EPTA - Livre III - CHUTE

CHAPITRE VII

AZARIAS

« Quels sons produit ton âme ?
Quelque chose me dit qu'elle est aussi grinçante que la mienne... »
-L

Lux me tend son paquet et après avoir allumé sa cigarette, il me propose son briquet.

— Alors neveu, as-tu pris le temps de réfléchir à ma question ?

En même temps que ses mots sortent de sa bouche, il expire la fumée et sa voix rocailleuse en est encore plus velouté.

Ça fait plusieurs jours que je ne l'ai pas vu. Je ne sais pas si c'est à cause de la manière dont notre dernière discussion s'est terminée, mais il ne m'a pas convoqué depuis. Et plus je l'observe, plus je remarque le contour un peu plus foncé de ses yeux, plus il m'apparaît clair que ce n'est pas de mon fait. Qu'est-ce qu'il peut bien fabriquer...

— As-tu décidé de libérer Jun et Caïn ? De m'autoriser à sortir d'ici ? Je demande en retour tout en jouant avec le briquet.

Il aspire une longue bouffée de sa cigarette, pour l'expirer sans bruit en levant la tête.

— Sais-tu que ton amie... Aure, si ma mémoire est bonne... a décidé de suivre l'entraînement. De devenir soldat.

Je fronce les sourcils et roule maintenant ma cigarette entre mes doigts.

— C'est étonnant, n'est-ce pas ? Tes amis, ceux d'en haut, ceux du Purgatoire, ceux d'ici... Ils ont tous décidé d'avancer.

Ma main tenant le briquet se referme dessus.

— Tu as des... nouvelles du Purgatoire ?

Il ferme les yeux et s'enfonce dans son siège sans répondre.

Je devrais être habitué. Je devrais m'être habitué à ce putain de silence qu'il choisit sciemment d'instaurer quand ça lui chante. Avec lui, tout est énigme. Après plusieurs secondes de ce calme lourd et irritant, il reprend la parole :

— Quand vas-tu te décider Azarias ? Et sa réplique sonne lasse.

Je tourne la tête pour poser mes yeux sur le fameux meuble couvert à ma droite.

Avancer ? C'est ce que j'ai toujours fait.

J'ai réuni les Epta pour qu'ils n'aient plus à être seuls dans l'obscurité et je les ai encore plus enfoncés dans les ténèbres. J'ai glané toutes les informations que je pouvais auprès de mon père et des autres Thémis, dans le but de trouver une échappatoire à la sentence qui nous attendait mais je n'ai, en fin de compte, jamais pu l'empêcher. J'ai eu l'idée de nous enfuir au Purgatoire et cette décision nous a tous brisé. J'ai porté le fardeau de Jun avec elle, mais j'ai précipité sa perte. Avancer... c'est bien ça le problème. C'est bien moi le problème.

Ma cigarette vacille quand je la porte enfin à mes lèvres pour l'allumer. L'odeur fumée dans la pièce se fait plus forte alors que je laisse la nicotine ravager mes poumons.

— Si j'écoute ce que tu as à me dire, vas-tu les libérer ? Si je t'obéis, que je me rends, que je fais exactement ce que tu veux...

— Ça ne fonctionne pas ainsi, neveu.

J'expire bruyamment l'épaisse vapeur blanche avant de baisser les yeux pour observer mes mains.

Évidemment...