Le paradis peut attendre

CHAPITRE VINGT

Les jours suivants passent à une vitesse phénoménale. Adam et ses valeurs douteuses sortent même de ma tête. Je dédie tout mon temps à la révision de mes partiels, prévus pour le jeudi et le vendredi de la semaine suivantes. Je travaille d'arrache-pied, aussi bien pour occuper mon cerveau que pour réussir mon année. Le jeudi, je n'ai pas l'occasion de voir Emmett. Lorsque je rentre de la fac, je m'atèle directement à mes révisions, qui durent jusqu'au beau milieu de la nuit. Le vendredi, je ne vais en cours que le matin, l'après-midi étant banalisé pour nos révisions. Cependant, j'ai la tête ailleurs. Dehors, le soleil brille, et je ne peux m'empêcher de me dire que j'aurais passé un bien meilleur moment en compagnie d'Emmett que seule dans ma chambre, le nez plongé dans mes notes de cours.

J'ai rangé dans un coin de ma tête toutes les choses le concernant. Je ne veux pas penser aux belles déclarations qu'il m'a fait, ces derniers jours, ni même aux zones d'ombres qui concernent sa famille et son couple. Pourtant, c'est plus fort que moi, mes pensées reviennent toujours à lui. Pourquoi reste-t-il avec Roxana ? Pourquoi s'entend-t-il si peu avec son frère ? Que signifie vraiment ce tatouage pour lui ? Tant de questions auxquelles je rêve de donner une réponse.

N'y tenant plus, je me fixe un objectif de cinq chapitres à réviser, après quoi je serais libre de lui envoyer un message. S'il n'y a que ça pour me motiver... Aux grands maux les grands remèdes. Cette méthode s'avère d'ailleurs bien plus efficace que je ne l'aurais pensé. Je surligne les passages qui me semblent importants, fais quelques recherches sur Internet pour compléter mon cours, je fais même des fiches récapitulatives de chaque chapitre pour mettre un peu d'ordre dans ma prise de note. Quand j'arrive enfin à la fin du cinquième chapitre, je m'empresse d'envoyer un SMS à Emmett, priant pour qu'il ne soit pas lui aussi plongé dans ses révisions.

On aurait pu profiter du beau temps ensemble...

La réponse arrive dans la minute.

Ne me tente pas, je suis capable de venir te kidnapper.

Ne me tente pas, je suis capable de venir de moi-même.

Essaie, pour voir.

L'adrénaline, qui m'est désormais si familière, parcourt mon corps. Je ne réfléchis pas plus et attrape mes clés de voiture sur mon bureau. J'enfile un t-shirt et un bas de jogging, chausse mes sneakers, et quitte la maison. Ce n'est pas dans mon genre d'agir sur un coup de tête, mais je prends à malin plaisir à le faire. Je roule toutes fenêtres baissées, savourant ces quelques heures de liberté que je m'offre, en très bonne compagnie. Dans mon sac, j'ai pris soin de prendre quelques manuels au cas où Emmett parviendrait à me motiver pour travailler, mais je n'y crois guère.

Je n'ai même pas besoin de le prévenir que je suis arrivée, je le trouve assis sur le bord du trottoir, un livre de cours à la main.

- Qu'est-ce que tu révises ? je demande en coupant le contact.

Il tourne la tête dans ma direction et se relève. Il porte ses Ray-Ban, comme chaque fois que le soleil pointe le bout de son nez. Lui aussi porte un bas de survêtement, gris, presque identique au moins.

- Droit constitutionnel. Chiant à mourir, déclare-t-il en s'accoudant à la fenêtre de la voiture, côté passager. Qu'est-ce qu'on fait ?

- C'est toi qui décides.

- Ben... J'ai vraiment à cœur de réussir mes partiels, mais j'ai aussi très envie de profiter de nos moments ensemble.

J'acquiesce d'un hochement de tête. Je suis heureuse que nous soyons sur la même longueur d'onde. À sa place, Adam m'aurait dit d'arrêter de m'assommer dans le travail. Il ne m'aurait jamais encouragé, et aurait encore moins travaillé avec moi.