Chapitre 36 - Carlyle

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Mercredi soir

Le moteur de l'Audi démarra dans un tel bruit que j'eus peur qu'il n'explose. Il était peut-être tant de changer de voiture...

Je jetai un regard à Brooklyn avant de démarrer. Il semblait aller bien. Pourtant, sous sa veste en cuir, je distinguais des coupures. Il avait utilisé sa magie pour repérer les lieux. Même si je n'y pouvais rien, un sentiment de culpabilité me serra la poitrine, j'aurais tant voulu le guérir. Un silence tendu s'était installé dans la voiture, seulement troublé par le bruit du clignotant lorsque je bifurquais.

— Rolland s'est entiché de Thussvor, déclara soudainement Brooklyn.

— Et plutôt sérieusement, validai-je.

— Ah tu as remarqué toi aussi ?

Je hochai de la tête. J'entendis à nouveau la voix de Rolland sermonner Thussvor parce qu'il avait ôté ses chaussures. Le surnom dont il l'avait affublé ne me laissait aucun doute sur ses intentions.

— Au club, il a dit que Thussvor était son soumis...

— Putain. Thussvor s'est vendu pour obtenir sa collaboration, soupirai-je.

Même si je n'avais jamais particulièrement apprécié notre chef, cela me tordit le ventre de savoir qu'il s'était sacrifié pour sauver cette enquête et pour éviter que Brooklyn tienne ce rôle auprès de Rolland. Je l'avais mal jugé et je le regrettais.

— Il sait ce qu'il fait. S'il avait voulu que l'on soit au courant, il nous l'aurait déjà dit, avança Brooklyn.

— Tu as raison. J'espère qu'il sollicitera notre aide pour panser ses plaies.

— Tu penses vraiment qu'il va le faire ?

— Non.

Je parquai la voiture de travers, jurant lorsque je touchais le vélo de Léo avec le pare-chocs. Brooklyn laissa échappa un rire cristallin qui apaisa définitivement mes angoisses. Le saisissant par la taille, je l'entraînai à l'intérieur. Je fronçai les sourcils lorsque j'avisai la lumière dans le salon. Léo était allongé sur le canapé et regardait une série.

— Tu ne dors pas ? lançai-je.

Léo se retourna et m'offrit un sourire rayonnant. Enroulé dans un plaid, il posa sa tasse sur la table basse.

— Mamie a appelé.

— Ah bon ? Qu'est-ce qu'elle voulait ?

Cela m'inquiéta immédiatement. Je vérifiai mon téléphone, ma mère ne m'avait laissé aucun message ou appel en absence. Mon fils dut ressentir mon inquiétude car il s'empressa de me rassurer.

— Il y a son vernissage demain soir. Elle veut que tu y ailles avec Brook.

— Elle croit que j'ai du temps à perdre avec ces conneries ? J'ai plus grave à gérer, grondai-je en levant les yeux au ciel.

— Elle a dit que tu dirais ça. Elle insiste. Et elle veut voir Brook. Sinon elle te déshérite.

Je roulai des yeux. Brooklyn se mit à rire. Il me serra dans ses bras et me lança un regard empli d'innocence.

— Je ne suis jamais allé à un vernissage. Ça peut être amusant. Et puis, ça va nous changer les idées.

Son regard de chien battu me fit soupirer puis rire. Il avait raison. Tant que nous n'avions pas trouvé de magicien noir pour collaborer, nous ne pourrions pas avancer sur l'antidote. Rolland et Thussvor travailleraient sur les dossiers ramenés de la clinique, tandis que Brooklyn chercherait à percer l'identité de celui qui commanditait ce projet. Nous étions tous intimement convaincu que Duncan n'avait pas monté ce projet seul. Rolland, qui connaissait Duncan depuis dix-huit ans, était persuadé que son ami n'avait fait que suivre les ordres de quelqu'un d'autre. La discussion de ce soir semblait lui confirmer ce fait. En attendant de le démasquer, Yohan, Fred et moi travaillerions sur l'hypothèse d'une injection de pierre activée.

Bipolar MagicWhere stories live. Discover now