Chapitre 31

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Ulrich Marx fit disparaître d'un simple geste de la main tous les documents projetés en relief par N.I.A sur son bureau. La journée avait été longue et il n'aspirait plus qu'à la solitude.

- Excellent travail, Irina, dit-il à la doctoresse assise en face de lui. Dans combien de temps ces pistolets à sérum seront-ils opérationnels pour une phase de test ?

La GEN remit en place sa magnifique chevelure d'un geste très étudié avant de répondre :

- Le dispositif en lui-même est prêt. Malheureusement, il reste encore des améliorations à apporter à la formule du sérum. Je suis d'avis qu'il est encore nécessaire d'accélérer sa vitesse d'action, tout en limitant les souffrances du sujet.

- Vous avez raison, ma chère. Je passerai au laboratoire demain matin et nous reparlerons de tout ceci.

Irina Malcolm se leva gracieusement puis prit congé, le sourire aux lèvres. Marx la regarda refermer doucement la porte, perdu dans ses pensées, un rapport sous forme papier posé devant lui.

Une nouvelle étape de l'expansion de la race GEN était en marche, et il lui tardait de lancer son prochain projet. Bientôt, les GEN se révèleraient au monde et les humains verraient à quel point ils leur étaient supérieurs. Et bientôt, tous voudraient se faire transformer, éradiquant de ce fait la maladie, la vieillesse, la faiblesse... Quant à ceux qui refuseraient... Marx avait tout prévu, et le docteur Malcolm allait contribuer à son idée au moyen des pistolets à sérum, permettant ainsi d'injecter le produit de force à une population conséquente. Après tout, que pouvaient bien une poignée d'Hommes contre son Armée Noire ? Evidemment, il y aurait aussi ceux qui ne seraient pas dignes de recevoir la mutation, mais la sélection se ferait alors naturellement, laissant mourir les faibles. Cependant, Ulrich Marx devait réfléchir à un détail gênant et auquel il n'avait pas vraiment de réponse à l'heure actuelle : la race GEN ne pouvait concevoir naturellement, puisque les sujets femelles ne pouvaient enfanter. Le directeur de l'Institut avait espoir de trouver un moyen de remédier à ce problème, même si, en attendant, il lui faudrait certainement conserver un petit groupe d'humains pour assurer la reproduction et la création de nouveaux GEN. Marx agita la tête : il avait encore le temps de chercher une solution.

Le directeur se leva à son tour, lissant son costume, et se dirigea lentement vers la porte située entre deux étagères de livres. Il entra dans la pièce jouxtant son bureau, inspirant profondément l'odeur familière de sa chambre, et alla s'asseoir sur le lit. Marx avait préféré ici une décoration épurée comme dans le bureau. Pour seul mobilier, la chambre comprenait un immense lit, un dressing et une petite table de nuit agrémentée d'une lampe. A l'entrée du GEN, celle-ci s'alluma automatiquement, baignant l'endroit d'une lueur douce et chaleureuse, et les lumières du bureau s'éteignirent. Marx sourit, satisfait. Lui qui bénéficiait pourtant d'une vision nocturne plus que performante n'aurait pour rien au monde effectué ses préparatifs du soir dans le noir, vieille peur d'enfance qu'il n'aurait jamais admise devant quiconque.

Avec des gestes millimétrés depuis des années, Ulrich Marx défit les boutons de sa veste qu'il plia soigneusement avant de la poser sur la corbeille de linge, dans le renfoncement qui donnait sur une immense salle de bain équipée d'une douche à jets massant. Il retourna s'asseoir, toujours eu même endroit, et entreprit de desserrer sa cravate. Ces actions répétitives et habituelles le détendirent et il sentit ses épaules se dénouer. Depuis quelques jours, il se sentait sans cesse sur le point de craquer, de laisser exploser la colère qui bouillonnait dans sa poitrine.

Comment, lui, Ulrich Marx, qui avait toujours une longueur d'avance sur tout le monde, avait-il pu laisser les choses aller si loin ?

Luna Deveille était morte.

GENESIS (2)Onde histórias criam vida. Descubra agora