Chapitre 11 - Dernier entraînement (Léon)

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J'ai déjà nagé ce matin, mais comme je dois passer – au minimum – 6h dans la piscine, Bob m'attend près du bassin d'entraînement devant une ligne de nage, à 12h30 tapante. En général, je préfère manger le ventre vide, et aller au réfectoire ensuite, mais je n'avais pas le temps aujourd'hui. J'ai un exam' d'informatique cet après-midi, je dois être de retour en cours des 14h.

Hello ! me salue Bob en me voyant. How are you ?

— I'm fine, thank you. And you?

— Great ! Today, you swim in lane numbert 2. Well' start with the butterflux stroke, then freestyle.

J'opine et vais me placer devant la ligne d'eau numéro 2. Durant quelques minutes, je fais des ronds de jambes et de bras pour m'échauffer, avant de descendre dans l'eau. Quand j'étais petit, j'avais tout le temps froid dans l'eau, et cela n'est jamais réellement passé. Sur l'instant, je frissonne.

Heureusement, je vais vite me réchauffer en nageant.

Mes muscles ne sont pas encore suffisamment chauds pour que je m'élance depuis le plongeon et je préfère y aller progressivement. Je commence par effectuer quelques longueurs pour me mettre en jambe, puis passe directement au crawl. Le 400 m 4 nage est ma spécialité, je dois donc connaître parfaitement toutes les nages, et pouvoir varier en un temps limiter.

Une fois mes muscles chauds, Bob me demande de passer la vitesse supérieure et d'accélérer. Lorsque je lui ai envoyé ce fameux mail, il y a plusieurs années, lui demandant de m'entraîner pour que j'atteigne le niveau de Phelps, je ne pensais pas qu'il accepterait. Je dois tout à Bob, il m'a vraiment aidé à me canaliser et améliorer mes performances, notamment en m'inscrivant à de nombreuses compétitions locales, en Arizona. Même si j'appréciais mes amis et mon entraîneur du club de Toulouse, j'ai vraiment enregistré une progression spectaculaire avec lui.

Faster ! cri Bob depuis le bord de la piscine ! Your Legs, Léon !

Je pousse sur mes jambes, tire sur mes bras. J'effectue une roulade, me prépare pour l'impulsion, glisse sous l'eau pour effectuer ma coulée, puis ressort pour enchaîner par le crawl. Depuis le bord du bassin, Bob me conseille et corrige mes mouvements. J'ai été très touché par les mots qu'il a prononcé après les jeux. J'avais écouté l'une de ses interviews dans laquelle il disait :

— « Je suis tellement fier de lui. Il y a trois ans, j'ai promis à ce gamin qu'il pourrait y arriver, alors le voir réussir, c'est tellement beau. C'est une performance historique incroyable qu'il a effectuée. Cela montre le travail qu'il a accompli depuis des années pour arriver à ce niveau. La façon le stress et son attitude ont été parfaites ».

Ces mots n'auraient pas pu me faire plus plaisir. Ils m'ont touché en plein cœur.

En ce qui concerne mes performances aux jeux et de nageur, Bob n'a jamais rien eu à me reprocher. Par contre, il a été un peu plus critique concernant Apolline. Lui, mon père, Tony et mon agent, se sont occupés des médias, qui ont fini par nous laisser tranquille. L'effet Léon s'étant tari avec mon départ en France, et comme Apolline et moi n'avons plus fait de réapparition publique, les gens se sont mis en tête que c'était terminé. Plus personne ne parle d'elle, très peu d'informations fuitent sur ma vie privée, en dehors de celle que je publie sur les réseaux, et qui sont toujours des photos ou vidéos dans la piscine.

Jusqu'à cette vidéo avec Axana.

Je l'ai encore en travers de la gorge, même si elle s'est excusée. J'espère qu'Apolline est passée à autre chose et ne m'en veut plus. Je m'en veux de l'avoir fait douter, alors que je ne suis pas vraiment responsable. J'aurais voulu qu'elle garde pour toujours la confiance que nous avions instaurée. Cette rage en moi me donne la force pour pouvoir avancer plus vite. J'effectue une nouvelle roulade, pousse sur mes jambes, et remonte après ma coulée sur le dos. Bob propose alors que nous fassions des sessions chronométrées, et nous passons une bonne trentaine de minutes à faire cela.

Après plus d'une heure de nage, je sors de l'eau. Mon corps est plein d'énergie. Bob vient aussitôt me trouver pour me montrer mes performances que nous analysons tous les deux sur le bord du bassin, pendant que je me sèche.

It's not bad. But you can do better.

C'est tout Bob ça. Même après cinq médailles d'or, il estime toujours que je « peux faire mieux ». Je ne vais pas lui en tenir rigueur, c'est moi qui lui demande de me pousser à mon maximum.

When are you leaving for France ? me demande-t-il.

Monday.

Will you come back ?

Je fixe Bob, ne sachant trop quoi dire. Sa question sous-entend-t-elle quelque chose ? Est-ce mon coach a compris que j'envisageais de retourner vivre en France, pour être plus proche de ma famille et d'Apolline ? Un petit sourire en coin étire ses lèvres. Bob a toujours su lire en moi comme dans un livre ouvert. On dirait mon père, c'est flippant. Il pose une main sur mon épaule, tel un père bienveillant, et me tapote doucement le biceps. Puis, il me renvoie au vestiaire pour me changer et me dit d'être de retour ce soir à 18h pour une troisième session.

Je me penche alors vers Bob pour le serrer dans les bras. Une seconde, il reste sans bouger, puis ses mains tapotent mon dos et il me rend mon étreinte.

Thank you, for all, murmuré-je.

Il s'écarte et me répond par un clin d'oeil. Je pars alors vers les vestiaires, le coeur léger.

L'océan qui nous sépare : Léon Marchand et Apolline, la bénévoleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant