La famille Gruber

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Au début du mois d'avril 1922, les cadavres de six personnes furent retrouvés dans une petite ferme située à 70 kilomètres au nord de Munich, en Allemagne. Malgré les efforts de la police et le nombre de suspects interrogés, le coupable ne fut jamais identifié et nos jours encore les meurtres d'Hinterkaifeck restent toujours irrésolus. Son étrangeté et le soupçon de surnaturel qui l'entoure font de cette affaire un mystère troublant sur lequel se penchent encore de nombreux enquêteurs amateurs.

Perdue au milieu de la forêt bavaroise se trouvait une petite ferme qui abritait trois générations d'une même famille, les Gruber. Cette famille était composée d'Andreas, 63 ans, de sa femme Cäzilia, 72 ans, de leur fille cadette Viktoria, une veuve de 35 ans, et des deux enfants de cette dernière, Cäzilia 7 ans, et Josef 2 ans. S'ils vivaient dans un endroit isolé, les Gruber n'étaient pas coupés du monde pour autant car la ville de Kaifeck se trouvait à un kilomètre de là, d'où le nom de leur ferme, Hinterkaifeck, qui signifiait littéralement » Derrière Kaifeck « .

La famille était connue dans la région, mais pas forcément pour les meilleures raisons. S'ils étaient aisés, pour ne pas dire riches, les Gruber étaient également avares et pour économiser de l'argent souvent ils employaient des travailleurs itinérants ou des vagabonds sans même les déclarer. Andreas avait la réputation d'être un homme solitaire, antipathique, violent envers sa femme et ses enfants. De plus, une rumeur insinuait que le petit Josef était le fruit d'une relation incestueuse entre Viktoria et son propre père. Tous deux avaient d'ailleurs été jugés et condamnés pour cette même raison en mai 1915, après qu'une femme de chambre les ai surpris dans le foin. L'histoire de la naissance de Josef était sordide et confuse. En 1919 Andreas avait empêché le mariage de sa fille avec Lorenz Schlittenbauer, l'un de leurs voisins, puis en septembre, quand l'enfant était né, Lorenz avait refusé d'en assumer la paternité, affirmant qu'il était un enfant de l'inceste. Le père de Viktoria avait alors été arrêté par la police mais Lorenz avait retiré ses accusations, ce qui avait permis la libération d'Andreas, puis il les avait confirmées et démenties à plusieurs reprises, de telle sorte que jamais la lumière n'avait été faite. L'étrange famille vivait donc recluse, et seule Viktoria, qui possédait une très belle voix et chantait à la chorale de l'église, semblait échapper à l'hostilité générale.

Un jour d'automne, en 1921, la femme de chambre entassa nerveusement ses sacs près de l'escalier de la véranda. Elle était pressée de partir et ses yeux sombres reflétaient son malaise. Posant le dernier paquet, elle regarda fébrilement la forêt qui entourait la petite ferme et la brume glacée qui remontait des arbres lui arracha un frisson. » Je devrais y aller maintenant. Il commence à faire sombre, » fit-elle remarquer, le visage livide. Après avoir une nouvelle fois remercié M. et Mme Gruber, elle ramassa ses sacs et commença à marcher sur le chemin de terre.
Sachant combien elle était terrifiée, ils la regardèrent partir sans chercher à la retenir. La malheureuse pensait que la ferme était hantée et un peu plus tôt dans la journée elle leur avait déclaré qu'elle ne comptait pas y rester une nuit de plus. En fait, elle ne voulait jamais plus y revenir, même en pleine journée.
Elle prétendait avoir entendu des bruits de pas au grenier, de voix mystérieuses et d'inexplicables sons dans la maison mais M. et Mme Gruber avaient, quand à eux, un avis très différent sur la question: la pauvre femme était folle.

Vers le milieu du mois de mars 1922, une tempête de neige s'abattit durant la nuit et au petit matin Andreas sortit inspecter sa ferme. Il parcourait la propriété quand soudain il remarqua de profondes empreintes dans la neige fraiche, qui se dirigeaient vers l'arrière de la maison. Le vieil homme les suivit un moment, mais les traces s'arrêtaient à quelques mètres des bâtiments et brusquement nerveux, il revint sur ses pas. Constatant qu'elles s'éloignaient à travers champs, il remonta cette piste mais en arrivant à l'orée de la forêt qui entourait Hinterkaifeck, il s'aperçut qu'elles se perdaient dans les sous-bois obscurs et un frisson lui parcourut l'échine. Réalisant soudain que quelqu'un s'était peut-être introduit dans la ferme, il s'empressa de retourner chez lui et immédiatement il fouilla la maison, la grange et la remise à outils, sans succès. Alors perplexe il s'assit, et songeant à son ancienne bonne et à ses histoires de fantômes, il secoua la tête.

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