- CHAPITRE CINQ - VERSION FINALE - T2 -

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- ALEX - 

M.

Ils me dévisagent tous comme si j'étais un monstre. Dans les couloirs, dans la classe, à la cafétéria, leurs murmures me suivent comme une traînée de poudre. Je leur ai donné de quoi allumer la mèche, tu me diras.

Maintenant, tout brûle.

Comme à l'intérieur de moi. J'ai mal à en crever.

La voix de ma mère retentit dans l'obscurité, mais je ne la trouve pas. Elle reste invisible, hors de portée. Comme d'habitude.

Et, comme d'habitude, une douleur bien pire que la mort aspire mon énergie.

— Maman !

Alex, je suis là.

— Où ? Où es-tu ?

Mes pas résonnent dans le noir, signe que je cours, mais je ne vois rien. Aveugle, perdu, je trébuche sans cesse. À bout de souffle, le torse laminé par des griffes invisibles, je m'écroule à genoux.

Appeler ma mère ne sert à rien. Sa voix s'éloigne.

Je me redresse en sursaut, peinant à respirer. La main immatérielle continue de se cramponner à mon torse, d'écraser mes os, mes poumons, mon cœur. La souffrance m'arrache des larmes et je grimace, crispé, quand mon dos retombe contre le matelas. Je passe les mains sur mon visage avec l'envie de vomir.

— Je suis désolé, m'entends-je murmurer. Je suis désolé, putain, je suis désolé...

La porte de ma chambre s'ouvre sur mon oncle Robert, complètement paniqué. Parfois, c'est Amaria qui vient me voir quand je suis réveillé par mes cauchemars, mais pas cette nuit. La lumière inonde la pièce. J'essuie mes joues d'un revers de main, je ravale la culpabilité qui pèse une tonne sur mon estomac et je me redresse.

— Alex, je t'ai entendu crier..., s'inquiète Rob.

— C'est bon, soufflé-je.

Peu à peu, la pression sur mes poumons se dissipe. L'air entre dans ma gorge, gonfle ma poitrine, repousse mes vertiges. Mon oncle attend que j'émerge, assis sur le lit.

— Tu étais pas obligé de venir, lui dis-je. Je gère.

Les mauvais rêves font partie intégrante de mon existence depuis la mort de ma mère...

— Ça va, mon grand ? insiste Rob. Tu veux parler ?

— Non.

Je m'en veux d'être un poids pour lui, pour ma tante. De bousiller leur vie avec mon angoisse permanente, mon humeur à chier.

— Je suis là pour toi, d'accord ? m'assure-t-il. À n'importe quelle heure du jour ou de la nuit.

— Pourquoi ? Bordel... Ce serait plus facile de m'envoyer en foyer, non ?

Mon oncle éclate de rire. Il a le visage doux, un regard plein de tendresse, un sourire qui donne envie de se confier à lui. Mais il n'est pas prêt à ce que je lui révèle ce qui me ronge. Dieu en personne ne l'est sans doute pas.

— Ne dis pas n'importe quoi, c'est normal de t'aider, proteste-t-il. Tu es notre neveu et... on n'a pas eu l'occasion d'apprendre à se connaître, ces dernières années. Je trouve ça dommage.

Moi aussi je trouve ça dommage de ne pas avoir rencontré Rob avant que je vienne habiter chez lui. Je me demande si les choses auraient été différentes si ma mère avait accepté l'aide financière que lui a proposée Amaria il y a quelques années, avant que leur dispute ne les sépare définitivement. Est-ce que je me serais enrôlé dans le gang de Crayson ? Est-ce que j'aurais souhaité intégrer les Styx Riders ? Est-ce que j'aurais rencontré Heden et Ash ?

S T Y X - R I D E R S II 🌀 La Violence d'Aphrodite - sous contrat d'éditionWhere stories live. Discover now