BORN TO LIVE

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Matchbox Twenty - Parade ♫

Si le passé est un prologue, le scénario peut-il être modifié ? C'est la question que je me suis toujours posé. Les gens ne pouvaient-ils donc pas être immortels comme les souvenirs ? Pourquoi se souvient-on toujours plus de la douleur que de la joie ? C'est d'un égoïsme pur de la part de la vie. Ne serait-il pas possible d'oublier tous ses regrets et de n'avancer qu'avec nos ambitions ? Si on espère toujours plus, est-ce que les choses finissent par arriver ? C'est ce que j'ai cru. Puis, j'ai grandi. J'ai mûri. Et j'ai compris. La vie est faite pour nous mettre des bâtons dans les roues. Nous mettre à l'épreuve. Nous faire tomber pour voir si on est capable d'avancer. Il ne faut pas avoir peur de la vie. C'est un démon. Il faut l'affronter, au contraire. Il faut lui montrer qu'on est plus forte qu'elle et qu'on réussira à réaliser nos rêves peu importe le mal qu'elle se donnera pour nous détruire. Bien sûr, la nuit est toujours longue avant que ne vienne le jour mais, il ne faut pas abandonner. Il faut continuer d'avancer, de croire en soi. Il faut continuer d'avancer, de croire en ses rêves. Se focaliser sur ce que l'on veut pour ne pas perdre de vue notre objectif. Vous savez, j'ai essayé moi aussi. J'ai cru que la vie serait clémente avec moi. Que je serai toujours heureux et que mes rêves se réaliseraient.

Puis, j'ai eu seize ans. Et les choses ont commencé à changer. On me parlait de choisir un avenir alors que je ne pensais qu'à sortir avec mes amis et à savoir si le beau gosse du lycée pouvait craquer pour moi, le garçon timide que personne ne voyait. On me demandait de choisir mon avenir alors que je n'avais aucune idée de ce qu'il me plaisait.

Puis, j'ai eu dix-huit ans. Et les choses ont encore plus changé. On me disait que je n'avais plus le temps. Que je devais étudier. Que je devais trouver un travail. On me parlait de droit et de médecine mais je ne rêvais que de musique. On me disait d'étudier mais je fuyais pour rejoindre mes amis dans le garage de Sasha pour faire de la musique. Installé derrière mon clavier, j'étais convaincu que je finirai par changer le monde.

Puis, j'ai eu vingt ans. Et les choses se sont corsées. On me disait que je ne devais plus perdre de temps avec des choses aussi inutile que la musique. On me disait que je devais trouver un stage. Que mes études se finiraient bientôt et qu'il fallait que j'aie mon diplôme. Mais moi, je ne pensais qu'à ces nuits où je m'évadais dans les bras de Sasha. À ces nuits où il me faisait découvrir des nouveaux univers. À ces nuits où on prenait sa moto pour qu'il m'emmène le plus loin de Seattle afin qu'on passe la nuit uniquement tous les deux à oublier le monde qui tournait à plein régime.

J'avais vingt ans mais je pensais seulement à l'aimer. Lui et personne d'autre. Me réveiller chaque jour à ses côtés me faisait sourire et le voir chanter pendant nos répétitions étaient mon bonheur quotidien. Mais mes parents n'étaient pas d'accord. On me disait que l'amour, ce n'était pas ça. Que je devais trouver un travail. Que notre amour était sale et qu'il m'abandonnerait un jour. Mais moi, je leur disais que ça, c'était ma vie. Qu'ils avaient fait la leur comme ils le voulaient et que je vivrais la mienne.

Puis, j'ai eu vingt-cinq ans. Ça faisait cinq ans que je n'avais pas vu mes parents. Un matin, j'étais parti avec Sasha, Lena et Shin. On voulait vivre de notre musique. Si Seattle ne nous aiderait pas, alors on irait à Los Angeles. On y croyait. J'avais Sasha. Shin avait Lena. On était heureux tous les quatre. On était intrépides, rien ne pouvait nous arrêter. On s'aimait. On était ensemble. Rien ne pourrait nous séparer.

Puis, j'ai eu vingt-sept ans. Notre premier album cartonnait dans les bacs et on enchainait les concerts. Des petites salles jusqu'aux plus grandes. De Los Angeles à New York. De Chicago à Miami. Le pays vivait au rythme de nos morceaux. On avait une renommée que l'on n'aurait jamais soupçonnée. La gloire nous tendait les bras et on l'embrassait à en perdre haleine.

Puis, j'ai une vingt-neuf ans. Neuf ans sans parler à mes parents. Neuf ans sans avoir de leurs nouvelles. Je ne comprenais pas. J'avais toujours était un bon fils alors pourquoi le fait que j'aime Sasha avait-il pu changer autant les choses ? Pourquoi le fait que j'aime un homme devait détruire les liens du sang ? Je n'avais jamais compris pourquoi les choses n'avaient pas pu être différentes.

Puis, j'ai eu trente-et-un ans. On venait à Seattle pour un concert pour la troisième fois. Sept albums sortis en cinq ans. Notre musique enflammée les ondes alors qu'on parlait de nos vies sur internet. Tout le monde et n'importe qui savaient pour Sasha et moi. On nous jugeait ou nous encourageait. On nous insultait ou nous aimait. Je ne comprenais pas pourquoi mais Sasha me protégeait. Il savait que mes parents me manquaient et que tout ça me touchait encore plus. Je voulais les voir mais je savais qu'ils m'auraient claqué la porte au nez. Je savais que je n'existais plus pour eux.

Puis, j'ai eu trente-trois ans. Notre musique ralentissait. On voulait se poser. La flamme s'atténuait et on avait emménagé tous les quatre dans un grand duplex en plein centre de New York. Malgré la jeune enfant de deux ans de nos amis qui courait dans l'appartement, on savait qu'on ne voulait pas vivre séparément. Puis, notre propre enfant a fini par nous rejoindre. Notre Lynn si chère à notre cœur que nous avions pu adopter. Nous étions si heureux tous les six.

Puis, j'ai eu trente-cinq ans. Nous menions tous les quatre nos vies ensemble. Sasha travaillait comme professeur de musique alors que Lena et Shin avaient ouvert un café. Et moi, je continuais de composer des morceaux pour de jeunes artistes en devenir. Mais je finissais toujours par regarder par la fenêtre en me demandant ce qu'étaient devenus mes parents. Je ne comprenais toujours pas pourquoi ils avaient ainsi eu honte de moi. L'amour n'est-il pas la plus belle chose que l'on est censé trouver sur Terre ?

Puis, j'ai eu trente-huit ans. Et un matin, au réveil, j'ai reçu un appel de ma mère. Mon père venait de décéder. Il avait eu un cancer dont je n'avais jamais eu vent. Et sans jamais n'avoir pu le revoir de mon vivant, je devais me faire à l'idée que jamais plus je ne l'entendrais me parler.

Puis, j'ai eu trente-huit ans et j'ai réalisé que la vie m'avait bien eu. J'avais cru pouvoir la contrarier mais ça m'était revenu en pleine face. J'avais cru que je pourrai vivre comme je le souhaitais mais rien n'avait fonctionné. J'avais mon mari. J'avais ma fille. J'avais ma famille. Mais j'aurais voulu que mes parents fassent partie de ce bonheur.

Puis, j'ai eu trente-huit et j'ai compris que jamais plus, je ne pourrais convaincre mon père que j'étais heureux et que je vivais comme je l'entendais. Jamais plus je ne pourrais jouer au base-ball dans le jardin comme on le faisait quand j'avais huit ans. Plus jamais je ne pourrais le prendre dans mes bras et lui dire à quel point je l'aimais.

Puis, j'ai eu trente-huit et j'ai voulu remonter le temps. J'ai voulu revenir à mes vingt ans. J'ai voulu revenir à mes dix-huit ans. J'ai voulu revenir à cette époque où mon père était encore là. À cette époque où j'aurais pu lui expliquer ce que représentait la musique pour moi. À cette époque où j'aurais pu lui expliquer à quel point Sasha était important pour moi. À cette époque où ma vie était si simple à vivre.

Puis j'ai eu trente-huit ans. J'ai compris que le temps ne se remontait pas. Que j'avais fait mes choix et que regretter aujourd'hui ne servirait à rien. Que j'avais vécu ma vie comme je l'entendais. Que j'avais vécu heureux et que je devais continuer de l'être. Que je devais honorer la mémoire de mon père en continuant de vivre comme je l'entendais. Que c'était uniquement comme ça que je pourrai continuer de le respecter.

Puis, j'ai eu trente-huit ans. J'ai ouvert les yeux sur la vie et j'ai compris à quel point elle était courte et qu'il fallait profiter de chaque instant sans oublier de vivre. Que chaque chose était importante et qu'il fallait assumer nos choix. J'ai eu trente-huit ans et j'ai compris que ce qui faisait ce que nous étions, c'étaient nos choix et nos rêves. Renier l'un ou l'autre et vous vous perdrez. Vous êtes là pour vivre votre vie à fond alors, vivez là et ne regrettez rien.

Je m'appelle Nathanaël Sanders. J'ai trente-huit ans et je vous le dis, profitez de vos vies tant que vous le pouvez parce qu'elle vous échappera toujours trop vite. Ne regrettez aucun de vos choix et surtout, peu importe ce qu'il vous arrive, continuez d'avancer. Encore et encore. Ne vous arrêtez jamais pour regarder en arrière ou le passé finira par vous ensevelir. Continuez d'avancer pour sourire. Ouvrez les bras et accueillez la vie jusqu'à ce qu'elle vous abandonne. Chaque personne naît pour mourir. Alors, naissez pour vivre.

Sasha & NathanaëlTahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon