Les Barrières de la Mémoire 2

Chapitre 1 - La taupe

Ce soir-là, Gabrielle rentre tardivement de sa journée de travail. Enfin, si on peut appeler ça un travail. Elle est très loin de ce qu'elle faisait avant, lorsqu'elle était interne à l'hôpital. Voilà sept ans que sa vie a totalement changé. Un virage à 180 degrés. Juste après qu'elle ait quitté le complexe des Avengers. Elle n'a jamais vraiment repris sa vie d'avant. Elle a bien tenté de redevenir un simple médecin. Mais, ne se retrouvant plus dans toutes ces choses qui faisaient son quotidien auparavant, elle a vite quitté son poste. Alors, la mutante a d'abord pris le temps qu'il lui fallait avec sa famille. Ré-apprendre à connaître ses parents, ce qui ne fut pas une chose aisée. Il faut dire qu'ils avaient quitté une ado en devenir et en pleine crise et ils se retrouvaient aujourd'hui avec une femme déterminée et indépendante.

Il a fallu aussi apprendre à ses frères et sœurs la grande nouvelle. Tous ne l'ont pas bien accueillie. En même temps, retrouver sa mère 25 ans après l'avoir enterré... Son frère Nicholas a eu besoin d'un peu de temps pour digérer l'information. Il lui en a beaucoup voulu, car pour lui, tout était de sa faute. Elle avait beau avoir contribué à leur retour parmi eux, il n'a pas vu les choses de cette façon-là. Ils ont mis de nombreux mois avant de se reparler comme avant. Ce n'est pas toujours facile de gérer la façon de voir des autres. Quant à ses parents, ils ont, petit à petit, trouvé leur place au milieu des enfants et des petits enfants. Pour Gabrielle, c'était magique de les voir appréhender leur rôle de grands-parents.

La canitie s'est également entraînée afin de maîtriser l'ensemble de ses pouvoirs, mais dans le plus grand secret. La chasse aux sorcières lancée par Thaddeus Ross, secrétaire d'État à l'époque, a fait que tout élément modifié ou ayant des supers pouvoirs et qui ne se ralliaient pas aux accords de Sokovie devenaient des ennemis de l'État. Elle a donc préféré être discrète, car elle n'adhère absolument pas à leur façon de faire. Ni avec le contenu des accords, ni dans cette façon de traquer les optimisés. D'autant plus que depuis la libération de ses pouvoirs, la mutante a gagné en puissance.

Grâce aux exercices de médiation et à une longue introspection, ceux qu'elle utilisait jusqu'ici ont trouvé leur juste place, en totale osmose et se sont stabilisés. La matérialisation d'objets, la lecture des émotions et des pensées ainsi que la télékinésie sont devenus des actes usuels, sans aucune complexité. Permettant à de nouvelles compétences, endormies jusqu'ici, d'apparaître. Bridées par son subconscient. L'ancien médecin s'est ainsi découvert des dons en manipulation mentale et pour la téléportation. Un jour, en pleine méditation, elle s'est mise à penser à un endroit. Elle a ressenti une sensation de chute pendant un très bref moment. Et lorsqu'elle a ouvert les yeux, elle avait changé d'endroit. Quelle ne fut pas sa panique. Surtout qu'elle n'avait évidemment pas atterri dans un endroit proche de chez elle et qu'elle ne savait pas vraiment comment recommencer. Il lui a fallu de longues heures d'entraînement pour appréhender ce nouveau moyen de déplacement. Mais, aujourd'hui, elle est capable de se rendre et de transporter des personnes avec elle, n'importe où, sur sa seule volonté. Une capacité qu'elle aurait aimé partager avec Wanda.

Mais, depuis son départ, Gabrielle n'a malheureusement jamais plus eu de contact avec les Avengers. Ni de nouvelles de Bucky d'ailleurs. Il lui a fallu de nombreux mois pour arriver à ne plus souffrir comme au début. À penser moins à lui. À reprendre le cours de sa vie. Mais jamais personne n'a pris sa place. C'est comme si elle avait perdu une partie d'elle-même. Elle ne lui a jamais dévoilé ce qu'elle ressentait pour lui.

Puis, l'éclipse a tout chamboulé. Si dans un premier temps la vie a semblé plus difficile sans les personnes qui avaient disparu, elle a fini par l'être vraiment pour les rescapés. Surtout socialement. Les écarts n'ont fait que de se creuser davantage. Des populations entières ont migrés ou on été forcées de le faire pour combler les vides. Rapidement, ils ont été traités comme des moins que rien, des pions facilement déplaçables pour répondre aux besoins de main-d'œuvre. Des parias. Et des besoins se sont fait sentir. Humanitairement et humainement.