6 - Jared

279 24 3
                                    

« Parfois, la vie t'impose des conditions telles que la seule échappatoire ne peut être qu'un geste radicale, un sacrifice extrême que je suis prêt à accepter. »

- Ivan Repila.


Où se trouve la limite ?

A partir de quand nos actes ne sont-ils plus tolérables, et ce même si on a de bonnes raisons ?

Soyons honnête, je ne suis pas parfait. Des erreurs, j'en ai fait tellement que je ne peux même plus les compter. Oui, je me suis trompé, des fois, il m'est arrivé de refuser d'écouter quand c'était pourtant nécessaire, je n'ai pas voulu parler quand il aurait fallu négocier, j'ai blessé involontairement -et parfois même tout à fait consciemment.

Non, clairement, je ne suis pas parfait.

Mais je ne me suis jamais considéré comme un monstre.

Jusqu'à aujourd'hui.

Car à présent, que suis-je en train de faire ?

Et le pire, par dessus-tout, c'est que j'ai beau savoir que c'est mal, je vais continuer, parce que je n'ai pas d'autre choix.

Alors, oui, je vais mettre ma conscience au placard et je vais aller sauver sa vie.

Parce qu'il parait évident que les âmes des autres ont plus de valeurs que la mienne.

Assis en face de la jeune Zola, sur son lit, si proche d'elle que je pouvais sentir son odeur partout autour de moi, je l'observai alors qu'elle regardait dans ma direction sans vraiment me voir.

Bien qu'elle paraissait relativement calme, je discernais, à travers ses discrets tremblements, une jeune fille terrifiée.

- Je ne vais pas te faire de mal, assurai-je pour la calmer vainement.

Elle poussa un soupir qui semblait en dire long.

- C'est difficile à croire quand quelqu'un rentre chez toi en pleine nuit, souligna-t-elle d'une petite voix.

Je ne répondis rien et me relevai pour lui laisser de l'espace, avant de me diriger vers son placard pour récupérer un bonnet et un manteau que je lui donnai.

- Habille toi, on va aller faire une balade, ordonnai-je en allant enfiler ma veste.

Elle resta stoïque et j'imaginai bien que les rouages de son cerveau devaient tourner à plein régime pour trouver une manière de m'échapper. Je me penchai donc, à nouveau, vers elle.

- Zola, si tu m'écoutes, tout se passera bien. Mais si tu cries, si tu essaies de te débattre ou d'appeler à l'aide, les choses pourraient se passer très différemment. Je peux être très gentil, mais je ne suis pas d'un naturel patient. Je souligne que je suis armé et pas toi. Est-ce qu'on s'est compris ?

J'étais persuadé qu'elle s'habillerait sans discuter à ma réplique, mais elle n'esquiva pas un geste, restant toujours immobile. Son courage n'aurait pas du me surprendre, c'était une Black après tout, elle avait dû suivre un entrainement approfondi.

- Qu'est-ce que tu me veux ?

- Aucun mal, répondis-je sèchement, Allons-y, je t'expliquerai en route. Mais si tu ne m'aides pas, je te ligoterai et je te jetterai dans une camionnette blanche. Alors, s'il te plait, ne m'oblige pas à être ce genre de kidnappeur. Je n'en ai pas envie, mais je le ferais si c'est nécessaire.

Elle finit pas attraper le bonnet et le manteau que je lui tendais et les enfilait prestement en se levant, tout en essayant de se tenir à une distance raisonnable de moi. Elle se figea , mais resta muette, quand je passai mon bras autour de sa taille, en partie pour la guider, en partie pour l'empêcher de partir.

InvisibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant