Chapitre 19 : Confiance et confidences

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Tout tremblait, tout crépitait. Les flammes, les lames, les cris. Tout allait et venait, par flash dans une lumière aveuglante, comme des vagues. L'écume était un dentelle rouge dans cet océan de chaos. C'était une marée de sang.

Devant ce carnage, une femme se tenait, droite, stoïque dans les bourrasques de mort qui pulsaient dans le vent. Des cheveux blonds, un regard éveillé.

—Nolwenn !

Akélia se réveilla en sursaut. Une couverture de sueur sur la peau, la brise qui la caressait était glaciale. Elle se libéra de son cocon de couverture pour passer ses mains sur son visage. Si son imagination avait l'impression qu'elle était trempée de sang, elle fut heureuse de constater que ce n'était que la transpiration d'un cauchemar houleux qui l'enrobait.

Laïdan, debout près du feu, l'accueillit d'un sourire. Le reste du groupe dormait dans ses sacs de couchages. Akélia aperçut l'ombre d'Aymeric se retourner dans son duvet. L'alchimiste s'assit à côté du feu crépitant. Le cavalier la rejoignit.

—J'allais venir te réveiller pour la ronde, amorça-t-il à voix basse. Les autres viennent à peine de conclure leur plan pour demain.

—Qu'ont-ils décidé ? demanda Akélia en étouffant un bâillement.

Elle accepta volontiers la chope fumante que le jeune homme lui tendit.

—Adrien, Aymeric et Sillya partiront vers l'Ouest, comme prévu, nous devrons leur laisser une journée d'avance pour être sûr de les croiser sur le chemin menant au sommet des Vents Brisés. Il feront un détour et nous rejoindront en escaladant les falaises.

Akélia frissonna en pensant au danger que représentait une opération pareille. Laïdan soupira en prenant une gorgée de sa tisane. Le pli en ses sourcils marquait son mécontentement.

—Tu as peur pour Sillya ?

Il tourna son regard marroné vers la jeune femme qui humait les herbes trempant dans l'eau chaude. Un triste sourire orna ses lèvres. Il posa sa chope pour astiquer à l'aide de sa chemise un poignard déjà étincelant.

—Je ne cesserai jamais de m'inquiéter pour elle, glissa-t-il dans le silence de la caverne. Mais j'ai confiance en elle et en Adrien. Et puis, elle sait sacrément bien visée quand elle le veut !

Les pattes d'oies apparurent aux coins de ses yeux. Akélia fut contaminée par son optimisme. Elle qui refoulait tout ce qui la traversait, ce bref instant de légèreté était le bienvenue dans sa poitrine comprimée. Des conversations comme celles-ci étaient le meilleur moyen de distraire ses pensées.

—Tu as hâte de rentrer ? l'interrogea-t-elle en sentant le mutisme du cavalier s'allonger.

Même si elle ne savait pas ce qu'elle ferait une fois de nouveau à Ron Dhras -parce qu'elle préférait se convaincre qu'elle rentrerait saine et sauve-, il était plus plaisant de mobiliser son attention là-dessus que sur les cauchemars qui hantaient ses paupières closes. Elle se remémora les enfants, leurs rires cristallins, les égratignures qu'elle soignait lorsqu'ils jouaient dans les prés...

—Oui, répondit Laïdan alors qu'elle n'attendait plus de réponse. J'ai hâte de retrouver ma mère et Adzaros.

—Adzaros ?

—Mon cheval, expliqua le cavalier avec une nostalgie brillante dans les yeux. C'est un bel étalon alezan. Il manque parfois, mais je suis heureux de savoir qu'il doit mener la vie dure aux palefreniers pendant mon absence.

Il posa l'arme polie sur le sol en tourna la tête vers Akélia qui examinait avec attention les couleurs du feu.

—Et toi ? enchaîna-t-il. Tu dois avoir du mal à penser à après...

Le Prince et l'Alchimiste (REECRITURE)Where stories live. Discover now