CHAPITRE XXII

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Janvier 1702, Palais-Royal, Magistère...

Aux murmures sur son âge, avaient succédé les murmures sur sa condition. Aux murmures sur sa condition avaient succédé les rumeurs sur son efficacité. Aux rumeurs sur son efficacité succédaient maintenant des murmures sur sa puissance. Alors que les murmures précédant n'étaient que mépris, ceux qui se soulevaient au passage d'Hector étaient désormais empli d'effroi.

Depuis qu'il avait interrogé avec succès le Fou de la Reine, a peine deux mois plus tôt, il avait instantanément gravi un échelon dans la hiérarchie. Il pouvait désormais quémander à ses collègues, pouvait agir à sa guise et surtout, avait réduit Geoffroy Lestrange, Louis-Gautier Lenoir et Basile Vectan au silence. Les deux premiers n'ayant plus osé ouvrir leurs bouches, et le dernier devant le comportement inhabituellement terrifiés de ses deux seconds ayant pris peur. Même Jean et Benoît semblaient avoir pris quelques distances mais ce ne fut que de courte durée.

Le seul qui montrait à l'égard d'Hector une absence manifeste de méfiance était le Surintendant Bertrand Bradefer. Ce dernier s'était montré très amicale suite à l'arrestation des principaux membres de La Main de l'Ombre – capturés grâces aux renseignements récupéré par Hector – et lui avait offert une titulature officielle de Lieutenant. Bradefer en avait même fait son garde rapproché. Lors d'événements interne au Palais-Royal, sa seule présence, disait-on, suffisait à éviter toute tentative d'assassinat et faisait avorter dans l'œuf tout complot contre la couronne !

Fort de cette réputation, alimenté par les ragots de la cour, Hector s'était vu ouvrir le vaste horizon de la politique et des jeux de pouvoir. Le Surintendant lui en enseignait tous les rouages, et Hector se surprit à apprécier ces jeux d'esprits. Le sien étant particulièrement affûté, il prit un malin plaisir à jouter en secret contre les intérêts Commandant Vectan. Ce dernier, n'ayant que des soupçons, il ne pouvait par l'incriminer directement. Mais son attitude, malgré la peur qu'Hector lui inspirait dorénavant, ne pouvait tromper personne. Hector avait été mis à l'écart, n'avais participé à aucune enquête ou arrestation, pas même à celles des criminels de La Main de l'Ombre, qu'ils avait pourtant localisé tout seul. Il avait également reçu sa paye en retard. Il ne pouvait même pas quitter Paris plus d'une journée, Vectan s'arrangeant pour lui donner de quoi s'occuper : triller des archives, vérifier des enquêtes déjà achevées, faire des patrouilles dans le Palais, accompagner des officiels entre le Magistère et le Magisterium... Bref, on lui faisait comprendre qu'il devenait gênant.

Excédé par tout cela, Hector finit par demander à Bertrand Bradefer un congé :

- Un congé ? Pour quel motif ? Et de quelle durée ? Pour aller où ? Demanda le Surintendant interloqué.

- Auriez-vous fais parti de l'Inquisition ? Rétorqua Hector. Autant que je sache, elle est toujours aux mains des sorciers, non ?

Le Surintendant en resta bouche bée. Il reprit après un court silence :

- Rare sont ceux qui ont connaissance du fait que l'Inquisition est été créée et soit contrôlée par des sorciers. Et pour le bien de toute notre communauté, il serait préférable que cette information demeure secrète.

- Elle le restera... si vous m'accordez mon congé.

- Vous seriez prêt à briser le Code du secret magique et à risquer une guerre entre nous et les Insorcellés pour quelques jours de repos ?! Demanda à moitié ironiquement le Surintendant.

- Tout dépends de votre réponse, Excellence, repartit Hector avec un sourire.

- Allez au Diable Balthazar. Prenez vos jours de congé. Bertrand Bradefer avait dit cela avec quelque chose dans la voix qui ressemblait à un mélange entre fierté, amusement et exaspération.

Hector Salazar : Mémoires D'un Auror Noir (Tome premier 1678-1715)Where stories live. Discover now