Chapitre 19 ➳ Les pouvoirs des corneilles

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   Deux jours. Deux putains de jours que je suis enfermée dans cette cellule qui pue la mort. Deux jours que je ne manges pas. On m'a apporté de la nourriture pourtant, mais je n'en veux pas. Par contre, j'ai été obligée de boire, pour ne pas me déshydrater.

   Je regarde le plafond, allongée sur mon lit de fortune, et je repense à ce que j'ai fais pour en arriver là. J'aurai dû juste le blesser à un endroit stratégique : ça m'aurait permis de gagner sans avoir d'ennuis par la suite. Mais je l'avais tué, pour la simple et bonne raison qu'il commençait à menacer de faire du mal de Jojen. Il avait trouvé que c'était mon point faible.

   Je soupire. Je ne le reverrai sans doute jamais. Il va repartir avec Bran et les autres pour aller voir la corneille à trois yeux. Ce n'est pas plus mal.

   J'entends soudain des pas, suivis par une clé qu'on tourne dans la serrure, et je me redresse en position assise en fronçant les sourcils. Qui donc peut venir au beau milieu de la nuit ?

   La porte de la cellule s'ouvre, laissant entrer un garde, le sourire aux lèvres. Qu'est-ce qu'il me veut celui-là ?

- Salut ma belle, me salue-t-il en s'avançant jusqu'à moi.

   Je recule jusqu'au fond du lit, sachant désormais ce qu'il veut. Une lueur de désir brille dans ses yeux verts. Pas encore, pitié !

- N'aies pas peur, ce que je vais te faire sera très plaisant.

   Il s'assoit au bord de mon lit et caresse ma jambe en me souriant. Je ferme les yeux et mon cœur s'affole. Par pitié, que ça ne recommence pas...

   Soudain, j'entends le bruit d'une lame qui transperce la chair, et je rouvre les yeux en entendant le bruit d'un corps qui tombe.

   Le garde est par terre, et Jaime se tient en face de moi, son épée encore dégoulinante du sang du garde. Je fronce les sourcils.

- Pourquoi tu..., je commence.

- Tais-toi et suis-moi, on a pas beaucoup de temps, me coupe-t-il en partant déjà vers la sortie.

   Je me lève d'un bond, sautant hors du lit, et le suit.

- Où sont les autres ? je demande avec inquiétude et méfiance.

- Dehors. On a pris des chevaux de la gardes. Ils t'attendent avec le tien.

- Ils ?

- Ton copain blond et Tyrion.

   Sans que je le veuille forcément, un sourire de soulagement se dessine sur mon visage et je soupire. Jojen est vivant ! Et il ne m'a pas abandonnée ! À cette pensée, une chaleur m'envahit.

   Nous nous faufilons discrètement dans les couloirs, et arrivons devant un mur. Jaime pose sa main à un endroit, et une partie du mur se décroche en pivotant. Il attrape une torche et me la tend.

- Tiens. Tu en auras besoin, me dit-il alors que je prends la torche.

- Pourquoi tu fais ça ?

- Tu as sauvé mon frère.

- Mais j'ai tué ton père.

- On en rediscutera une prochaine fois, le temps presse.

   Je hoche la tête et le remercie d'un regard. Puis j'entre dans le passage secret et avance dans le noir, seulement éclairé de ma torche.

   Un bruit sourd se fait entendre, et je me retourne, pour voir le mur qui pivote pour revenir à sa place. J'ai tout juste le temps d'apercevoir Jaime qui me fixe, de l'autre côté, avant qu'il ne se soit complètement refermé derrière moi.

   Je soupire et continue mon avancée, voyant à seulement quelques mètres devant moi tellement il fait noir. Le chemin est droit, je ne devrais pas me perdre.

   J'étais perdue dans mes pensées lorsque la voix retentit. Claire et douce, elle me fit néanmoins sursauter.

- Luna tu m'entends ?

   Je lâche un hoquet de stupeur en reconnaissant la voix. Celle de Jojen. Je tourne la tête dans tous les sens, cherchant où il est.

- Jojen ? je demande.

   Aucune réponse ne vient. Mais la voix répète pourtant ce qu'elle a dit plus tôt. Je ne rêve pas bon sang ! Tout à coup, un déclic se fait dans mon esprit. Et si...

- Et toi, tu m'entends ? je demande.

   La réponse tarde à venir, si bien que je pense m'être trompée. Mais la voix retentit bientôt joyeusement.

- Oui, oui je t'entends Luna ! s'écrie-t-il.

   Je souris avec amusement. Puis je reprends mon chemin, en gardant quand même la connexion avec Jojen.

- Tu vas bien ? me demande-t-il avec inquiétude.

- Oui. Il faut juste que je trouve la sortie.

- Ne te perds pas ! s'amuse-t-il.

- Ne t'inquiète pas pour ça, j'ai pas trente six chemins de toute façon.

- Tant mieux alors, rit-il. Tu arriveras plus vite.

- Impatient de me revoir ? je demande en suivant le virage à droite qui se dessine dans le tunnel.

- Oh oui ! J'ai vraiment eu peur pour toi Luna lorsqu'ils t'ont enfermée...

- Je vais bien Jojen, rassure-toi.

- Mais pourquoi tu as tué Tywin ? Tu ne pouvais pas juste le blesser ?

- Il t'a menacé.

   Un silence s'ensuit, et j'ai peur que Jojen ne me réponde pas. Mais sa voix ne tarde bientôt pas à se faire entendre dans ma tête.

- Tu l'as tué juste pour ça ?

- Tu devrais te réjouir ! C'est pas tout le temps que ça m'arrive de protéger quelqu'un comme ça.

- Sauf que tu aurais pu mourir par ma faute.

- Mais ça n'est pas arrivé. Tu vois, j'ai tenu ma promesse, je suis toujours en vie ! Du coup, tu auras quelque chose à me dire quand je vais arriver.

- Dépêche-toi d'arriver saine et sauve dans ce cas !

- Où vous êtes ?

- Dans la forêt, juste à côté du palais.

- D'accord. J'arrive.

   Et je coupe la connexion, me concentrant sur mon parcours. De la lumière apparait et j'accélère le pas. Bientôt, le jour se levant m'éblouit. Pourtant, ce n'est que l'aube, pas encore le jour ! Mais il fait tellement sombre dans ces tunnels...

   Je souris et fonce vers la forêt, courant désormais. Il n'y a personne dehors, si bien qu'on ne me remarque pas.

   J'arrive enfin à la lisière du bois et m'avance prudemment. On ne sait jamais !

- Jojen ? je murmure avec un grain d'excitation dans la voix à l'idée de le revoir.

   Personne ne me répond. Un corbeau croasse. Il passe au-dessus de ma tête et disparaît. Je soupire. J'ai cru que c'était Jojen.

    Je m'apprêtais à repartir, m'enfonçant un peu plus dans cette forêt, lorsqu'un souffle chaud se fait sentir sur mon cou et que des mains m'entourant les hanches délicatement et avec une certaine hésitation.

- Tu m'as manqué, me souffle la voix au creux de mon oreille.

   Je souris en le reconnaissant. Finalement, c'était bien Jojen ce corbeau.

- Toi aussi, je réponds finalement en posant mes mains sur les siennes et en fermant les yeux pour profiter de cet instant magique.

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