Chapitre 4

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Le portable à la main, Anna attendait à côté du portail du lycée. Elle lisait les messages que Rachel lui avait envoyés pendant la nuit, aux alentours de quatre heures du matin. Si le nom de l'expéditeur ne l'étonnait pas, elle ne put s'empêcher d'afficher un petit sourire en voyant qu'il y a quelques heures encore, la soirée battait encore son plein. Elle imaginait déjà les visages de ses camarades qui avaient assisté à cette fête : les paupières tombantes, les yeux gonflés, la peau ternie par la fatigue. Certains d'entre eux se maudiraient de ne pas être rentrés plus tôt alors que d'autres marmonneraient à longueur de journée sur leur mal de tête.

C'était le même cirque qui se répétait chaque semaine.

— Plus jamais, marmonna Rachel à côté d'elle.

Anna sourit alors que son amie posait son front contre son épaule dans une tentative désespérée de grappiller quelques secondes de sommeil avant d'aller en salle de cours. L'odeur de tabac froid vint lui piquer les narines. Elle approcha son nez des cheveux blonds de Rachel avant de faire un pas en arrière.

— Tes cheveux puent la clope, l'informa Anna en grimaçant.

— J'ai pas eu la force de les laver en rentrant. Pourquoi j'ai fait des space bun à ton avis ? dit-elle en pointant du doigt l'un des deux chignons qui ornaient sa tête.

— C'est mignon mais ça cache pas l'odeur pour autant.

— Je sais. Mais tout ça c'est la faute de Lucas.

Elle désigna du menton l'adolescent qui, accompagné de Noam, arrivait à leur hauteur.

— Qui s'assoit dans le courant d'air, risque la fumée de cigarette, répondit-il avec une voix si posée qu'Anna aurait pu croire qu'il s'agissait réellement d'un dicton.

Contrairement à Rachel qui était sur le point de s'effondrer de fatigue, les deux garçons semblaient en pleine forme. Lucas avait repoussé les quelques mèches brunes qui retombaient normalement sur son front en arrière, dévoilant parfaitement son visage. Ses yeux marrons ne trahissaient aucun épuisement. Anna ne comprenait pas comment sa peau beige claire pouvait apparaitre si éclatante alors qu'elle savait de source sûre que les seuls soins qu'il y apportait était un jet d'eau rapide le matin en se levant et le soir en rentrant du lycée.

Il y avait une forme d'injustice dans tout cela.

— T'as lu mes messages ? murmura Rachel.

— Du début à la fin. Merci.

Il était impossible pour Anna de ne pas apprécier tous les efforts que Rachel réalisait pour que les lendemains de soirée, elle ne se sente pas exclue de toutes les conversations. Même s'il se disait que la fête ne pouvait pas débuter tant qu'elle n'était pas sur les lieux, que l'ambiance était moindre tant qu'elle n'était pas au milieu de la pièce en train de rire, elle prenait toujours le temps de lui envoyer des messager pour lui expliquer ce qui était en train de se passer.

Rachel lui racontait les derniers ragots qui se murmuraient entre deux pièces ; lui donnait le nom de la personne qui avait malheureusement été jetée dans la piscine, portable dans la poche et montre électronique toujours au poignet. Grâce à tous ses efforts, Anna était rarement perdue quand les événements de la veille étaient ressassés en cours. Et si elle ne pouvait pas réellement participer aux discussions sans passer pour la personne qui s'incrustait dans chaque discussion, cela lui donnait l'impression de ne pas être une intruse dans sa propre classe.

— J'ai besoin d'un café. Deux cafés, peut-être, dit Rachel à Lucas. Viens avec moi.

Il regarda Noam qui haussa les épaules, amusé, avant de se tourner vers Anna. Ses yeux ne quittèrent pas son visage, comme s'il essayait d'y lire quelque chose – une chose dont elle n'avait même pas connaissance.

Tu ne veux pas l'accepterWhere stories live. Discover now