1. Dame Liberté (Amanda)

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Allez, je compte jusqu'à trois, et je frappe.

Tu peux le faire, Amanda. Un... deux...

La porte s'ouvre.

Hein  ?

En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, je me retrouve nez à nez avec cet insupportable personnage, aux allures de mannequin photoshopé, à la repartie cinglante et dont la beauté n'a d'égale que sa stupide arrogance.

J'ai nommé : le Parfait Connard  !

Cela aurait été tellement plus simple d'avoir affaire à ce bon vieux Marty, rondouillard et boiteux, ses cheveux tirés en une queue de cheval imperceptible et son début de calvitie qu'il tentait de masquer sous un chapeau de cow-boy usé. J'aurais même pu endurer son rythme de douches irrégulier, sa voix nasillarde et son haleine vineuse qu'il entretenait du matin au soir.

C'était prévu, avant qu'il ne dépasse les bornes, à plusieurs reprises, et que son ancienne assistante se décide à porter plainte pour harcèlement et à quitter l'entreprise. Bien trop soucieux de son image, le P.-D.G. de Kerry Styles l'a mis à la porte, et c'est à ce moment-là que j'ai intégré l'agence.

Que nous l'avons intégrée.

Cela fait déjà six mois que je tente de m'accommoder à son remplaçant, venu tout droit d'Angleterre, avec son foutu accent capable de faire fondre les petites culottes comme neige au soleil.

– Voilà presque trois minutes que je vous entends soupirer derrière cette porte. C'est terriblement agaçant.

Je reste plantée là, une montagne de dossiers emprisonnée entre ma poitrine et mon bras gauche, tandis que le droit, toujours en l'air, semble prêt à frapper sur une porte déjà ouverte.

– Quand vous aurez terminé de parfaire votre imitation de Lady Liberty(1), vous penserez à consulter vos mails, crache-t-il en dénouant sa cravate. Donnez-moi ça.

Il a exigé ces derniers mots, le doigt pointé sur le tas de feuilles auquel je m'agrippe depuis plusieurs minutes.

Réagis, bon sang  !

– En fait, j'avais prévu de...

Mes paroles heurtent son dos lorsqu'il tourne les talons pour rejoindre son bureau et choisit volontairement de m'ignorer. Toujours avec cette assurance qui dégouline par tous les pores de sa peau, il feuillette le dossier, sans doute à la recherche d'une petite virgule que j'aurais oubliée. J'exècre cet homme, mais je tente par tous les moyens de garder mon calme.

– Monsieur, nous sommes vendredi et il est plus de vingt heures. J'avais l'intention de rentrer chez moi.

Bien joué, Amanda. Ne te démonte pas.

Il s'immobilise, un rictus sarcastique au coin des lèvres, et plante son regard caramel dans le mien.

Pourquoi faut-il que mon corps y réagisse instantanément  ?

– J'attends toujours la copie du cahier des charges que vous deviez me remettre il y a deux jours. J'ai un rendez-vous demain après-midi avec le client et l'avenant au contrat n'a même pas été rédigé.

Je fronce les sourcils.

– Je n'ai pas eu connaissance de cette requête, monsieur.

– Eh bien, réplique-t-il aussitôt, elle est certainement dans un des mails que vous n'avez pas encore pris la peine de traiter.

Il me toise  ; je dois faire appel à toutes sortes de dieux et autres puissances célestes pour ne pas lui cracher au visage.

Respire.

Jamais avec mon Boss (Publié aux Éditions Addictives)Where stories live. Discover now