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Romy, Juillet

— Un peu plus à droite ta tête, Romy.

Ma relation avec Jules me fait vaguement penser à celle que j'entretien avec Thomas, mais celle avec Thomas est fausse.

Cela ne veut pas dire que j'associe Thomas à Jules, non, loin de là mais Jules savait si bien jouer avec les apparences. Un peu comme Thomas et moi, qui sommes actuellement en train de le faire. Rien de mieux que de finir une journée par un shooting photo sur la plage, soleil couchant pour alimenter nos réseaux !

— Thomas, mets ta jambe un peu plus droite aussi.

Oui, Jules paraissait parfait, attentionné, aimant... mais ce n'était qu'une façade. Derrière ce masque se cachait un homme incapable d'aimer autrement que de façon destructrice. Je l'ai perçu dès notre mise en couple mais j'étais trop amoureuse pour voir ses défauts.

Nos trois premières années ensemble ont été comme parfaites, si on ne compte pas nos nombreuses disputes, mais j'imagine qu'un couple sérieux doit passer par ses étapes, surtout à notre jeune âge.

C'est plutôt vers nos quatre ans de relation qu'il me remettait beaucoup le chapeau lors de nos disputes. Il me faisait croire que tout était ma faute, que je devais être plus parfaite, plus conforme à ce qu'il attendait de moi. Chaque jour, je m'efforçais de paraître heureuse, forte, amoureuse, alors qu'à l'intérieur, je me décomposais. Les souvenirs de ses critiques incessantes, de ses exigences démesurées, me hantent encore aujourd'hui.

Je l'aimais de plus en plus tandis que je sentais que lui se lassait.

Vers nos cinq ans de relation jusqu'à la fin, tout s'est plutôt agréablement bien passé à ma plus grande surprise. Jusqu'à ce 10 février, où, du jour au lendemain, il m'a trompé et a essayé par la suite de me récupérer comme une merde. J'avoue ne rien avoir vue venir sur le coup, puis en y repensant, c'était « logique ».

— Thomas regarde Romy et toi Romy, regarde vers la mer.

Et maintenant, je me retrouve à devoir jouer un nouveau rôle, celui de la petite amie parfaite de Thomas. Un rôle imposé par des circonstances que je ne maîtrise pas, dicté par des attentes extérieures et par un contrat qui me réduit à une simple marionnette. Le pire, c'est que je dois sourire, paraître comblée alors que je suis terrifiée à l'idée de revivre ce cauchemar, de perdre encore une fois mon identité dans les méandres des faux-semblants.

Mais le cas « Thomas » est très délicat. Car oui, il y a les réseaux sociaux, mais il y a aussi les magazines, les émissions... tout nous pousse à soigner notre image, à nous montrer sous notre meilleur jour, à cacher nos failles.

Alors que je sais que je ne pourrai pas me cacher indéfiniment.

Je sais que James Wolf valorise le paraître, au détriment de l'être. Pour lui, être soi-même est devenu une faiblesse, un défaut à corriger. Mais James Wolf est une superstar. Il a grandi comme ça, il a pu transmettre les codes à son fils. Moi je démarre de 0 au niveau 100.

Combien de fois ai-je entendu des gens dire que l'important, c'est ce que les autres voient de vous, et non ce que vous ressentez vraiment ?

Le physique attire tandis que l'âme avec ses cicatrices et ses faiblesses, reste souvent invisible et ignorée.

Je n'ai jamais été d'accord avec ce genre de discours mais me voilà aujourd'hui, à faire exactement ce que ces gens disent. Et mes prochaines semaines vont être composées de sourires forcés, de mains entrelacées pour les caméras, de baisers qui n'auront aucune sincérité.

ÉPHÉMÈRE | prochainement chez Hachette Romans +Où les histoires vivent. Découvrez maintenant