Chapitre LII

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J'étais abasourdie. Anéantie. Perdue. Désorientée. Mal. Terriblement mal. Je n'avais pas eu autant d'idées noires depuis longtemps, très longtemps. J'avais l'impression d 'être sur un iceberg et que chacun de mes pas faisait balance ce qui me provoquait des tournis. Et ce mal de crâne bordel, il était incurable. J'ai envie de vomir. Il faut que je vomisse. C'est comme si j'avais quelque chose coincée dans ma gorge qui m'empêchait de respirer correctement. J'étouffai c'était atroce. Je m'enfermai donc dans la salle de bain; à ce moment là Emma entra dans la chambre.

-Julie parles-moi je t'en supplie...

Je l'entendais s'affalait contre la porte de la salle de bain. Je distinguai sa respiration irrégulière, sa voix tremblante; elle semblait pleurer. Cependant je ne me ferai pas avoir, j'en ai plus qu'assez de boire ses paroles; de croire en tous ses mensonges. Je décidai donc de mettre mes écouteurs avec de la musique à fond, limite assourdissante. Je n'entendais plus rien: c'était moi seule contre mes idées sombres. Ma tête tournait dangereusement; je ne sentais plus mes jambes, si bien que je m'écroulai sur le sol. Presque machinalement je me fis vomir. Enfin j'essayai. Je n'avais pas manger depuis un moment donc seule de l'eau ne sortie de ma bouche mais je continuai. Encore et encore. Je me dégoûtai. Quel était mon problème ? Pourquoi n'étais-je jamais assez bien pour personne ? Ma copine, ma famille, mes amis... RIEN n'allait, absolument rien. C'était comme si une partie de moi finissait dans les WC, comme si souffrir me soulageait car je ne méritai que cela.

A cet instant précis une phrase de Prévert tirée de son recueil Paroles me vient en tête
"et j'ai mis ma main sur mon cœur
où remuaient
ensanglantés
les sept éclats de glace de ton rire étoilé."
Je trouve ses quelques vers adaptés à ma situation:
mon cœur est bien plus qu'endommagé, les éclats de glace sont pour moi une allégorie des espoirs perdus que je me suis fais; le rire de mon entourage, ce qui me permettait de ne pas décrocher. Enfin, jusqu'à aujourd'hui.

Je me redressai avec grande difficulté, m'aidant du meuble de lavabo, m'appuyant du peu de force qu'il me restait. J'ouvrai l'armoire à médicaments pour chercher un truc qui calmerait mon mal de crâne et de ventre: mauvaise idée. C'est également ici où se trouvait mes affaires de toilettes: notamment tout le bordel pour m'épiler... Je toisai donc mes lames de rasoirs, j'ai littéralement bugué; en une fraction de seconde des images de sang on parcouru mon esprit. Pas bien longtemps car je cédai vite à la tentation. Je n'avais plus fait ce genre de chose depuis... Bref je ne me souviens même plus tellement que cela remontait à loin.

Le sang ne tarda pas à dégouliner de mon bras. C'était particulièrement douloureux mais ça ne m'empêchai pas de continuer; étrangement cela me soulageait. Je n'avais aucune idée de si Emma était encore derrière la porte mais cela n'avait plus d'importance; les traits rougeâtres s'accumulèrent dangereusement. A quoi tout cela rimait ? Quelle idée j'ai eu de venir dans cet internat ? Je ne pouvais pas faire comme tout le monde non bien-sûr je ne suis jamais normale. Et Ambre mon dieu je l'avais envoyée bouler pour rien... Elle avait raison sur Emma. Fin du moins sur son côté manipulatrice; pour l'histoire du piratage de mon téléphone je ne sais pas quelque chose me dérange. Pourquoi Emma se serait cassée la tête pour m'éloigner de ma meilleure amie ? Genre ça aurait été compréhensible pour une histoire de jalousie, fin compréhensible mais totalement malsain; sauf que là elle se tape Fiona depuis je ne sais combien de temps donc ça veut dire qu'elle n'en avait absolument rien à faire de moi. Tu ne fais pas tout ça pour une personne qui t'indiffère. Et idem pour ce message à ma mère. Bordel mon frère ne m'avait toujours pas répondu je ne savais même pas ce que ce foutu SMS disait. Mais qui pourrait vouloir nuire à ma mère ? Quelqu'un qui tenait maladroitement à moi et qui voulait me venger de ce qu'elle m'a fait ? Encore une fois je ne vois pas ce que Emma fait dans cette histoire. Mais qui cela pouvait bien ê...

Oula.

Réfléchir à tout cela m'avait donnée d'autant plus mal à la tête,  je me sentais partir dans les vapes petit à petit.

Trou noir.

*

Wow mes paupières semblaient peser une tonne je n'arrivai pas à les ouvrir. Qu'est-ce-qui m'arrive ? J'entendais un bruit strident comme des roulettes glissant sur le sol ou quelque chose dans le même style. Et cette odeur infecte ? Mon dieu d'où pouvait bien venir cette puanteur ?

-Non les jeunes vous ne pouvez pas venir avec nous ! Restez dans la salle d'attente; reculez vous !

Les sons étaient sourd, j'avais un "biiiiiip" constant dans mes oreilles mais je distinguai des voix.

-Je vous en supplie faites quelque chose...

Là par exemple c'était sans aucun doute la voix rauque de Romain mais qui ressortait bizarrement aiguë.

-Romain viens, tu es entrain de les retarder là, ils font leur travail ils savent ce qu'ils doivent faire.

Morgane aussi était là...

J'ouvrai enfin les yeux. Je fus éblouies de lumière blanche. C'était un plafond rempli de néons blanc et éblouissant. Affolée je tentai de bouger ma tête pour voir ce qu'il y avait autour. Ma vision était bien trop flou pour voir les choses nettement mais je distinguai des silhouettes tout autour de moi; tout en blanc hormis leur masque bleu ciel. Ils n'avait pas l'allure d'anges. A ce moment je compris que j'étais aux urgences et que j'avais bien bien merdé, que c'était peut-être ma connerie de trop. Je ne sais pas ce qui était pire. Que j'allais peut-être mourir ici ou que ma famille n'est sûrement même pas au courant. Quand bien même le serait-elle, en aurait-elle quelque chose à faire ? Je refuse de mourir sans avoir eu le dernier mot de fin, ma famille garderait l'image d'une fille qui a poussé sa mère au suicide alors que je n'avais jamais rien fait; je voulais seulement avoir le droit d'aimer... Même si ce n'était pas la bonne personne je n'y pouvais rien; après tout c'était ça l'amour, on ne peut pas le contrôler et c'est pour cela qu'il était si désire et recherché après tout.

-Julie. Julie si tu m'entends tu vas décompter à partir de 10. Nous allons t'endormir; si tu as compris clignes 2 fois des yeux.

Je clignai donc.

3...2...1.

Plus la moindre once de lumière. Est-ce la fin d'un chapitre ou d'une vie ?

Aime-moi. [Réécriture]Where stories live. Discover now