We Lost Our Summer

89 19 66
                                    

Ecrit par Atinyarmy11

"C'est une souffrance à peine supportable que celle qui naît du regret. Elle instaure entre soi et sa vie une distance, que rien ne pourra combler, car ce qui est fait est fait, et ce qui n'a pas été fait ne pourra plus l'être."

Laurence Devillairs, Guérir la vie par la philosophie.



*****

Un craquement sinistre réveilla les environs de cette forêt parfaitement silencieuse.

Un cri ténu et bref, mais symbolisant tout le désespoir de son propriétaire malchanceux, claqua dans l'air.

Une odeur de danger planait à présent pour le malheureux.

Un jeune homme aux cheveux gris sombrait dans cette immensité glaciale, obscure et limpide à la fois. Ce jeune homme n'était nul autre que moi-même, Kang Taehyun, vingt ans, des rêves plein la tête et l'avenir devant moi, du moins c'était ce que je croyais.

Je coulais toujours plus vers le bas sans rien pour retenir ma chute, mes membres engourdis  ressentaient la sensation horriblement douloureuse de millions de fines aiguilles acérées qui se plantaient dans ma chair à vif, me donnant envie de hurler mais ma respiration s'était coupée sous le choc thermique de cette étreinte mortelle.

Pourtant, cette souffrance m'anesthésiait peu à peu et, paradoxalement, je tombais sans me débattre ou esquisser le moindre mouvement ni contracter le moindre muscle pour tenter de remonter à la surface déchirée et fissurée par ma faute et mon imprudence.

Je la contemplais, moi immobile et les yeux entrouverts, elle prise entre les glaces, luisante et miroitante, créant des reflets dorés magnifiques grâce aux faibles rayons de soleil hivernaux qui se réverbéraient là, à un mètre au-dessus de mon corps paralysé, attiré par les abysses.

Comment en étais-je arrivé là ? Qu'avais-je fait pour mériter une telle fin ?

Ah... Je m'en souvenais clairement à présent, alors que le lac gelé m'engloutissait inexorablement et que les profondeurs me tendaient les bras, prêtes à recueillir mon dernier souffle, la dernière étincelle d'une vie trop courte.

Tout avait commencé au printemps dernier, au moment où la Nature reprenait ses droits en tant que puissance bienfaitrice pour ramener la Vie dans chaque être vivant qui peuplait sa surface et en insuffler une nouvelle source en rapprochant les corps soumis à leurs chaleurs et leurs instinct primitifs pendant la saison des amours pour les animaux ou en permettant la pollinisation pour les plantes.

Tout semblait orchestré avec un sens de la précision remarquable par le grand architecte de la Nature et c'est peut-être parce que j'avais contrarié ses plans en m'entichant de toi que j'étais ainsi voué à disparaître sans que personne ne le sache.

Si je ne t'avais pas rencontré ce printemps-là, je n'aurais peut-être pas regretté, j'aurais lutté pour ma survie par pur égoïsme et aussi par instinct évidemment mais je ne méritais pas de vivre, pas après t'avoir autant blessé par ma froideur.

Cette fin tombait plutôt à pic pour moi finalement, un linceul frigorifique pour un cœur d'iceberg comme tu m'appelais à ce moment-là, amusant n'est ce pas ?

Peut-être pas, à bien y réfléchir, mais je m'en fichais bien; j'étais aux portes des Enfers qui étaient bien différents de ceux que je pensais connaître.

Je fixai une dernière fois la surface encore scintillante et je revis ses yeux noirs en amandes encadrés par de longs cils ébènes; ces deux puits brillants de malice et d'autosatisfaction lorsqu'il arrivait à me faire une blague et dans lesquels j'aimais me plonger.

Corne d'Abondance - Source éternelle d'imagination [TOME 1]Where stories live. Discover now