Chapitre 2

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POV Maxon

Je posai une main sur l'épaule de mon fils, silencieux, refoulant des larmes brulantes. Même si je ne pouvais parler, je voulais, par ce geste, tenter d'atténuer l'impact des paroles de sa sœur jumelle. Elle avait déballé ce qu'elle avait sur le cœur. Certes, elle avait manqué de tact et de diplomatie, mais au moins, elle avait vidé son sac. Elle avait cependant soulevé certains points qui méritaient en effet d'être éclaircis. Mais pas maintenant. Pas aujourd'hui. Je n'en avais pas la force.

- Laisse-lui le temps. Elle souffre tout autant que nous même si elle ne veut pas le montrer. rassurais-je mon fils.

- Mais elle a raison sur une chose n'est-ce pas, Papa ?

- Laquelle ? Demandais-je, doucement mais un peu angoissé. Je savais quelle question lui brulait les lèvres.

- En me mariant sans rien ne dire à personne et en partant si précipitamment, j'ai causé sa mort n'est-ce-pas ?

Même si mon cœur me criait que ce n'était pas de sa faute, la concomitance des évènements ne laissait planer presque aucun doute là-dessus. Les médecins eux-mêmes me l'avaient avoué à demi-mots. La surprise, la joie, la peine et le choc successifs avaient été de trop pour elle et son cœur déjà fragilisé par les récents évènements. Je baissais la tête, autant pour cacher les larmes qui perlaient aux coins de mes yeux qu'incapable de mentir à mon propre fils. Ses yeux reflétaient la même peine que je pouvais voir dans mon reflet et je savais que si je m'y plongeais, j'allais m'y noyer tout entier. Je savais que les minces barricades que j'avais réussies à ériger ne résisteraient pas à son examen. Ahren avait vraisemblablement hérité de la perspicacité et de la vivacité d'esprit de sa mère car il comprit à mon silence ce que je n'osais avouer. Les secondes s'éternisèrent dans un silence de plomb, et même si j'aurais aimé de tout mon être détromper ce jeune fils, fraîchement marié, mes lèvres restèrent désespérément closes. Je ne pouvais lui mentir. Devant moi, je vis avec tristesse et horreur son visage se décomposer petit à petit. Je tentais alors de le rassurer. Je crois que je tentais également de me rassurer moi-même.

- Elle avait beaucoup de travail en ce moment, c'était très stressant pour elle. Elle ne vous le montrait pas mais elle s'inquiétait aussi énormément pour vous et votre avenir. Tout cela faisait qu'elle ne se reposait pas beaucoup. Et son problème de cœur était héréditaire. Elle savait qu'elle ne pouvait lutter contre, alors elle vivait avec. Tu n'y es pour rien, mon chéri. Je te l'assure. C'est... C'est moi qui aurais dû faire plus attention à elle. C'était mon rôle.

Ma gorge se serra et ma voix se cassa sur ces derniers mots. Au contraire de quelques instants plus tôt, ce fut cette fois mon fils qui me réconforta. Camille finit par poser une main compatissante et ornée d'une alliance dorée sur l'épaule de son mari. J'allais avoir du mal à me faire à cette idée. Ahren, marié, prince consort de France. A seulement 18 ans.

- Ahren, ne te blâme pas pour la mort de ta mère. Tu n'aurais rien pu faire même en étant là.

Je relevais la tête, les yeux surement sûrement rouges après tant de larmes versées.

- Camille a raison. Cela serait arrivé tôt ou tard, avec ou sans ton mariage. Tu sais comment était ta mère... Elle aimait repousser les limites, et son corps n'échappait pas à la règle. Tu n'as rien à te reprocher.

- Il n'empêche que j'ai quand même ajouté un facteur de plus. Cette incertitude pèsera toujours, n'est-ce pas ?

Un silence pesant s'installa pendant quelques instants. Je pris une grande inspiration pour calmer les battements frénétique de mon cœur et affermir ma voix avant de déclarer :

- Ahren, écoute-moi bien. Tu es mon fils et jamais je ne pourrai t'en vouloir pour avoir voulu vivre ta vie avec la personne que tu aimes. Je sais très bien quel bonheur cela apporte, et quels sacrifices cela exige. Parfois, il s'agit de savoir ce que tu veux faire et non ce que tu dois faire.

Ahren éclata en sanglots. Je le pris dans mes bras, le berçant doucement comme quand il était petit et lui murmurait à l'oreille.

- Ne te tourmente pas trop avec les paroles de ta sœur. Elle est encore sous le choc. Cela fait beaucoup à gérer pour elle, en plus de sa Sélection. Elle est dépassée, même si elle tente de faire croire le contraire à tout le monde. Laisse-lui le temps de se calmer et elle viendra s'excuser. Et puis America, ta très chère mère, n'aurais jamais accepté que je t'en veuille. Je suis sûr qu'elle te souhaite le plus grand des bonheur de là où elle est, même si elle n'a pas pu te le dire directement. Elle n'est peut-être plus avec nous en personne mais elle restera à jamais dans nos cœurs.

Ahren pleura encore quelques instants. Je lui laissais le temps de reprendre contenance.

- La journée a dû être éprouvante pour vous. Entre le mariage, l'aller-retour et maintenant ça... Vous devriez vous reposer. Nous parlerons plus en détails demain, quand les esprits seront plus apaisés. Vos chambres sont restées en l'état si vous le voulez. Nous avons à peine eu le temps de...

- Je vous remercie, Votre Majesté. S'inclina Camille. Mais nous n'en occuperons qu'une seule.

Sa demande ne me surprit pas tant que cela. A vrai dire, je m'y attendais. Et j'étais si las que je ne voulais pas argumenter pour une chose aussi futile. Ces derniers temps, j'avais l'impression que plus rien n'avait d'importance.

- Comme vous le souhaitez. La chambre d'Ahren est la plus spacieuse, installez-vous donc dans celle-ci.

- Je te remercie Papa, mais comme l'a justement fait remarquer Eadlyn, je ne fais plus partie de cette famille. Je suis maintenant prince consort de France, et à ce titre je ne suis plus un sujet d'Illéa mais un sujet français. Je ne suis qu'un invité ici.

Je n'en pouvais plus ! Assez.

- Balivernes ! Tu es mon fils et aux dernières nouvelles, ton mariage n'a pas changé cet état de fait. Tu resteras toujours membre de cette famille, quoiqu'en dise ta sœur. Je suis encore le roi et le protocole peut bien être brisé pour une fois. Ta mère ne s'en privait pas au même âge. Souris-je nostalgiquement.

- Il y a eu assez de bouleversements comme ça ces derniers jours pour changer tes habitudes dans ta propre maison, Ahren. Sois raisonnable et accepte la proposition de ton père. Renchérit Camille.

Sans attendre la réponse de mon fils, je fis signe sèchement à un garde de monter les bagages dans la chambre et entraînai Ahren par les épaules, suivis de Camille, vers un des salons de réception. Un thé bien chaud ne nous ferait certainement pas de mal. Ou peut-être quelque chose de plus fort...

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Long May She Reign- La Sélection FanfictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant