L'arbre au reflet troublant

Chapitre 6

Ce matin-là, il s'était préparé pour la voir. Les cheveux bien peignés, son logis bien rangé et son apparence soignée, il n'avait pas lésiné sur ses efforts pour quelle lui sourie enfin. Il s'était levé aux aurores et s'était empressé de tout faire dans le bon ordre pour ne rien oublié. Pour que tout soit prêt lors de son arrivé. Lorsqu'il eut fini, il sortit dehors sur le pas de sa porte pour fumer une cigarette. Il aimait le son que produisait l'allumette lorsque celle-ci se consumait au contact d'une grosse pierre qu'il gardait juste devant son entrée. Aujourd'hui le ciel était bleu mais il faisait encore très frais. L'humidité matinale indiquait qu'il avait dû pleuvoir durant la nuit. Le soleil commençait doucement à prendre sa place dans le ciel, mais il était encore trop tôt dans l'année pour espérer se réchauffer grâce à ses rayons. Il poussa une grande expiration et observa la fumée s'élever dans le ciel. On n'entendait presque rien, peut-être quelques merles au loin mais il n'en n'était même pas sûr. Tout était très calme, comme si la nature dormait encore. Il appréciait beaucoup ces moments-là. Cela lui donnait l'impression pendant un cours instant qu'il était seul au monde, et donc par conséquent qu'il en était le roi. Personne pour lui dire quoi faire, personne pour venir rompre son repos éternel, personne pour venir perturber ses pensées. Il s'avança pour observer le chemin qui passait non loin de sa maison et qui menait au village. Bientôt, comme tous les dimanches matin, elle passerait avec sa famille, bien habillée et souriante, et alors il pourrait l'observer et conserver cette image jusqu'au dimanche suivant. Un jour, elle lui avait même sourie. Il s'en souvenait comme si c'était hier. Mais c'était la seule fois, et depuis il espérait que cela se reproduise à nouveau. Souvent en passant devant chez lui, elle regardait au sol ou de l'autre côté de la rue. Mais il inventait toujours quelque chose, un bruit ou une parole pour que le visage de sa belle se tourne en face de lui. Alors dans ces rares moments il pouvait se plonger dans son magnifique regard. Et dans ces moments-là, la Terre s'arrêtait de tourner et il restait figé pour ne pas interrompre ce merveilleux instant. Elle était la seule qui lui provoquait cet effet-là. Elle était la seule qu'il trouvait plus belle que ses chères fleurs qu'il aimait pourtant tellement. Elle était la seule qui possédait des yeux verts aussi perçants et doux à la fois.