25 - Nicotine patch

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« Tu es sûr que ça va marcher ?

— T'inquiète, l'Indien. Fais-moi confiance. Alors, c'est lequel ?

Cezar-tout-court penche sa tête par le cadre de la porte du dortoir, sa bretelle tombe de son épaule.

Je suis derrière lui, moi, et de mon index je lui montre le lit de notre cible.

Le faciès d'orang-outan qui a essayé de forcer Linn — l'Infirmière Ohlson, la plus belle des infirmières premier grade — à coucher avec lui. Il lui a fait croire qu'on avait besoin d'assistance médicale dans la salle de réception, celle où il n'y a jamais personne, et il a tenté de faire son affaire à l'abri des regards.

Fort heureusement, votre gentilhomme sexy et téméraire souhaitait être un peu seul ce jour-là, et a extirpé malgré lui la demoiselle en détresse de cette situation déplaisante.

Est-ce que lui avoir cassé une dent est un paiement suffisant ?

Sûrement.

Mais je ne me contente pas du suffisant.

— Très bien.

Le gars du staff s'adosse contre l'encadrement de la porte du dortoir tout éteint. Il sort un paquet en carton, l'ouvre, et me présente un emballage en papier carré.

— Heu... C'est quoi cette merde ?

— L'arme de notre crime, simple-soldat. Tu as dit qu'il essayait d'arrêter de fumer, n'est-ce pas ? C'est ça qui le rend irritable. Le syndrome de sevrage donne des sautes d'humeur, des insomnies et des tremblements. C'est très désagréable, vraiment. C'est une plaie, d'arrêter de fumer. Mais les effets disparaissent petit à petit, le corps s'habitue à l'absence de tabac.

— D'accord. Mais je m'en tape, moi.

Il place une main assurée sur mon épaule.

— Ça, mon précieux petit soldat médiocre, ce sont des patchs de nicotine. Ils diffusent la substance addictive de la cigarette à travers ta peau, afin que ton corps puisse s'y déshabituer. Tu vois où je veux en venir ?

— Ouais. Tu veux lui en coller un. Je croyais que tu avais concocté une blague démentielle, mais ça c'est un peu ridicule.

— Oh, non, non..., rit-il. Ne te méprends pas, Rajan-le-simple-soldat... On va lui en coller deux ou trois, pendant qu'il dort, et on les lui retirera avant son réveil. C'est l'équivalent d'avoir fumé une trentaine de cigarettes en une nuit.

J'inspire longuement.

— Demain, on n'en mettra pas. Après-demain non plus. On en collera tous les quatre jours, afin que son corps reste en constant manque, obsédé par la clope, frustré, épuisé, et incapable de comprendre pourquoi son addiction ne s'apaise pas. Est-ce une punition à ta hauteur, ou bien est-ce trop extrême pour toi ?

— Ouais, d'accord, c'est plutôt ingénieux.

— Ravi de te venir en aide, dans ce cas.

Nous faufilant dans la pénombre du couvre-feu, il va remonter le tissu du short de la face de Jupiter endormi, et je détourne le regard pendant qu'il colle trois patchs de nicotine sur sa cuisse comme s'il avait fait ça toute sa vie.

Il fourre les emballages dans sa poche, mais un mec grogne dans son sommeil, alors Cezar-tout-court chuchote un :

— Suis-moi, d'accord ? »

Puis s'adosse au placard et me tire vers lui, ses mains sur mes hanches.

Il fourre sa tête dans mon cou, et je frissonne de malaise lorsque le type lance un :

Ropes and InkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant