Chapitre 21

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"Qu'est-ce qu'il m'a pris. Qu'est-ce qu'il m'a pris. Qu'est-ce qu'il m'a pris." Je murmure à voix basse en tournant le dos à l'homme occupé à pianoter sur son téléphone.

Je fais mine de m'intéresser à un débardeur blanc où une simple écriture orne le haut d'un "Be free right now!" noir. Je ferme les yeux en sentant mon coeur battre la chamade. Vais-je réellement voler deux débardeurs? J'essaye de calmer ma conscience qui me crit que j'ai déjà fait assez de bêtises pour les dix prochaines années à venir en me convaincant que ce ne sera que deux bêtes hauts légers parmis tant d'autres. Que cet homme n'y fait guère attention tant il en possède et que tous ce qui l'intéresse c'est de vendre ces stupides et horribles vêtements. Kaya arrive sans me jeter un coup d'oeil; nous devons faire comme si nous étions de pures inconnues. Elle rejette ses cheveux en arrière et prend un débardeur en main pour l'inspecter. Elle le porte devant elle pour examiner la taille et le repose délicatement à sa place pour ensuite se diriger vers les shorts qui pendent plus loin. Au premier regard on peut observer et remarquer une qualité laissant à désirer; au premier lavage on peut bien lui dire adieu! Mon coeur bat dans mes tempes quand elle s'empare de deux shorts en me lançant un regard entendu.

"S'il vous plait?" Dit-elle à l'adresse du bonhomme.

Il est habillé d'un simple t-shirt blanc laissant transpercer deux grandes auréoles sous ses aisselles, d'un short de plage et de ce terrible couple qui fait frissonner toutes les fans de mode; les sandales et chaussettes. Sa barbe de trois jours est sale et il exprime un air gravement ennuyé, l'aire de dire "Quel boulot... Ma vie est nulle, et en plus, j'suis célibataire. Tiens, j'irais bien boire une bière." Vous voyez? Je m'excuse pour les rimes atroces, ce n'était pas voulu. Assez plaisanter, je suis en mission tout de même! Oui... En mission vole de t-shirts moches, bravo Mercy, tu peux être fière de toi! Quelle grande aventure. Je délaisse un énième t-shirt avant de caler mon sac sur mon épaule et de quitter le stand avec l'air le plus naturel possible. Kaya continue de bombarder l'homme de questions sans tomber à cours d'arguments, elle est emportée sur un discours du coton biologique qu'elle aime retrouver dans ses vêtements, que c'est un grand pas pour l'écologie de porter des vêtements bio... Mais comment fait-elle? Et en plus, c'est que l'homme en question parait intéressé! Elle est tant pleine de vie, tant convaincante que même si elle parlait de la cultivation de la pomme de terre par des moines dans le désert du sahara en saison ardente, venant d'elle ce serait intéressant. Alors je m'éclipse en me collant contre les paroies extérieurs laissant la marchandise à découvert auprès des clients qui passeraient devant. Je longe ce petit espace couvert de vêtements blancs, rouges, verts, jaunes, roses toute tremblante. Je ne sais pas ce que j'attends. Le bon moment peut-être? Mais c'est quand le bon moment? Je n'ose pas faire un geste de plus, alors qu'il suffirait de prendre en vitesse deux de ces chiffons blancs, les fourrer dans mon sac et me retirer! Je me décide enfin à m'attarder à cette tâche qui me semble impossible quand j'entends Kaya dire qu'elle aimerait les acheter. Bon sang, pourquoi ne pas continuer de parler du coton bio plus longtemps?! Je me retourne, vive comme une éclaire et arrache presque deux vêtements au hasard.
Malheur...
Quand j'ai dis arracher, c'était vraiment arracher. J'y ai été tellement fort que le stand en a tremblé. Je suis tétanisée avec mes deux loques en mains. Pourquoi mes jambes refusent-elles de courir?!

"Qu'est-ce que..." Dit l'homme.

"Attendez! Je voudrais d'abord payer, je suis pressée, je n'ai pas vu le temps passer!" Essaye Kaya.

"Une minutes mademoiselle, je suis à vous dans un instant."

Bouge toi Mercy, bouge toi!

Enfin je démarre au quart de tour et me mets à courir dans l'allée.

"Hé! Vous!"

Je ne me retourne même pas, je cours tout simplement comme j'ai courru ce matin pour m'éloigner de cet hôtel. Je débouche à la limite du marché et pousse un juron. Ils ont donc vraiment dû entourer ce marché de palissades! Je ne sais pas si l'homme me suit et je ne veux pas savoir; je plonge entre une des tentes et la palissade et me met à longer le plus rapidement possible, oppressée par le poids de la tente et de la palissade qui se referment presque contre moi. Enfin je sors de cette embouchure et me remets à courir en bousculant les gens.

London Calling [TBS/DOB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant