Chapitre 16 : Quincy Clark

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Année 2151

Quincy. Ils arrivent chez toi. Pars.

Je me souviens du bref moment où Dario m'a envoyé ces mots dans le crâne. J'ai tenté de le recontacter, sous la choc, mais il ne m'a pas répondu.

C'était tellement court, mais j'ai réussi à capter l'urgence dans son ton. La seule chose que je me demande en faisant mes valises, c'est pourquoi ils sont partis d'un coup, pourquoi Dario ou Everleigh ne m'ont-ils pas avertis qu'il se passait quelque chose ?

Je dirais Bethany et aux enfants qu'on allait faire une ballade. Ils ne doivent pas être au courant des raisons pour lesquelles on nous cherche.

Je passe la tête par la porte de la chambre d'Adrian, m'attendant à le voir s'apprêter à partir comme chaque matin à l'école, mais je ne le vois pas.

Je me rue dans la chambre de mon fils et soulève les draps de lit, craignant déjà le pire. Et le pire s'est réalisé.

Adrian a disparu, et ce n'est pas une fugue. Une vision d'horreur vient s'ajouter à ce moment. Bethany est allongée à terre, je me dépêche de vérifier qu'elle dort et son souffle délicat vient me rassurer.

Comment faire pour l'emmener avec nous ? Ava ne pourrait pas m'aider à la porter, elle est bien trop frêle. Mais je ne vais pas abandonner ma femme à l'Eden. Ils m'ont déjà pris mon fils...

Et Dario ne m'a rien dit, je suis sûr qu'il était au courant…

Ça a dû se passer cette nuit. Bethany a sûrement entendu du bruit et... Mais oui ! Bethany pourra m'expliquer ce qu'il s'est passé, et j'irai chercher Adrian. Sauf s'il est déjà à Abstractia. Dans ce cas-ci, je ne saurai pas faire grand chose.

Je vais de suite prévenir Ava de prendre le strict minimum et soulève Bethany et la porte jusqu'au hall d'entrée. Ava arrive quelques minutes plus tard, un sourire au lèvre qui s'efface dès qu'elle voit sa mère endormie.

Elle tente de me demander ce qu'il se passe, mais je la coupe en lui disant seulement qu'on doit partir le plus vite possible. Ma fille me regarde de ses grands yeux dorés, et me demande finalement d'un voix frêle :

« Et Adrian ? »

« Il est en sécurité, on le reverra après, ne t'inquiète pas. » Je lui dit tout en ouvrant la porte d'entrée et la poussant dehors. 

Je passe mon sac à dos sur mes épaules et me baisse pour porter Bethany, toujours endormie. Je ne prends pas la peine de fermer la porte, nous ne reviendrons sans doute jamais ici.

J'avais prévu une situation de ce genre et je sais où me diriger pour nous mettre en sécurité afin qu'on ne nous trouve pas.

Je prends Ava par la main et nous dirige vers la forêt juste en face de chez nous. J'essaie de courir, mais le poids de Bethany et Ava me tenant la main me ralentissent. Nous arrivons quand même jusqu'à la forêt sains et sauf et personne n'est encore apparu pour essayer de nous arrêter. Je tourne la tête et j'arrive à entendre le bruit des navettes se déplaçant jusqu'à chez nous à leur vitesse maximale.

Je lâche la main d'Ava et lui dit de courir devant moi jusqu'à arriver à une clairière.

Je les entends, ils sont juste derrière nous, à moins de cent mètres. Soudain, Ava trébuche sur une racine et tombe la tête la première sur le sol. Je me dépêche de poser Bethany à terre et d'aider Ava à se relever.

« Ça va aller, ça va aller... » Je lui chuchote, plus pour me rassurer moi qu'elle.

Je tire de toutes mes forces et Ava en fait de même mais son pied reste coincé et j'entends de plus en plus les pas des soldats qui nous cherchent. Je soulève la branche et elle arrive enfin à sortir son pied. Elle court vers la clairière comme je le lui avait dit et je m'apprête à reprendre Bethany quand je vois que ma fille se dirige droit sur une troupe de soldat qui arrive de face.

Je redépose ma femme et crie à Ava de revenir vers moi en courrant vers elle du plus vite que je peux. Je vois désormais clairement les soldats qui viennent droit sur elle et j'arrive à sa hauteur, la prend sur mon dos et me redirige vers Bethany. Ava me serre de toutes ses forces et je sens sa peur affluer en moi.

Je m'arrête d'un coup, sous le choc. J'ai à peine eu le temps de fermer les yeux que des gens habillés de bleu et d'argent encerclent ma femme et que d'autres se dirigent vers nous.

Je me résous à l'abandonner, regrettant amèrement de ne pas pouvoir crier sur Dario en lui rejetant la faute de ne pas nous avoir prévenus avant.

Je m'élance dans une direction où personne ne sera sur mon chemin et je dis à Ava de bien s'accrocher sur mon dos et de ne surtout pas tomber.

J'entends les soldats courir et crier après moi, mais je m'efforce de ne pas ralentir et de tenir bon jusqu'à les semer.

« Ava, tiens moi bien, si tu tombes on...  » m'exclamais-je en sentant ma fille desserrer ses bras de mon cou, petit à petit, et glisser tout en se rattrapant de justesse à ma veste.

Le soulagement était de courte durée. Un soldat nous rattrape et la tire vers lui. Elle tombe alors que je cours toujours, ne remarquant pas de suite qu'elle n'est plus là.

Je me retourne, la vois pleurer et m'appeler. Je vois aussi des soldats qui essaient de m'attraper, se rapprochant de plus en plus de moi.

Alors je cours. Je ne m'arrête pas. Je ne pense pas au fait que j'ai abandonné les deux seules personnes qu'il me restait de famille.

Le Test De L'Eden Où les histoires vivent. Découvrez maintenant