Chapitre 23

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La menace contenue dans mes mots eut à peu près autant d'effets sur Harvey Matthews que si je m'étais adressée à la poubelle qui servait aimablement de réceptacle à vomi. Cela dit, venant d'une personne alitée et aussi énergique qu'une huitre sortie de sa coquille, je pouvais comprendre que cela n'avait rien de très impressionnant. Celui que l'on surnommait Stone croisa les bras, dissimilant à peine son air moqueur et croisa les bras.

- Maintenant, sortez, ajoutai-je calmement. Je veux m'entretenir en privé avec Allan et Samuel. Afin de vous exposer ensuite mes conditions.

Et toc. S'il croyait que j'étais naïve au point d'accepter sa proposition foireuse sans poser de questions, il se fourrait le doigt dans l'œil.

Pris de court, mon ancien professeur haussa les sourcils puis choisit d'éclater d'un rire rocailleux et un peu forcé :

- Des conditions ? Sans trop m'avancer je peux tout de même affirmer que c'est toi, Luna, qui est en train de te consumer à petit feu, et tu n'es donc pas en mesure de négocier quoi que ce soit. C'est toi qui a tout à perdre.

- Je me fiche pas mal de mourir, crânai-je, et j'ai déjà tout perdu il y a deux ans. En revanche, je déteste que l'on se serve de moi, et c'est ce qu'a l'air de désirer le chef des Revenants. Ma vie est suffisamment manipulée à mon gout pour que je ne laisse pas une personne de plus y interférer.

Là, je bluffais un peu, dans le sens où je n'éprouvais pas non plus une motivation exceptionnelle à la perspective de mourir, et encore moins à celle de finir en légume, le cerveau brûlé par le poison. Mais le reste était vrai et je relevai la tête, les yeux plantés dans ceux du colosse. Aux pieds du lit, Allan étouffa un léger rire à me voir ainsi reprendre le dessus sur l'instructeur des recrues.

- Je savais que tu avais un sale caractère, soupira l'autre en haussant les épaules. Mais la maladie ne semble pas te rendre de meilleure humeur...

Je ne lui accordai pas le luxe de lui répondre et repoussai la poubelle car je me sentais beaucoup mieux. Comme s'il lisait mes pensées, Stone m'interpella :

- Ne te réjouis pas trop vite. Pour le moment ton état s'est amélioré parce que ton métabolisme a réussi à évacuer une partie de la substance toxique qui coule dans tes veines, mais cela ne durera pas. Ton corps se débrouille comme il peut pour diriger ce liquide nocif dans des zones où il peut être expulser, et d'ailleurs tu risques d'en retrouver dans tes urines et tes se....

- Laissez mes selles en paix, elles sont très bien où elles sont, le coupai-je en me forçant à ne surtout pas penser que dans d'autres circonstances, j'aurais certainement éclaté de rire en prononçant une phrase pareille. Maintenant, dehors.

Harvey pivota sur ses talons, et s'en fut en secouant la tête, l'air désabusé. Allan amorça aussitôt un geste pour le suivre :

- Je devrais aller avec lui. Il pourrait appeler n'importe qui.

- Je sais, mais j'ai quelque chose à vous dire à tous les deux. Ça ne prendra qu'une minute.

Mon mentor croisa les bras sur son torse et m'invita à poursuivre d'un signe.

- Très bien, dis-je. Comme je l'ai dit à Stone, je vais le laisser me mener aux Revenants, si tant est qu'ils existent. Mais j'irai seule.

- Seule ? s'étouffa Samuel. Tu as vu dans quel état tu es ? Je te mets au défi de faire l'aller-retour jusqu'à la salle de bain, alors te défendre contre ce GEN !

GENESIS (2)Where stories live. Discover now