Chapitre 7

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Samedi 10 octobre

Pas de réponse. Évidemment...

Vicky tenta d'étouffer son amertume. Puisque Travis n'avait pas répondu, il estimait devoir le confronter de vive voix. Leur couple se trouvait certes en péril, mais ils devaient en discuter, s'expliquer sur leurs émotions. Et alors peut-être qu'après cet élan de communication vital, ils repartiraient du bon pied. Peut-être se sentirait-il à sa place.

Vicky longeait les grilles d'un parc qui venait tout juste d'ouvrir en cette matinée fraiche. Les feuilles mortes des peupliers jonchaient le trottoir, s'amoncelaient en une légère bouillie auprès des pneus des véhicules qui ne bougeaient guère.

Il dépassa une banque et, au coin de la rue, aperçut une jeune femme à l'aube d'une crise de nerfs. Les joues rouges de frustration, elle appuyait sans discontinuer sur les touches de son téléphone. Ses longs cheveux raides et roux balayaient la surface de son visage si bien que son profil demeurait caché.

Vicky la dépassa, et il continua sa route, les mains dans les poches, jusqu'à ce qu'un sanglot éclate. Il se figea puis se retourna. Honteuse, la jeune femme porta la main à sa bouche, et Vicky trouva ce geste bien triste.

Elle cherchait à s'empêcher de pleurer, de hurler sans doute, mais surtout, elle empêchait les mots de sortir.

Il s'approcha doucement, soutint le regard vert qui l'observait avec méfiance.

— Excusez-moi... Ça n'a pas l'air d'aller alors si je peux vous aider...

Elle secoua vivement la tête, replaçant une longue mèche derrière son oreille. Et tandis qu'elle rangeait le téléphone inutile dans son petit sac à main, Vicky prit le temps de se dire qu'elle était d'une beauté effroyable.

Pas une beauté douce. De celles qui rendait curieux, faisait se demander « comment est-ce possible ? ».

Malgré quelques cernes rouges, un léger maquillage tentait de cacher sa fatigue et sa tristesse. Et sa moue boudeuse n'enlevait rien aux rondeurs de son visage. Elle se tenait droite et fière malgré tout, presque aussi grande que lui, et Vicky devina qu'elle poursuivait sans doute une carrière de modèle.

Mais pas ici. Elle n'est pas du coin, c'est évident...

Elle levait la tête, déchiffrait quelques panneaux et noms de rue.

— Pardon d'insister, je comprends que vous n'ayez pas envie de discuter avec un inconnu, mais vous m'avez l'air perdue. Si ce n'est que ça, je peux peut-être vous aider. Je vous assure que je ne suis pas là pour vous ennuyer. Moi-même je suis pressé...

Le regard vif se planta enfin dans le sien. Vicky eut l'étrange sensation de l'avoir déjà vue quelque part. Il se garda bien de le signaler, certain que plus aucune femme dans ce monde ne souhaitait entendre cette phrase ringarde, même lorsqu'elle partait d'une intention vraie.

Il n'empêche que son visage me rappelle quelqu'un...

— Je dois rejoindre mon petit ami à une adresse, mais je ne suis pas d'ici, se décida-t-elle. Je ne connais pas les rues. Et j'ai oublié de recharger mon téléphone. Ce qui fait que je n'ai plus de batterie, donc pas de GPS.

Son visage se farda d'une expression de surprise quand Vicky lui sourit.

— Si ce n'est que ça...

Il sortit son Samsung et lui jeta un œil.

— Vous vous souvenez de la rue, du numéro ?

— Rue Gosselet.

Vicky s'apprêtait à taper sur les premières touches. Son pouce n'atteignit jamais l'écran.

Ultraviolet - (L&V) T.3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant