Chapitre 38

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Comme espéré, j'ai retrouvé ma petite routine, avec comme supplément des sorties en amoureux. C'est bizarre à dire, mais je crois que je n'ai jamais été aussi heureuse que ces dernières semaines. Les examens à l'université sont passés, et je peux maintenant pleinement me consacrer à la préparation de mon audition et de mes derniers moments avec mes amis. J'aimerai vraiment qu'un dernier combat s'organise avant mon départ, histoire de retrouver cette ambiance qui m'a bercé durant toute mon adolescence. Voir l'homme que j'aime sur le ring, le supporter comme j'ai toujours voulu le faire, et me déhancher sur la piste de danse entourée de mes meilleurs amis.
Quand je me lève pour prendre mon petit déjeuner dans la cuisine, j'y vois Adrien en train de s'affairer à préparer des toasts. Je reste un instant appuyée contre l'encadrement de la porte pour l'admirer. Malheureusement mon souhait ne semble pas réalisable. Depuis le week-end passé à Nice, Adrien n'a plus jamais abordé le prénom de son meilleur ami. Et ce dernier semble s'être mis en silence radio de mon côté. Je ne peux pas partir à l'autre bout du monde avec des conflits dans les pattes, je ne le supporterai pas. Je m'approche d'Adrien et enlace mes bras autour de son torse. Il se retourne tout doucement et me demande d'une voix rauque :

- Bien dormi ?
- Comme quand l'année scolaire se termine, je raisonne.
- Je crois que je te verrais encore moins que pendant les examens. Tu passeras tout ton temps au studio, hm ?
- Je n'ai pas trop le choix, je raisonne en m'installant sur un siège de bar.
- Pourquoi se contenter de participer...
- Quand on peut être la meilleure, je coupe en terminant sa phrase.

Il sourit et m'apporte mon café avant de s'attabler avec moi. On déjeune en silence, puis une question me taraude.

- Adrien ?
- Hm ?
- Tu as des nouvelles d'Alex ?

J'aperçois sa main se contracter autour de sa tasse. J'ai touché un point sensible, et comme redouté, ça n'a pas l'air de s'être arrangé entre les deux.

- Pas depuis Nice, avoue-t-il froidement.
- Tu n'as pas essayé de reprendre contact ?
- Pourquoi ça serait à moi de faire le premier pas ? Tu n'as pas idée des horreurs qu'il m'a sorti il y a trois semaines.
- Il était sûrement énervé... il est resté tendu tout le long du trajet retour. Je suis sûr que tu n'es pas le seul responsable de son comportement. Et je suis certaine qu'il a besoin de son meilleur ami.
- S'il ne voulait pas être tendu, il n'avait qu'à pas s'envoyer en l'air avec une amie d'enfance. C'était évident que tout allait se compliquer.
- Comme si tu étais bien placé pour y faire des remarques... je siffle entre mes dents.
- Nous deux c'est différent.
- Et en quoi, au juste ?
- On a toujours été ensemble. Eux, je ne sais pas, un week-end ensemble sous les tropiques et ça perd le contrôle de leurs hormones.
- Adrien ! je reprends.

Je suis certaine que l'attirance entre Sofia et Alex ne date pas de Nice, mais de bien plus longtemps. Ils ont toujours été très complices, mais se retenaient, comme si quelque chose les obligeait à rester de simples amis. Mais quoi donc ? Nous ? Ils avaient peur d'encore plus compliquer les choses en se mettant avec le meilleur ami du copain du leur ? Connaissant Sofia, cela ne m'étonnerait pas. Elle a toujours fait passer les autres avant elle, tout en adoptant un comportement détaché pour montrer que cela ne l'atteint pas.

- Et Claire alors ?
- Quoi, Claire ? demande-t-il surpris.
- Elle a sûrement besoin de toi dans cette épreuve.

Cette fois, c'est sa mâchoire qui se contracte, signe que ce n'est pas de l'énervement, mais de la frustration.

- Je ne sais pas si je me sens prêt à la revoir.
- Je suis sûr que ça lui ferait plaisir.
- Tu n'as pas idée de ce que je lui ai fait vivre. J'ai été la pire ordure qu'un homme peut être avec une femme.

Un petit sourire nerveux trahit mon visage. J'ai une idée de ce qu'il a pu faire, et le peu d'écho que j'ai reçu contraste totalement avec la personne que j'ai en face de moi.

- Raison de plus pour lui montrer que tu as changé, je rassure en posant ma main sur la sienne. Montre-lui, montre aux gens, que tu es prêt à changer. Que tu veux changer.
- Je ne sais même pas si elle veut me voir...
- Qu'elle le veuille ou pas, ça la soulagera. Elle a besoin de ton soutien.

Il relève ses yeux chocolats vers moi et je lui adresse un sourire rempli d'encouragement. Il me le rend, et pour la première fois depuis des années, j'ai l'impression que c'est lui et moi contre le problème. Et non plus moi contre lui pour le résoudre.

La Danseuse & Le Boxeur Donde viven las historias. Descúbrelo ahora