Chapitre 61

438 32 10
                                    

Jungkook

    La météo mitigée accompagne mélancoliquement la cérémonie des obsèques de Nahia et c'est une Lynn inconsolable qui assiste à l'enterrement de sa fille. Je ne sais même pas quoi lui dire pour la réconforter car pour la première fois, je ne comprends pas de quelle manière nous pouvons remplacer le trou que nous ressentons en nous. J'ai essayé de trouver les bons mots mais hormis : ça ira, rien n'est convaincant. C'est dans les bras de son père que ma femme tente de se requinquer. Mes mains sont enfoncées dans mes poches et j'essaie de ne pas imprégner chaque détail de ce jour parce que je ne veux pas m'en souvenir. Je ne veux pas me rappeler des larmes de Lynn, de l'impuissance d'Odalie et le mutisme de Guilhem.

" Je suis désolée. " Odalie prend la parole.

    Tout le monde nous l'a déjà dit mais je ne vois pas pourquoi ils s'excusent. Ce n'est pas de leur faute. Je préférerais qu'ils se taisent plutôt que de nous répéter cent fois la même chose. Nous sommes tous désolés, moi y compris pour ne pas avoir été là au moment où le drame s'est passé. Une part de moi culpabilise parce qu'à chaque fois je promets à Lynn de la protéger mais je ne suis jamais là lorsqu'elle en a vraiment besoin. Pourtant, je sais que je ne peux pas être constamment là et qu'à chaque fois que je manque à l'appel, il peut se passer quelque chose et malgré tout ce n'est pas de ma faute.

" Ça ira. " je le répète à Odalie.

    Elle croche son bras au mien mais je me contente de regarder l'endroit où mes deux enfants reposent. Je ne cesse de repenser à mes parents et je me souviens du jour de leur enterrement. Yang m'y avait emmené. Je me souviens de tous ces gens qui s'étaient excusés pour rien. L'excuse s'accorde quand la faute est pardonnable et réparable. La mort d'une personne est irrévocable alors les excuses et les lamentations, je n'y arrive pas. Je ne sais pas réconforter une personne et je ne sais pas non plus accepter la désolation des autres.

***

    Plus tard dans la soirée, Kalix est à la maison mais elle est restée dans sa chambre pour dessiner parce qu'elle n'aime pas voir des gens tristes. Odalie est avec sa fille et moi, j'ai préféré m'isoler dehors. Guilhem discutait avec Magdalena quand je suis sorti alors j'imagine qu'il le fait toujours.
    Assis sur le grand canapé, sous la pergola, je noie mon regard sur l'horizon du lac. J'ai besoin du calme et de la solitude pour être bien. Je n'aime pas être entouré et exposer ma tristesse aux autres revient à étaler ma faiblesse et je déteste ça. Je sais que ce soir, je me retrouverai seul dans mon lit avec Lynn et je mentirais si je disais que je ne redoutais pas ce moment. Lynn n'a pas arrêté de chercher un contact avec moi et je reconnais que je l'ai un peu évitée. Ce n'était pas contre elle mais nous sommes différents sur beaucoup de choses à commencer sur le fait d'encaisser un deuil. J'ai besoin d'être égoïste et de ne rester centrer que sur moi. Je ne veux pas sentir la tristesse des autres alors que la mienne m'étouffe déjà.

" Tu ne devrais pas rester seul, fiston. "

    Guilhem s'assoit à côté de moi et les attentions troublantes de mon beau-père depuis le décès de Nahia m'horripilent. J'ai l'impression d'être un verre suspendu au-dessus du vide et qu'on sent prêt à lâcher.

" Je sais comment tu te sens, Jungkook. De nombreuses fois, nous avons tenté d'avoir un enfant avec Odalie. Au début, ça ne prenait pas. Nous enchaînions les échecs puis un jour, nous pensions que c'était bon. Au final, c'était une grossesse nerveuse. Pendant près de cinq ans ce fût notre vie. La tristesse que je ressentais était insoutenable. Chaque respiration devenait plus douloureuse que la précédente et le temps me semblait de plus en plus cruel. "

LOVE ON LIE 6Where stories live. Discover now