Chapitre 3

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C'est allongé sur le dos que j'émerge paisiblement quelques heures plus tard. A l'instant même où j'ouvre les yeux, je sais déjà que je vais me retrouver dans une chambre d'hôpital. Et maman étant cadre infirmière, j'imagine qu'elle ne doit pas être loin alors je fais en sorte de bouger le moins possible pour ne pas attirer l'attention. Alors sans bouger la tête, je me fie simplement à ma vision périphérique qui m'informe qu'une silhouette se trouve assise dans le siège juste à coté, feuilletant un livre ou un magasine. Ayant recueilli les information nécessaires, je referme les yeux comme si de rien n'était pour ne plus me concentrer que sur la régularité de ma respiration et ainsi faire discrètement le point sur la situation. Même si ma vessie n'est pas au bord de l'explosion, je sens qu'elle est suffisamment remplie pour m'assurer un bon gros accident. Je décide donc d'ouvrir les vannes comme j'ai souvent l'habitude de le faire en cachette et même si la présence de ma mère à deux mètres de moi menace de me bloquer, c'est pourtant sans le moindre problème que je parviens à me relâcher. Instantanément je sens l'urine bien chaude qui se répand sur mon bas ventre, qui dégouline entre mes cuisses et s'accumule sous mes fesses. C'est mon tout premier pipi au lit et j'ai bien du mal à ne pas pousser un long soupir de soulagement mêlé de bien être. Et sous les draps, le torrent n'en fini pas de s'écouler, m'apportant une satisfaction sans égale. Puis, une fois mon besoin enfin soulagé, je décide de rester dans un état léthargique encore quelques minutes, non pas que je veuille profiter de la situation mais surtout que j'ai besoin de réfléchir par rapport à la suite à envisager. Il me faut encore dix bonnes minutes pour parvenir à me décider et une fois totalement sûr de moi, je prends une profonde inspiration avant de me redresser d'un coup sec dans mon lit en poussant un cri de rage.
-''Abby!!!''
Sur ce coup là je n'ai pas été le seul à bondir car maman a sursauté brutalement dans son fauteuil, juste avant de se précipiter à mon chevet.
-''Elle va bien, ne t'en fais pas. Elle est restée au camping avec papa... Oh mon chéri, tu m'as fait si peur. Ne bouge pas, je vais aller chercher le médecin.''
-''Maman?'' Continuais je d'une voix plaintive.
-''Oui mon poussin?''
-''Je suis tout mouillé.''
Comme pour vérifier ce que je venais d'avancer, maman soulève la couverture pour découvrir l'étendue des dégâts.
-''Ce n'est pas grave...je vais demander à ce qu'on change tes draps. Est ce que tu peux te lever?''
-''Oui...je crois.''
-''Alors tu ferais mieux d'aller te passer un coup de gant de toilette dans la salle de bain. Fais juste attention à ne pas mouiller tes pansements.''
Après avoir refermé la porte derrière moi, plutôt que de me laver je me contente de me déshabiller et de me nouer une serviette autour de la taille, puis tout en laissant couler l'eau dans le lavabo, j'écoute discrètement ce qu'il se passe derrière la porte. Ce n'est que deux minutes plus tard que j'entends une voix masculine discuter de ma santé avec ma mère et j'en déduis du même coup qu'il s'agit du médecin. C'est le moment que je choisis pour passer à la phase numéro deux, quittant la salle de bain en prenant l'air le plus paniqué possible.
-''Maman!!! J'ai un problème!!!'' Hurlais je aux bords des larmes.
-''Qu'est ce qu'il se passe? Qu'est ce que tu as?''
-''Je...je sens plus quand je fais pipi...! J'étais en train...de me laver...et je me suis mis à...faire pipi...! J'ai vraiment rien senti venir...''
-''Docteur, vous pensez que c'est normal?'' Continue maman en se retournant vers l'intéressé, un homme d'une cinquantaine d'années portant une blouse blanche et un stéthoscope autour du cou. Sur sa poche on peut lire: «Docteur Legoff, Pédiatre». Pour distraire l'attention des enfants, il possède sur sa blouse plusieurs badges fantaisie accrochés au dessus de son nom, en l'occurrence un ours en peluche, une girafe et surtout une drôle de bestiole ressemblant fortement à mon ami le kappa. Cela ne peut pas être une simple coïncidence. Et donc, le pédiatre se décide à prendre la parole.
-''D'après les informations que l'on m'a communiqué, c'est une vipère péliade qui a attaqué votre fils. Cette espèce est potentiellement mortelle pour l'homme, c'est l'une des plus venimeuses d'Europe, et en plus elle l'a mordu à trois reprises, ce qui représente vraiment une dose massive de venin. Ce dernier a été neutralisé à temps mais les toxines qui le composent, c'est au corps humain de les éliminer et il le fait par les voies naturelles. Sauf que cette accumulation peut causer quelques dégâts sur son passage et ce n'est hélas pas la première fois que je suis confronté à ce genre de cas.''
-''Alors quoi? Qu'est ce qu'on peut faire?''
-''On va déjà lui faire passer une échographie pour vérifier qu'il n'existe aucun traumatisme. On va aussi devoir procéder à d'autres analyses pour n'écarter aucune piste.''
-''Et si votre théorie se confirme?''
-''Si c'est bel et bien une réaction due à choc toxique, dans le pire des cas il se peut que Jeff ne recouvre jamais l'usage intégral de sa vessie. Tout dépend si les nerfs ont été touchés ou non. Il se peut que ses intestins aient eux aussi accumulés une certaine dose de toxine. Mais ça c'est le pire des scénarios. Avec un peu de chance les dégâts ne sont que minimes et cette perte de contrôle n'est l'affaire que de quelques jours. En attendant, le mieux est encore de prévoir des protections pour éviter qu'il ne se mouille à nouveau.''
A ce moment là je vis une chose que jamais encore je n'avais vu de toute ma vie: j'ai vu ma mère au bord des larmes. Elle avait beau tout faire pour ne pas craquer, son regard était aussi humide que le pyjama que m'avait fourni l'hôpital.
-''Madame Toddler, je comprends tout à fait votre douleur mais n'oubliez pas la chance que vous avez eu d'être dans un camping disposant d'un anti venin. En temps normal, une seule de ces morsures peut terrasser un adulte en moins d'une demie heure ou un enfant en moins de dix minutes. On m'a dit qu'il avait protégé sa petite sœur et à coup sur il lui a sauvé la vie. Ils auraient bien pu mourir tous les deux, mais au lieu de ça vos deux enfants sont sains et saufs. Et si ça se trouve, ce problème urinaire n'est que temporaire.''
C'est à ce moment que je décide d'intervenir.
-''Il a raison maman, regarde moi, je vais bien. Et puis je vais pas me laisser gâcher mes vacances par un crétin de serpent. Maintenant est ce que tu peux appeler papa et Abby pour leur dire que je vais bien?''
-''Tu es sure que...que je peux te laisser seul?'' Répondit maman en reniflant au milieu de sa phrase.
-''Aucun souci.''

Au fond du puitsWhere stories live. Discover now