Un espoir déçus (ou deux)

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Le vendredi soir n'arriva pas assez vite au gout d'Aziraphale. A 17h, la Bentley était garée devant, et il s'y précipita.

Prenant le visage du conducteur entre ses mains, il l'embrassa en essayant de ne pas paraître trop ardent.

"Oh... bonjour mon ange. Je t'ai manqué on dirait?
-Tais-toi et roule, je veux être chez nous au plus vite."

A mi-chemin de Tadfield, Crowley évoqua la visite d'Anathème. Il l'avait déjà oublié.

"Elle m'a laissé une photo... Faut que tu voies ça!" Il fouilla dans la poche de sa veste pour retrouver le bout de papier.

"C'est pas possible! C'est une échographie?
-Oui, elle est venu avec ça l'autre jour. C'est pour le mois d'août apparemment."

Souriant de tout son être, l'ange pris les images pour les observer de près.

"C'est merveilleux!
-Ils m'ont demandé d'être parrain." Crowley préféra regarder ailleurs que dans les yeux émus d'Aziraphale. "Madame Tracy sera marraine, apparemment.
-Tu dois être si heureux, tu as toujours adoré les enfants."

Crowley se retint de dire qu'Anathème avait espéré que le parrain serait Aziraphale, mais qu'il était si peu présent à Tadfield qu'elle avait fini par choisir une autre option.

"Et toi, mon ange, n'aimerais-tu pas un jour avoir un enfant à toi?"

Sentant sa machoire tomber, Aziraphale se ressaisi rapidement.

"Oh, Crowley, si nous adoptions... l'enfant humain grandirait et mourrait un jour. Je ne suis pas sûr de vouloir vivre ça." Il réfléchit un instant. "Je n'arrive même pas à savoir comment je gèrerais lorsque Warlock, Adam et les Eux..."

Evitant d'achever sa phrase pour ne pas transmettre trop de tristesse à son amour, il changea de conversation.

"Et si, en rentrant, on trinquait à la santé du futur bébé, plutôt?"

Tentant de dissimuler sa déception, Crowley hocha la tête pour approuver.

Ils débouchèrent une bouteille en arrivant. Au bout de quelques verres (et bouteilles), les esprits s'embrouillent toujours et les confidences se font plus étranges.

"Dis, je me sens tout seul, ici...
-Quoi?
-J'en ai marre de ne pas te voir de la semaine. Revendons le cottage, je reviens avec toi à Londres.
-Certainement pas! J'aime notre maison."

C'était vrai. Aziraphale aurait adoré y rester à chaque instant.

"Tu as peur de t'ennuyer ici, si tu ne travailles pas? Tu veux une occupation? Reparlons de ce bébé dont j'ai envie. Nous nous en occuperions tous les deux...
-Tu en as... envie? Mais... alors il faudrait trouver autre chose que l'adoption."

Crowley le dévisagea sans comprendre. Puis, un éclair se lucidité le traversa, et il rougit violemment.

"Mais... c'est impossible voyons, tu sais bien."

L'expression blessée d'Aziraphale le plongea dans des abîmes de perplexité.

"Je sais, Crowley.
-Je... n'en parlons plus. Ma proposition était idiote." La réponse si froide de son ange l'avait fait dégriser.

Il faudrait absolument qu'il laisse fermer la deuxième chambre tout le weekend. Ou inventer quelque chose, qu'il avait préparé ça pour le bébé d'Anathème et Newt.

Mais le mieux était qu'Aziraphale ne voit rien. Lui même n'avait plus envie de regarder le joli berceau qu'il avait acheté pour peupler la chambre d'un espoir un peu fou.

"Et si nous allions nous coucher, mon Ange?
-Attends! tu m'as promis du cidre!
-Quoi? Pas avant deux ans, mon coeur. Il faut le temps d'avoir une récolte, puis..."

Mais les lèvres d'Aziraphale lui coupèrent la parole.

"Je ne parle pas de ça, très cher..." l'entendit-il murmurer contre ses lèvres. Il regarda l'ange le déshabiller de manière désordonnée, s'attaquant brusquement à sa braguette tout comme sa tête plongeait dans cette direction...

"Aziraphale! Stop! Dégrises-toi, tout de suite!"

Il serra fermement sa main autour du bras de l'autre, pour être bien sûr que sa demande avait été comprise.

"Aziraphale!"

Peu à peu, les yeux de son compagnon se firent plus clairs, plus lucides.

"... Crowley? Oh, pour l'amour de... quelqu'un...
-Ça va, t'inquiète, tu étais un peu pompette, haha...
-J'ai... j'ai... Pardon! Je m'excuse!" Et il éclata en sanglot.

"... L'angelot? qu'est-ce qui se passe?"

Mais il ne répondit pas, bien qu'il finit par maitriser ses larmes, se plongeant dans un mutisme profond.

Le démon alla finalement se coucher, s'attendant à ce que l'autre le rejoigne. Ce qu'il ne fit pas, et il se réveilla seul au matin.

C'est avec soulagement qu'il constata que son ange était toujours dans le cottage. Dans la cuisine, plus précisément.

"... 'jour.
-Bonjour, très cher.
-... 'va?
-Parfaitement bien, et toi?"

Crowley voulait crier quelque chose du genre "Non, ça ne va pas, tu me laisses seul pendant des jours et quand tu rentres, tu ne dors pas avec moi et tu agis bizarrement, c'est quoi le **** de problème, ***** ?" mais tout ce qu'il parvint à dire, c'est "Mouai."

Il se servit un café fort. Vraiment fort.

"Je me demande si je ne vais pas rentrer à Londres lundi. Cela vaudra sans doute mieux pour tous les deux."

La tasse et son contenu s'écrasa sur le sol la cuisine, accompagné d'un chapelet d'injures plus ordurières les unes que les autres.

"Crowley!
-EN QUOI? je te demande..." Il tendit la main devant lui, juste pour intimer le silence à l'autre. "En quoi ce que ce sera mieux pour nous deux?
-Cela ne va pas, tu vois bien? Je ne cesse de te blesser, et je ne peux pas me contrôler.
-Qu'est-ce que c'est que ces conneries?"

Aziraphale quitta aussitôt la pièce. Il n'avait pas défait ses bagages, et il les repris aussitôt. Pris de remord, il revint à la cuisine, nettoyant la porcelaine brisée en un claquement de doigt.

"J'y vais. Je t'aime, Crowley, mais je suis incapable de te rendre heureux."

Sonné, le démon ne réagit pas au baiser qu'il posa sur sa joue. Incapable de dire quoi que ce soit, il vit la porte d'entrée se refermer et son ange disparaître.

"Aziraphale..."

Seul le silence de la campagne lui répondit.

"Aziraphale! Ou tu vas?"

Tombant à genoux, il réalisa qu'Aziraphale était partit. Pour de bon.

Dans le bus pour Londres, Aziraphale contempla l'étendue des dégats que ses pulsions incontrolables avaient provoquées. Il avait brisé son bonheur.

😇🐍

Haïssez-moi si fort...

I want it allWhere stories live. Discover now