Chapitre 40 - Recherche identitaire

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Malgré la violence avec laquelle la brune avait parlé, le blond ne répondit rien. Aussi, Cap enchaîna sur une question qui lui était parvenue quelques semaines plus tôt :

— Tu parles d'être toi-même, mais est-ce que c'est en portant les fringues de ton père que tu es vraiment toi ?

C'était un sujet avec lequel elle avait assez souvent flirté durant son enfance et son adolescence essentiellement.

Avec Ondine qui avait toujours voulu décider à sa place, Capucine s'était bien souvent demandé qui elle était vraiment. La fille que sa mère voulait qu'elle devienne ? La fille rebelle qui montrait une image opposée à celle demandée par Ondine ? Ou bien une toute autre fille, qu'elle n'avait pas su libérer ?

La question de l'identité était une question tellement importante dans la vie d'un individu. Tout se construisait autour de cette problématique.

— Mes vêtements me conviennent parfaitement.

Ce n'était pas ce qu'elle avait demandé et elle se doutait que Pierre le savait. Il essayait de contourner le sujet. Mais elle ne comptait pas le laisser faire.

— D'après ce que j'ai cru comprendre, ta mère aimait beaucoup ton père et...

Parce qu'elle vit les yeux de Pierre s'assombrir telle une mer orageuse, elle comprit qu'elle n'était pas complètement à côté de la plaque. C'était à la fois bon et mauvais. Car si elle avait vu juste, ils allaient avoir une conversation importante, mais elle allait aussi l'irriter. Et la dernière fois qu'elle l'avait vu dans cet état, c'était chez sa mère, lorsqu'il lui avait fait le faux coup du chantage qui avait parfaitement bien fonctionné sur elle.

— Tu sais, la construction de l'identité est super importante pour qu'une personne se sente accomplie. Et je me trompe peut-être mais, je me demande si tu sais vraiment qui tu es ou bien si tu penses que tu es véritablement toi en étant le fantôme de ton père.

Peu importait que l'homme ne semble pas ravi d'entendre le discours de Capucine, la jeune femme ne comptait pas se démonter.

Parce qu'elle réalisait désormais que cette histoire débile d'invention de compagnon et compagne lui avait permis de découvrir un Pierre plus intéressant qu'il ne paraissait. Et comme elle l'avait dit précédemment, ils étaient plus ou moins amis.

Et en tant qu'amie, elle ne comptait pas laisser cet homme se tromper plus longtemps (si toutefois elle n'avait pas tort sur toute la ligne). Après tout, les potes, c'était fait pour ça : pour passer de bons moments mais aussi pour faire ouvrir les yeux aux autres.

— Lorsque mon père est mort, j'étais gosse, commença Pierre.

Alors il souhaitait passer en mode psychologue et patient ?

— Je me souviens qu'elle pleurait tous les soirs lorsqu'elle rejoignait leur chambre. Les gens parlent de l'amour, de l'adolescence, de l'argent, de la famille, de la mort, du deuil, mais ils parlent rarement de ce que les personnes accompagnant un individu déprimé vivent. Durant des mois, c'est moi qui aie lavé ma mère. Je me préparais mon petit-déjeuner avant d'aller à l'école et quand je rentrais le soir, elle était toujours là, dans son canapé, le regard vide tourné vers le carrelage. En perdant mon père, j'ai aussi perdu ma mère. Je me suis retrouvé seul, du jour au lendemain. Alors le jour où elle a trouvé la force de me dire que je lui rappelais son mari...

Capucine commençait à comprendre où il voulait en venir malheureusement.

— Le jour où elle a souri en disant que je lui ressemblais, je me suis dit que je pouvais peut-être ramener de la lumière dans ses yeux.

Mission célibat (Terminée)Where stories live. Discover now