Chapitre 39 :

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Un froufroutement sur ma droite.

Un oiseau s'est envolé d'une branche et disparaît entre les arbres du parc. Je soulève une branche de pin pour passer dessous, jette un coup d'œil derrière moi et la tient pour Kaïcha et Laaja. Le soleil se lève à peine sur les murs de briques rouges de l'Atrium alors que nous traversons en silence le parc qui se réveille doucement.

Kaïcha et Laaja sont comme moi enveloppées de capes bleu sombre qui cachent chacune un sac à dos transportant le nécessaire pour monter aux sommets des montagnes. J'ai rendez-vous ce matin au Refuge pour chercher un ancien chemin empruntable qui part vers l'extérieur. Ce que les doubles-âmes ne savent pas, c'est que j'emmène deux invitées surprises avec moi... je vais briser deux de mes promesses envers eux d'un coup, mais je veux les avoir à mes côtés. Là-haut, nous auront besoin des yeux de Laaja et de la logique de Kaïcha. Je ne partirai pas sans eux et elles le savent.

Le silence ambiant est seulement brisé par les appels d'oiseaux d'arbres en arbres, qui se multiplient de plus en plus à mesure que le ciel s'éclaire des couleurs rosées du soleil. Malgré sa lumière, le fond du ciel reste gris et les nuages se rassemblent au-dessus des montagnes, ce qui veut dire qu'il fera sans doute sombre aujourd'hui, donc encore plus froid que d'habitude en haut.

Je balaye les sommets enneigés des yeux. Mais cela veut aussi dire que les neiges seront plus solides, cela devrait être plus facile pour marcher, d'autant plus que le vent a dû faire durcir encore la neige. Comme nous ne sommes pas encore sortis de l'hiver, je m'attends à ce qu'il y ait de la neige encore abondement vu l'altitude où nous allons, surtout qu'il n'a pas plu depuis un bon moment, la neige n'a pas pu fondre.

Nous avons toutes empilé les vêtements les plus chauds de nos habits de combat sur notre corps, mais chacune d'entre nous sait que cela reste dérisoire par rapport à ce qu'on devra affronter. Le seul moyen de garder notre température corporelle dans les sommets est de rester tout le temps en mouvement et au sec, ce qui implique de mettre une couche absorbante tout près du corps pour éponger la transpiration. A partir du moment où on se refroidit, il est difficile de se réchauffer. Pour le reste, il faudra simplement tenir. De toute façon, seuls les fous pensent pouvoir aller aux sommets l'hiver sans souffrir du froid.

Je me glisse dans un chemin discret que presque personne n'emprunte dans le parc. Des gouttes d'eau tombent des branches des arbres qui n'ont pas encore revêtu leur feuillage de printemps, apportant un peu d'humidité à l'air sec. Les feuilles mortes, vestiges de l'hiver, sont elles aussi mouillées au sol. Il a plu cette nuit à notre altitude et la terre est devenue une boue dans laquelle nos bottes s'enfoncent avec un bruit spongieux. Les caméras, équipées de capteurs auditifs, risquent plus facilement de nous repérer, mais je compte sur le vent qui s'est levé, notre discrétion et le bruit des bois pour les couvrir un minimum. C'est aussi à cause des caméras que nous évitons les chemins officiels plus déboisés. Ce matin, nous ne comptons pas passer par les postes de gardes pour sortir de l'Atrium.

L'excitation vrombit dans ma poitrine. Personne n'a jamais osé faire le mur auparavant, tout simplement parce qu'il n'y a avait aucun moyen d'y arriver. L'Atrium est entouré par un grand mur d'enceinte de deux mètres de hauteur auquel des caméras sont plantées tous les trois mètres. Des bouts de verre pilés sont même installés dessus, censé décourager les voleurs et cambrioleur. Tu parles, il n'y a rien à cambrioler chez nous à part des armes. De toute façon, personne n'oserait cambrioler une École de Combat.

Un bruit de fond, sur la droite et on s'immobilise. J'aperçois deux silhouettes s'approcher et on recule aussitôt derrière des buissons. Nous ne sommes pas censées être debout à cette heure - et habillées comme des fugitives. Je jette un coup d'œil à l'extérieur et reconnais la silhouette de M. Jamal, qui marche à côté de... Kallol ? Je fronce les sourcils. Quoi ? Qu'est-ce qu'il fout avec le directeur ? J'ai l'espoir soudain qu'il soit en train de lui parler de son « comportement », mais ils sont trop loin pour que je puisse entendre leur conversation et ils s'éloignent déjà. Je doute que mon espoir soit la réalité, néanmoins. Kallol est intouchable et même je ne suis même pas sûr que M. Jamal prendrait le risque de le voir partir maintenant qu'il a réussit le test. J'ai la tentation de les suivre et écouter ce qu'ils disent, mais je dois me concentrer sur un objectif précis aujourd'hui, et il n'inclue pas Kallol. Je grince des dents de frustration, mais me force à les quitter du regard.

La Guéparde Dorée - Double-âme [1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant