🖋 Chapitre 2 : Exode 🖋

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Espagne - 934

Épuisé, abattu mais vivant, le corps de Kukulkan débarquait sur les rivages d'un monde inconnu aux premières lueurs du jour. Dans sa forme humanisée, la divinité était un homme robuste et plus grand que la moyenne, une large coiffe à l'effigie d'un serpent faite de plumes multicolores irisées tombait jusque sur ces épaules. Son corps meurtri suintait de son sang venimeux, de larges lacérations parcouraient son corps, traces indélébiles de sa défaite fraternelle. Il ne portait pour seule tenue qu'une large jupe de jute, son buste et ses bras étant couverts de nombreux bijoux offerts en offrandes. Ses mains et ses pieds étaient recouverts par de délicats filaments d'or entrelacés et ornés de quelques plumes bleutées. 

Kukulkan resta en cette fraiche journée allongé sur le sable, balayé par des vents violents et la pluie, incapable de bouger. Il repensait encore à sa défaite, sa fuite, son abandon, sa chute, et déjà à son retour. Ce ne fût qu'à la nuit tombée, sous la douce lumière des premières étoiles de la nuit, que le dieu serpent trouva enfin la force de ramper de son seul bras valide vers une petite cavité partiellement inondée par la marée. Ils resta en ce lieu plusieurs jours et nuits, récupérant de ses blessures physiques et morales, toujours incapable de se lever mais apte à se défendre. C'est ainsi qu'au matin du quatrième jour il entendit un homme s'approcher par la plage de la caverne, un homme qu'il aperçut, une peau blanche comme la lune et marquée par le temps. Sûrement pas une menace pour Kukulkan le guerrier, mais plutôt une opportunité d'en apprendre plus sur un peuple inconnu et lointain. 

Attiré par de petits bruits répétitifs en provenance de la caverne, le vieil homme déposa son petit filet auprès de son panier sur la plage, à l'abri du vent et de la marée. Retroussant son large pantalon de tissu, il pénétra avec précaution dans la petite caverne partiellement inondée, gardant une main sur la paroi pour se tenir en équilibre. Sortant de l'eau le vieil homme aperçut une masse gisant au fond de la caverne, humaine, animale, impossible à identifier à l'aide des premières lueurs du jour. L'homme s'approcha à quelques pas de la masse, habituant ses yeux à l'obscurité et profitant des premiers rayons du soleil perforant l'obscurité de la caverne. Sa curiosité lui criait de s'avancer encore, sa raison lui murmurait qu'il était encore temps de partir. Un cri perça la tranquillité de ce frais matin en Espagne. Les oiseaux s'envolèrent, le silence revint, et un jeune homme trouverait bientôt un ensemble de pêche abandonné sur la plage.

La nuit tomba enfin sur la côte espagnole et Kukulkan attendait de voir le dernier rayon de soleil disparaître de l'horizon avant de sortir de son entre. Accompagné par Vénus, il remonta la dune en cette nuit calme et repéra au loin de petites sources de lumières artificielles. Une occasion unique d'en apprendre plus sur ce nouveau peuple à la peau pâle. Kukulkan appréhenda pour la première fois la flore locale, bien différente de son lieu de naissance, bien moins florissante, comme si la mort s'abattait lentement en ce lieu. Il observa également au loin les premiers animaux sauvages, des oiseaux, de petits rongeurs nocturnes mais attira également les serpents qui rôdaient en forêt. Le dieu fût ravi de découvrir que cet animal rayonnait également sur ces rivages inconnus. Se rapprochant enfin de la source de lumière, Kukulkan découvrit un petit village fait de maisons de bois, un ensemble architectural plus primitif que ceux de son peuple. Décidant qu'il était maintenant trop dangereux de rôder en forme humaine aux alentours du village, Kukulkan reprit alors sa forme animale, celle d'une large vipère aux reflets verts et rouges, exotique pour la région, mais suffisamment discrète pour en apprendre plus sur ce peuple. 

La première nuit fût courte pour le dieu serpent, après avoir fait le tour du village pour en apprendre plus sur les coutumes des hommes pâles, Kukulkan reprit la direction de la forêt afin de trouver un repas convenable. Le sang de dizaines d'animaux différents coula sur le sol et la Lune dit-on devint rouge cette nuit, les premiers cadavres pour se rassasier, les autres pour étudier, et les derniers pour nourrir le groupe de serpents qui le suivait pieusement, reconnaissant en lui toutes les caractéristiques d'un nouveau leader.

Les légendes MayasWhere stories live. Discover now