2 . Repas gâché.

4 1 0
                                    

Fin  Juillet 2023, dans un des appartements les plus huppés de Londres.

Cette journée commençait mal. Je dirais même très mal. Pour une bonne soirée Letflix, on aurait pu faire mieux, et je devais avouer que je ne m'attendais pas du tout à ça.

Adamaï entra dans la pièce, déterminé à en finir avec moi. J'en étais certaine. Son regard était avide et calculateur. Je voyais bien qu'il avait déjà décidé à quelle sauce il allait me manger. Mais je ne céderais pas.

Je me tenais debout, prête à en découdre. Hors de question qu'un chien ait le dessus sur moi. Tant que son maître n'était pas chez lui, c'était moi la patronne. Pas ce toutou de la taille d'un poney.

Assis, Adamaï. Pas bouger ! Dis-je avec la conviction d'une personne menée à l'échaffau.

Bravo Kristal, tu as été tellement crédible qu'il te montre les crocs maintenant.

En effet, le chien me regardait en retroussant les babines, la bave dégoulinant presque de sa gueule. Avec sa stature énorme et ses crocs luisants, il ressemblait plus au grand méchant loup qu'à Balto. Ses yeux vairon rouge et or fixaient mon assiette de pâtes bolognaises maison en équilibre dans une main et la carafe d'eau dans l'autre.

Non, mais des yeux vairon Griffondor, quoi ! Comment un animal pouvait-il avoir des yeux comme ça ?

Son pelage était d'un noir brillant aux reflets or. Bien qu'il soit magnifique, je ne connaissais aucune race de chien ressemblant à celle-ci. Il était une sorte de croisement entre le loup gris (pour la forme), le berger (pour le caractère) et le dog allemand (pour la taille). Et pourtant, ma copine avait eu le culot de me dire que c'était un croisement Husky/Labrador.

Elle avait besoin de lunettes, oui !

Même pas en rêve, Wolfie ! Grognais-je en lui montrant mes dents, moi aussi.

Je savais que la provocation n'était pas conseillée avec ce genre de chien, mais bien, je me sentais l'âme d'une guerrière aujourd'hui. Sauf qu'apparemment, Adamaï n'avait pas reçu le mémo. Sans oublier qu'il avait bien conscience que je ne ferais jamais le poids contre lui.

C'est drôlement intelligent, ces bêtes-là.

C'est donc ainsi que l'énorme chien s'élança dans ma direction. Son regard avide se fixait toujours sur mon assiette de pâtes Bolo.

Face à cette charge pleine de muscles et de dents, deux choix s'offraient alors à moi.

1. J'essayais d'esquiver en pivotant sur la gauche tout en espérant avoir le temps de poser l'assiette sur la table à temps. Bien que les chances que j'y arrive restent minces, je pouvais toujours essayer de compter sur ma bonne étoile. En gardant en tête que depuis que j'avais décidé d'aider ma meilleure amie, cette dernière ait décidé de faire grève.

OU

2. Je fonçais tête baissée à la rencontre de l'animal en comptant sur l'effet de surprise pour le faire battre en retraite. Mais en prenant en compte le rapport poids/taille entre nous... J'étais dans le pétrin.

Dans les deux cas, je risquais d'y perdre mon repas et l'eau.

C'était sans compter sur ma logique à toute épreuve que je choisis de foncer dans le tas. Très mauvaise idée, évidemment. Je vous avais dit que mon étoile, et mon cerveau aussi apparemment, avaient décidé de faire grève sans me demander mon avis.

Me voilà donc courant dans sa direction, plus ou moins confiante. Soudain, un jouet canin non identifié rouge fit son apparition sur le passage. Il n'était pas là quelques secondes plus tôt. Bien sûr, mon pied entra en contact avec le plastique, le jouet roula, et la seconde suivante, je me retrouvai sur les fesses. Un gémissement m'échappa quand je sortis le coupable de ma chute de sous ma fesse droite.

Qu'est-ce que tu faisais là, toi ?

Quant à mon assiette, elle n'était plus dans ma main, mais à un mètre de moi, retournée au pied du chien. La carafe en plastique (Dieu merci !), elle, était renversée sur le sol. Heureusement que je n'avais pas opté pour une bière ou un smootie à la myrtille comme j'en avais envie à la base. Sinon, le nettoyage aurait été problématique, vu que ces deux boissons allaient coller au sol en plus de tâcher mes vêtements au passage.

J'espère que tu es content, Adamaï. J'imagine que ce n'est pas toi qui nettoiera ce bazar. Soupirai-je en le foudroyant du regard.

Le canidé me regarda avec attention, puis baissa sa large tête vers le bas, sur mon assiette retournée. Ni une ni deux, il retourna l'assiette de sa patte, redressant légèrement la tête, histoire de voir ma tête décomposée devant mon repas étalé sur le damage de la cuisine. Quand il en eut assez de ma mine déconfite, il commença à manger goulûment, allant jusqu'à lécher le sol après avoir dévoré les pâtes et les boulettes de viande anciennement nappées de sauce tomate/basilic.

Profite bien, la prochaine fois, c'est toi que je me ferai en guise de repas. Un adamaï à la broche avec des herbes de Provence me semble un bon choix. Murmurais-je dégoûtée.

J'ajoutais ensuite, alors qu'il vint se poster devant mon visage afin de me lâcher la figure copieusement :

Sérieusement ! Arrête, grosse boule de poil ! Me faire des bisous ne m'empêchera pas de botter les fesses de ton maître et de cette traîtresse.

J'allais lui dire le fond de ma pensée à cette autruche. Quant à son pseudo-employeur, je lui enfoncerai le jouet dans la trachée. Non, mais sérieusement, il n'a qu'à l'emmener avec lui au boulot ou en voyage. Riche comme il était, il aurait pu faire entrer son toutou adoré dans n'importe quel hôtel, ni vu, ni connu.

Et surtout : pourquoi devais-je m'affamer pour sauver la face de ma bécasse de pote ?

...

Alors vous devez vous demander : « Comment a-t-elle fait pour en être arrivée là ? », « À quelle race ce chien appartient-il ? », « Pourquoi est-ce qu'elle le garde si elle ne voulait pas le faire ? » Et surtout, qui est ce mystérieux patron qui risque de finir mort au prochain chapitre ?

La réponse est très simple, je suis trop gentille. Quand une de mes amies a un soucis, je me porte à son secours presque comme le prince charmant, mais sans le cheval, les muscles et le charme ravageur. 

Et pour simple info, c'est moi la photo de ce chapitre. Je l'ai peut-être un peu, le charme ravageur finalement...

Krystal et Adamaï : Duo d'enferWhere stories live. Discover now