué, je sais déjà que je ne quitterai pas la mairie sans avoir la bague au doigt. J'ai bien vu l'entraînement qu'il faisait subir à notre chien. Je suis comme la balle de tennis avec laquelle il a entraîné ADN-de-caniche. Si je me lance, il me rattrape au vol.

Notre présence sur la place de la mairie ne passe pas inaperçue. Les hommes sont quasiment tous en tenue de cérémonie militaire, alors que les dames d'un certain âge ont sorti les chapeaux. Le soleil est à son zénith, on annonce un temps radieux pour ce mariage que nous avons voulu le plus simple possible. Entre les proches, quelques collègues et la famille, les convives n'excèdent pas la trentaine de personnes. Une joyeuse union à échelle humaine où même les fichus cabots sont admis !

Les conjoints de mes amies viennent les rejoindre et leur offrent le bras pour entrer dans le bâtiment. Mon regard se porte sur Claire et son macho torride. Pas de doute, ils sont magnifiques ensemble et l'amour qu'ils partagent balaye tout sur son passage. Plus tôt dans la matinée, elle m'a avoué avoir demandé la main de son homme et décidé de les faire partir en opex dans des pays différents. J'ai ri et applaudi. Oui, le pire est derrière eux désormais.
Emma nous a fait marrer, comme à son habitude. Il n'y a qu'elle pour nous offrir des instants « cata-morue » comme confondre Franck avec son fiancé en s'accrochant à son bras comme une naufragée. Lâchée en liberté sans ses carreaux, une myope peut se révéler très dangereuse. À sa décharge, les deux hommes pourraient être jumeaux tant leur ressemblance est grande. Et en TDF, c'est encore plus compliqué de les différencier. Mickaël a ironisé en proposant à Franck de la partager durant les vacances et un week-end sur deux. Le fard qu'elle a piqué valait la photo. Alix, la fiancée officielle de Franck a évidemment capturé ce sublime moment de solitude en ricanant !

Sandrine me prend dans ses bras pour la dixième fois en me faisant mille recommandations, avant de monter le majestueux escalier de l'hôtel de ville avec Truc, son mari, à qui je montre les dents. Joffrey me renvoie la politesse en me faisant discrètement un doigt d'honneur. L'amour fou habituel.

Ma sœur me souffle un encouragement du genre « si tu n'y vas pas, je prends ta place ». Il va vraiment falloir qu'on discute de son couple elle et moi. Papa me montre ses pouces en signe d'encouragement et Maman écrase une larme. Je vois les petits rouages dans son crâne qui s'activent déjà en prévision des petits-enfants que je suis censée lui laisser en pâture.