10 - Le sifflet d'un train de nuit

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Je ne pouvais pas détacher mes yeux de la tache rouge sur le sweat de Chishiya alors que nous entrions dans le centre commercial abandonné. Il marchait et se comportait comme d'habitude, et son expression ne trahissait aucune douleur. Même lorsque nous avions longé le parc jusqu'à croiser une des portes pour récupérer la carte de Deux de Pique, il ne s'était pas plaint. Mais j'étais certaine qu'il souffrait malgré ce qu'il laissait paraitre. Il était humain malgré tout.

On a pas besoin de faire ça. Je répétai alors pour la centième fois. Ma voix résonna en un écho dans le hall vide. J'irai avec quelqu'un d'autre dans mon prochain jeu.

Il marchait avec nonchalance à côté de moi, regardant les magasins autour de nous avec ennui. Ça n'a pas d'importance, on y est déjà.

Y a peut-être une pharmacie ici. Je mordis ma lèvre, luttant pour ne pas laisser mon anxiété prendre le dessus. Si on en trouve une, je pourrais peut-être avoir de quoi te faire un bandage.

Hors de question, répondit-il. J'ai vu l'état de ton bras.

Je mis ce commentaire sur le compte de son irritabilité, m'épargnant un énième sentiment de contrariété. Mon bras n'avait pas si mauvaise tête, non ? Peu importait. Je devais trouver un moyen de l'empêcher de trop bouger et d'aggraver sa blessure.

Repérant un banc entre deux grands parterres de fleurs artificielles, je suggérai, pourquoi tu t'assiérais pas là-bas ? Je serai super rapide.

Ses yeux croisèrent les miens, avec un regard qui me fit comprendre qu'il savait exactement ce à quoi je pensais. Ok, mais ça sert à rien de se précipiter. Puis, sortant ses écouteurs, il s'assit sur le banc, se pencha en arrière, et ferma les yeux.

Le laissant là, je passai nerveusement d'un magasin à l'autre. La plupart d'entre eux avaient été pillés, et repillés par les joueurs, et d'autres avaient été transformés en cachettes, rapidement abandonnés après la mort de leurs propriétaires. Mais certains étaient encore intacts, et c'est dans ces magasins que je tentai ma chance. J'attrapai deux sweats à capuche pour moi, l'un violet pâle et l'autre vert d'eau, ainsi que plusieurs t-shirts, chaussettes, shorts en jean et une nouvelle paire de baskets, car les miennes commençaient à s'user après tous les jeux auxquels j'avais participés jusqu'à maintenant.

Dans le monde d'avant, je n'aurais pas pu justifier le fait de dépenser de l'argent pour des vêtements de marque. En fait, je n'aurais même pas mis un pied dans la section Sport. Mais dans ce monde, ce type de vêtement semblait clairement être le choix le plus adapté, afin de se sentir le plus à l'aise possible pour bouger et courir, et ainsi avoir davantage de chance de survie.

J'étais sur le point de partir, quand je passai devant la section des vêtements pour hommes et que je me pris soudainement conscience que le sweat détrempé que je portais était parsemé de tâches brunâtres de l'eau de l'étang.

Je veux que tu me rendes celui-là.

Désolée, Chishiya, je marmonnai, imaginant sa déception. Je vais t'en prendre un nouveau.

Je commençai à parcourir la section pour hommes, à la recherche d'un modèle qui ressemblait à celui que je portais. Seulement je n'en trouvai pas.

Allez, y a bien quelque chose qu'il pourrait mettre ici.

Puis j'aperçus quelque chose de blanc pétant cachée dans les étagères, et je choisis un sweat à capuche blanc, uni, très similaire à celui qu'il portait habituellement. Il n'avait pas l'air de quelqu'un vraiment tenté par les couleurs vives.

Quelque chose comme ça, ça le ferait non ?

Sortant deux sacs de derrière la caisse, je glissai les vêtements dedans, en veillant à ce que le nouveau sweat de Chishiya soit soigneusement plié.

Et une fois Mise en Formule, Etalée sur une Epingle [Chishiya x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant