Aime-moi

Chapitre 5

PDV CAMDEN

Je franchis la porte du petit appartement dans lequel j'habite désormais. Il est moins grand que la baraque d'Isabelle et Christian, c'est certain, mais je m'y sens bien.

Lorsque je franchis le seuil, mon regard tombe instantanément sur Lou, encore concentrée sur ses cours.

Son regard dévie vers moi, elle m'adresse son fidèle sourire. J'enlève mes chaussures, ma veste, puis arrive vers elle, et l'enlace par-derrière, posant mes lèvres sur la fine peau de son cou.

Sa voix que je reconnaîtrais parmis mille, s'élève tendrement.

- Alors ta journée ?

Je souris.

- Habituelle, quatre ou cinq clients.

Elle enroule ses doigts dans mes cheveux.

- Je vois.

Je souris quand elle m'embrasse la joue.

- Et toi ?

Elle m'offre un regard, fière.

- Dernière ligne droite avant la finalisation et l'examen. Ensuite je pourrais commencer à chercher un emploi.

La voir ravie me rend tout aussi heureux qu'elle.

- Je suis certain que tu vas réussir.

Elle m'offre un doux sourire avant de m'embrasser.

Elle et moi avançons doucement dans notre relation. Il y a encore certaines choses qui ne fonctionnent pas parfaitement, mais jusqu'ici, nous avons réussi à passer au travers de tous ces problèmes rencontrés. La confiance n'est pas encore totalement acquise après cette fameuse soirée où elle m'a surpris avec cette fille. Bien évidemment, après cinq ans, elle a réussi à s'ouvrir un peu plus, mais parfois, je sais qu'elle doute encore un peu. Au fond, ça me broie de penser qu'elle puisse croire que je suis capable de recommencer.

Ces deux petits mots, je n'ai pas encore réussi à les dire clairement. J'essaie de lui montrer mon amour d'une toute autre façon. Et je crois qu'elle le comprend.

En bref, nous sommes un couple pas encore très stable, même cinq ans après rien n'assure notre futur. Elle est moi en sommes conscient. Après tout, j'ai vécu toute une vie à m'apitoyer sur mon sort, solitairement. Alors même après cinq années, voir l'avenir à deux, c'est encore une chose impensable pour moi.

Cependant, quand nous vivons au jour le jour, tout se passe vraiment bien. Pas de futur, ni de projets, simplement nous et l'instant présent. Mais ça n'empêche pas ces quelques fois où elle essaie d'aborder le sujet de l'avenir ces derniers temps. Ça me fout les jetons.

Lorsque nos lèvres se séparent, elle range ses cours puis s'avance dans la petite cuisine, ou elle commence à préparer le repas. Je l'aide quand elle m'indique ce que je dois faire.

Elle commence à couper un oignon, et lorsque ses yeux commencent à briller, je pouffe de rire. Elle se tourne vers moi, mais son air menaçant est vite remplacé par le ridicule, lorsqu'une larmes solitaire roule sur l'une de ses joues. C'est alors que je pars dans un fou rire.

- Laisse faire le chef.

Elle affiche un air exaspéré en me tendant le couteau. Je l'attrape et commence à découper finement le légume. Elle me regarde faire, attentivement. Son petit air malicieux me donne envie de la croquer entièrement.

Je lui jette un coup d'œil en coin et souris lorsque son regard entre en contact avec le mien. Dès qu'elle réalise qu'elle devient insistante, elle détourne son attention. J'arrête tous mes gestes et la surprends en plaçant mes mains sous ses fesses pour la déposer sur le comptoir.

Son regard brun me scrute, en alternant entre mes yeux et mes lèvres.

Depuis cinq ans, une chose est sûre, c'est que la passion est toujours aussi puissante entre nous.

Elle ne tarde pas plus longtemps avant de fondre sur mes lèvres. Je prolonge en faisant danser ma langue avec la sienne. Lorsque nos lèvres se détachent, elle m'évalue de son regard analysant.

- Qu'est-ce qu'il y a ?

Elle secoue la tête, comme pour me faire savoir que rien ne cloche, mais son regard est moins brillant et expressif que d'habitude.
Mes mains se posent délicatement sur ses hanches.

- Si. Dis-moi ce qu'il y a.

Elle fuit mon regard avant de se concentrer sur le sol.

- Où nous allons tous les deux ?

Je soupire en comprenant directement le sens de sa question.

Voilà qu'elle recommence à parler de quelque chose de sérieux.

- J'en sais rien Lou, on a dit qu'on y allait petit à petit.

Elle remonte ses iris noisette vers les miennes.

- Ça va faire cinq ans qu'on y va petit à petit.

Ma mâchoire se serre. Je m'écarte d'elle, tandis qu'elle descend du comptoir pour retourner à ses occupations.

C'est ce genre de froid que l'avenir est capable d'instaurer entre nous.

- Camden ?

Dos à moi en train de continuer à faire le repas, je la regarde.

- Um ?

Elle se retourne pour me faire face.

- Je veux quelque chose de sérieux.

Je fronce les sourcils, pas certain de comprendre.

- Parce que ça ne l'est pas ?

Elle hoche la tête.

- Si, mais à chaque fois que j'aborde l'avenir, c'est comme si tu te renfermais. Je n'aime pas ça.

Je fais mine d'être occupé à préparer à manger, moi aussi.

- Pourquoi aborder l'avenir quand on peut faire simple et vivre au jour le jour ?

Lou me regarde.

- Parce que j'aimerais pour une fois voir plus loin qu'un simple lendemain entre toi et moi.

J'arrête ce que je suis en train de faire et me tourne vers elle, les poings légèrement serrés.

- Ouais, mais moi, je ne veux pas.

Elle déglutit, je sais que je lui ai fait du mal.

- Je vois.

Elle enfourne la préparation, puis me laisse planté dans la cuisine, dans un silence de plomb, pour rejoindre notre chambre.

Bordel...