Désastreux Amoureux

Chapitre 16

Ses cheveux châtains étaient éparpillés sur l'oreiller à côté du mien. Elle dormait paisiblement emmitouflée sous ma couette. Ses lèvres rosies et charnues me faisaient envie. Elle bougea un peu et une mèche tomba sur son visage. Je ne pus m'empêcher de la remettre en place. Ses lips s'étirèrent en un petit sourire ensommeillé. Elle souleva lentement ses paupières pour poser ses yeux sur moi, allongé près d'elle.

Il faisait sombre la nuit derrière pour que je pus remarquer ses iris après son passage à la salle de bain. Mais alors que les rayons du soleil passent à travers les stores de la fenêtre de ma chambre, leurs couleurs étaient parfaitement visibles.

- Tes yeux...

Ces deux petits mots sortis dans un murmure de ma bouche eurent l'effet de l'effrayer. Elle se redressa précipitement et se leva du lit. Je la rattrapai, l'empêchant de quitter la pièce. Elle plaça ses mains devant ses perles.

- Ne les cache pas, Jade, dis-je en écartant ses fines mains de son visage. Elle gardait son regard vers le sol. Je remontai son menton à l'aide de mon pouce et de mon index. Regarde moi.

Ses yeux vinrent se plantaient dans les miens. Ils étaient si beaux, pourquoi les disimulait-elle ? La couleur chocolaté de son iris droite contrastait avec l'émeraude de celle de gauche.

- Tu as le plus beau regard que j'ai jamais vu, dis-je doucement.

Elle secoua la tête négativement.

- Non, tu ne comprends pas...

- Explique moi alors... Pourquoi tu les cachent ?

Elle me poussa et sortit de la pièce. Je l'entendis refermer la porte de la salle de bain sur elle et l'eau couler quelques minutes après son entrée.

J'étais assis sur mon bon vieux canapé, les écouteurs dans les oreilles où une prod raisonnait. Je réfléchissais tant bien que mal à quoi bien écrire sur les lignes du carnet posé sur mes genoux mais mon esprit était ailleurs. Je sentis un poids se posait près de moi. Je tournai la tête et vis Jade, le regard fixe vers la fenêtre. Elle avait ramené ses cheveux humides en une queue de cheval et avait vêtu l'un de mes larges t-shirts ainsi que mon jogging. J'aimais particulièrement la voir porter mes vêtements. Elle triturait sa cicatrice en l'observant. Je retirais mes oreillettes. Elle pinça ses lèvres avant de relever le chef.

- C'est idiot, j'ai voulu jouer à la petite héroïne, sourit-elle tristement. Mon père avait bu, une fois de plus. Et mon grand frère avait oublié de faire ce que mon géniteur lui avait demandé. Je ne me souviens plus ce que c'était, j'étais petite. Je devais avoir treize ans ou peut-être moins, je ne sais plus, elle baissa les yeux vers la marque. Il a été pris d'une colère décuplé par son taux d'alcoolémie élevé. Il a pris un simple couteau et la brandi vers mon frère. Il allait lui faire du mal, peut-être plus encore, je ne sais pas. Simon avait les yeux de ma mère et c'était quelque chose que mon père détester. Depuis le divorce, le peu de mots que mes parents s'étaient échangées n'était qu'insultes, à croire qu'ils ne s'étaient jamais aimés, elle se stoppa dans ses explications avant de reprendre le fil de son histoire. Quand j'ai vu ce couteau dans la main de mon père, je ne pouvais pas rester là, en tant que spectatrice. Mon aîné pleurait, il était effrayé. Je devais faire quelque chose. J'ai donc stoppé la trajectoire de l'arme blanche. Lorsque mon vieux a vu mon sang tomber sur le sol, il a lâché le couteau. Je crois qu'aveuglé par sa haine pour ma mère, il aurait été capable de tuer.

Une larme dévala sa joue.

- J'ai ses yeux, murmura-t-elle avant de me regarder moi. Quand je les regardent dans un miroir, je revois les siens et sa haine. J'ai les yeux de mon père, Ken...

Cette fois, je ne pus m'empêcher de balayer ses larmes et de la prendre dans mes bras où ses sanglots éclatèrent contre mon cœur.