Chapitre 6

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Mick -

Mardi 5 mars 2024 (Londres, Angleterre)

Si mes performances ce week-end sont aussi désolantes que celles que j'ai alignées aujourd'hui au simulateur, je ferais aussi bien de rester ici et de ne pas aller me ridiculiser davantage. Surtout quand on sait qu'avec la préparation encourageante pour Bahrein le résultat n'a pas suivi, je n'ose même pas imaginé si déjà virtuellement je ne suis pas à la hauteur à quel point l'écart avec George sera scandaleux sur la piste.

Je sais qu'il connait la voiture, qu'il n'a pas passé un an hors sans conduire et qu'il a plus d'expérience mais quand même. Pendant qu'il se battait pour la victoire, je luttais tout juste pour des points. L'écart entre sa seconde place et ma malheureuse huitième position parle de lui-même. Je n'étais pas à la hauteur, et au vu des temps du simulateur aujourd'hui : je ne le serais pas plus ce week-end en Arabie Saoudite.

Finalement j'avais raison de m'inquiéter pendant la pré-saison, et Toto doit déjà être en train de regretter son choix. Après deux années de galère la voiture est enfin compétitive, sauf qu'il n'a qu'un pilote pour en tirer tout son potentiel. Du beau gâchis.

« Mick Shcumacher ? Tu es avec moi ? »

La main d'Amélia passe devant mes yeux et me tire de mes pensées, je n'avais pas réalisé à quel point j'avais perdu pied avec la réalité. Ce qui est d'autant plus grave que je suis au volant de la voiture actuellement.

« Oui, je réponds distraitement, oui pardon.

- Tu es sûr que tout va bien ? »

Alors qu'elle pose sa question je profite de noter le passage du feu au vert pour redémarrer et avoir à me concentrer sur la route plutôt que sur le regard pénétrant qu'elle pose sur moi. Je ne veux pas qu'elle lise toutes ces pensées qui se bousculent en moi, que je sois déçu de moi à ce point est une chose, qu'elle le voit en est une autre.

« Mick, je ne suis pas stupide tu sais. Je vois bien que ça ne va pas depuis qu'on est rentrés, et ne me sort pas encore que c'est la fatigue ou je ne sais quelle connerie du genre. On sait tous les deux que c'est faux.

- Et bien si tu sais tout, je ne vois pas pourquoi on a besoin de parler. »

À l'instant où ses mots franchissent mes lèvres et où mon ton trop sec résonne dans l'habitacle je sais que j'ai merdé. Le silence qui me parvient en réponse en est la preuve. Sans parler du regard noir qu'elle m'adresse avant de simplement décider de fixer la route devant elle.

Elle veut m'aider, je le sais. Sauf que l'idiot que je suis est aussi incapable de piloter correctement une monoplace que de simplement accepter la main qu'elle me tend. Et pour ne rien arranger, je me mure à mon tour dans le silence au lieu de juste m'excuser et lui expliquer ce qu'elle suppose déjà. Un véritable bon à rien. Voilà ce que je suis.

Et ce n'est même pas notre retour à l'appartement qui arrange quoi que ce soit. Évidement ça serait l'occasion d'aller enfin lui parler à tête reposée pour lui dire que je ne lui en veut pas, qu'elle a raison et que je suis juste extrêmement frustré de mes résultats en ce début de saison. Cependant au lieu de ça, je continue de bouder dans mon coin en l'ignorant comme elle le fait également.

En même temps, la savoir dans la salle de bain en train de se préparer pour sortir dîner avec George et fêter sa pôle ainsi que sa deuxième place n'aide pas à me calmer. Enfin, si j'étais moins de mauvaise foi je reconnaitrais qu'ils ont surtout un rendez-vous et que le Grand Prix ne risque pas d'être au coeur de leur conversation alors ce n'est même pas comme si je pouvais lui en vouloir d'aller fêter la réussite d'un autre. De toute manière, je n'en aurais aucun droit, et surtout ça n'a aucun sens.

War of heartsWhere stories live. Discover now