" Nos Différences , Notre Force . "

** XXXVI **

( Flash Back)

[ Il y a 6 ans ]

À cette époque là, j'avais 12 ans et demi. Je me souviens de ce jour comme si c'était hier.

C'était un vendredi soir, en mai. Je devais aller donner de la nourriture à la maman de Rosita.

Je m'apprêtais à sortir quand mon frère m'interpella :

" - Sharon?! Tu vas où?
- Ben, donner du pundu à tantine Betty!
- Non, tu ne sors pas! Il fait tard!
- Ben pourquoi? Elle habite juste en face! Je n'ai même pas à sortir de la cité!
- Dehors c'est dangereux. Tu ne sors pas, c'est tout."

Et il m'avait planté là, en montant à l'étage.
À cette époque là, j'étais très têtu.
J'aurais dû l'écouter mais j'étais quand même sortie en cachette.

L'aller c'était très bien passé. En redescendant du bâtiment de Rosita, j'avais constaté la présence de véhicules qu'il n'y avait pas quand j'étais montée.

Je commençais à avoir peur, j'entendais des bruits bizarres. Je pressais les pas, quand une personne me porta en me collant un chiffon sur le nez, jusqu'à ce que je perde connaissance.

Quelques heures plus tard, je m'étais réveillée dans une pièce sale et humide ; une cave. Il y avait juste une fenêtre close et poussiéreuse. Mais cette fenêtre était ma seule mesure du temps. J'étais attachée à des chaînes.

Je ne comprenais pas ce qu'il m'arrivait, j'avais tellement peur. Les jours passèrent, personne n'était venu me voir. Personne ne me nourrissait.

Un soir, un homme rentra dans la cave. Il portait une cagoule, je ne voyais que ces yeux. Des yeux noirs. Il s'était approché de moi.

Il m'a relevé en me soulevant par mes cheveux crépus attaché en chignon.

" - Ta cité a voulu me voler mon fric, rigola t-il sournoisement, ça ne se passera pas comme ça. Chaque semaine, je prendrai une fille de ta cité pour lui faire du mal, la torturer, jusqu'à ce que votre chef me rembourse mon fric. Pas de chance pour toi, c'est toi la première."

Et il est ressorti.

De quel chef, il parlait? Ça je n'en savais rien! Je ne savais même pas qu'il y avait un chef dans les cités.

Le lendemain, je fus réveillée par un homme qui me nettoyait le visage. C'était un homme âgé de la cinquantaine, un homme d'origine tunisienne.

Il chuchotait en arabe.

" - Benthi, réveilles-toi... "

J'ai ouvert les yeux. J'avais faim et soif. Ma gorge était sèche.

" - Manges. "

Il m'a fais mangé et boire. Puis, il s'est assis à côté de moi.

" - Monsieur, est ce que je vais mourir...?
- Je... non, tu ne vas pas mourir.
- Un homme est venu me dire qu'il allait me torturer... et j'ai..."