Rumeurs

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Damien
Le prince Alexandre me jeta un regard glacial dès qu'il comprit que je ne lui ferais pas de cadeau. Je n'avais aucune intention de m'en faire un ami de toute manière. Ce travail était une punition. Il y a encore quelques jours j'étais affecté à une caserne en bordure du territoire et cela me convenait parfaitement. Les missions étaient toujours palpitantes. Mon rôle était d'espionner les lignes ennemis au nord du royaume et j'avais toujours fait mon travail parfaitement. Enfin presque... Il est vrai que j'avais tendance à ne pas respecter les ordres lorsqu'ils me paraissaient absurdes. Je préférais toujours suivre mon instinct si je pensais que cela permettrait la réussite de la mission. Cela ne plaisait pas à mes supérieurs, évidemment. D'ordinaire, je m'en sortais plutôt bien – dans la majorité des cas j'étais simplement de corvée d'épluchage de patate pendant un temps conséquent. Hélas, cette fois-ci j'étais tombé sur un colonel avec un égo un peu trop important. Il n'avait pas supporté que je ne suive pas ses ordres – qui avaient pourtant failli couter la vie à tout mon bataillon – et s'en était plaint en haut lieu. On m'avait rapidement arrêté et rapatrié de force à la ville. En vérité, j'avais eu beaucoup de chance. J'aurais pu être renvoyé voire même exécuté pour ça. Étonnamment, le roi – qui était plutôt du genre à exécuter les gens pour pas grand-chose – était intervenu en ma faveur. Il avait apparemment besoin d'un soldat aguerri pour veiller – ou plutôt surveiller – son fils jusqu'à son mariage arrangé avec la princesse du royaume de l'est. Voilà donc pourquoi j'étais actuellement forcé de suivre un petit prince pourri gâté et arrogant jusqu'à sa chambre royale.

A peine arrivé dans ses quartiers, le prince sembla vouloir que j'attende à la porte et tenta de me fermer la porte au nez. Je n'étais pas dupe. Les anciens gardes du corps m'avaient tous raconté comment le jeune homme parvenait toujours mystérieusement à disparaître de sa chambre et comment aucun d'eux n'avaient réussi à découvrir son subterfuge. J'étais bien décidé à changer ça. Sous le regard empli de colère du prince, je me faufilai dans sa chambre et entrepris de vérifier chaque fenêtre, chaque interstice, chaque recoin. Je le vis se tendre imperceptiblement lorsque je commençai à fouiller dans les armoires. J'accentuai mes recherches dans la zone.

J'ouvris l'armoire à gauche de son lit et le vit grimacer fugitivement avant de reprendre une expression neutre. Avec un sourire carnassier, je toquai contre le fond du meuble et entendit un son creux. Je lançai un regard réprobateur au prince que je vis se renfrogner de plus belle. J'étais forcément sur une piste. Je tirai sur la planche de bois et, dans un crac sonore, elle céda.

Bingo...

Derrière la planche de bois, une petite porte était savamment dissimulée. Mes collègues n'avaient décidément pas cherché bien loin.

- Espèce d'abruti ! me cria le prince. Tu aurais au moins pu chercher encore un peu pour trouver le mécanisme qui permettait de faire coulisser la planche ! Tout est cassé maintenant !

Je haussai les épaules et ne répondis pas. Autant me faire passer tout de suite pour un simple soldat un peu retardé. Ainsi, il risquait moins de se méfier de moi. Je tirai sur la poignée de la porte et constatai qu'elle était verrouillée.

- Oh elle doit être coincée avec tes bêtises, tenta le prince d'un ton innocent.

- Ne me prenez pas pour plus stupide que je ne suis, Votre Altesse, répliquai-je d'un ton acide. La clé je vous prie.

- Ne crois pas que tout sera toujours aussi facile, murmura-t-il sur le même ton en me remettant l'objet.

Il avait l'air furieux et cela me surpris quelque peu. Les autres m'avaient décrit un garçon frivole et pourri gâté mais il semblait sincèrement affecté par ma découverte. Il ne ressemblait pas à un enfant à qui on aurait confisqué son jouet préféré. Il avait plutôt l'air d'un homme dont on aurait cruellement resserré les entraves. Je me sentis presque coupable lorsqu'il me jeta dehors et qu'il s'enferma dans sa chambre. Pendant quelques instants j'eu l'impression de l'entendre pleurer et me fit la réflexion que la réaction était un peu forte pour une soirée de baise manquée. Puis, un grand bruit de chaise que l'on brise retentit et je revins sur mon jugement. Il n'y avait que les enfants gâtés qui cassaient les meubles lorsqu'ils étaient contrariés. Je levai les yeux au ciel, rangeai précieusement la clé dans une des mes poches. Puis, je pris mon poste devant la porte de la chambre.

Le prince d'Andoria (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant