𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟗

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Enora

J'en n'avais pas envie, je détestais ça. Mais je n'avais pas le choix, je n'avais plus aucun choix. J'étais prisonnière d'un corps qui ne m'appartenait plus, il était sien.

C'est comme si je devenais étrangère à moi-même, comme si mon propre corps, mes propres actions n'appartenaient plus qu'à lui, à ses attentes, à ses désirs. C'est une sensation déroutante, frustrante, où chaque geste, chaque pas semble être dicté par une force extérieure. Je me retrouve coincée dans une situation où mes choix semblent disparaître, où mes envies sont éclipsées par ce que l'autre attend de moi.

Ce sentiment d'être prisonnière de mon propre corps, de ne plus avoir le contrôle sur mes propres actions, est éprouvant. C'est comme si je ne suis plus maîtresse de mes décisions, comme si je devais constamment me plier à la volonté de quelqu'un d'autre. C'est une lutte constante pour récupérer un peu de cette liberté qui me semble si lointaine.

Je me sentais souvent observée par lui d'une manière qui dépassait la simple paternité.

À chaque fois qu'il posait les yeux sur moi, je percevais dans son regard une profonde empreinte de nostalgie. C'était comme s'il me voyait à travers son prisme, la femme qu'il avait tant aimée et perdue.

Je savais qu'il était toujours en deuil, que chaque trait de mon visage, chaque geste, ravivait en lui son souvenir. Parfois, il me parlait avec une tendresse teintée de chagrin, comme s'il cherchait à retrouver un peu de cette proximité perdue avec elle.

C'était à la fois réconfortant et pesant. Je ressentais cette pression implicite de devoir être à la hauteur, de devenir une sorte de prolongement pour apaiser sa douleur. Il était difficile pour moi de trouver mon identité propre, de savoir si je devais simplement être moi-même ou incarner son souvenir pour lui.

Il y avait des moments où il posait sa main sur mon épaule, ou me donnait une accolade, comme s'il voulait retrouver dans ses gestes simples sa présence. Parfois, cela me faisait du bien, mais d'autres fois, cela m'était pesant. Malgré tout, je ressentais un lien spécial avec lui, une connexion mêlée de tendresse et de tristesse. Je voulais être là pour lui, mais je voulais aussi qu'il comprenne que j'étais moi-même, avec mes propres rêves et aspirations.

Des fois il venait dans ma chambre, se glissant dans mon lit et me murmurant des mots doux. J'aimais ça, j'avais enfin cette attention que je voulais tant.

- Tu es tellement belle ma poupée, il murmurait en me caressant le visage.

Il m'aimait enfin.

Je me réveille lentement, sentant les ténèbres du sommeil se dissiper peu à peu. La lumière du matin filtre à travers les rideaux, éclairant doucement la pièce encore endormie. Mes yeux s'ouvrent lentement, révélant un décor qui semble étrangement différent. Les murmures lointains des rêves disparaissent, laissant place aux bruits familiers de la vie autour de moi.Je regarde autour de moi, prenant conscience peu à peu de l'endroit inhabituel où je me trouve, tandis que ma tête émerge lentement de la brume du sommeil.


C'est vrai, j'ai dormi ici.

Un léger frisson parcourut mon corps, rompant la familiarité habituelle de mon réveil. Une chaleur familière émanait de quelque part près de moi, me faisant réagir différemment cette fois-ci. Je me suis doucement retournée pour découvrir, à ma grande surprise, la tête d'Aiden reposant près de moi. Une vague de chaleur m'a submergée, rougissant mes joues instantanément.Mes yeux se sont ouverts lentement, prenant conscience de la situation étonnante. La perplexité s'est emparée de moi, suivie rapidement d'une vague de gêne intense. Mes joues brûlaient d'embarras face à cette proximité inattendue.Le temps semblait s'arrêter, chacune de mes pensées figée alors que je restais immobile, surprise. Chaque battement de mon cœur résonnait dans mes tempes, tandis que l'horloge semblait se moquer silencieusement de moi.Une partie de moi espérait qu'il se réveillerait de lui-même, évitant ainsi une confrontation embarrassante. Pourtant, une autre partie de moi se sentait mal à l'aise de le laisser ainsi, même si je ne l'appréciais pas particulièrement.Une brise légère caressa nos visages, mais j'ai retenu mon souffle, craignant de le réveiller. Mes bras étaient immobiles de peur de le déranger dans son sommeil.

ESMERALDAWhere stories live. Discover now